Après une année 2021 marquée par le retour des investissements suite à la crise sanitaire induite par le Covid-19, l’année 2022 a été placée sous le signe de la prudence. Avec la guerre en Ukraine, l’augmentation des taux d’intérêt et l’inflation, les start-up françaises et européennes ont pris le temps d’analyser leur situation avant de boucler leur tour de table.

Les start-up européennes plus prudentes en 2022

Après une année d’investissements records dans toute l’Europe, avec 105 milliards de dollars levés par les entreprises technologiques européennes, 2022 aura été un peu plus calme. Dans son rapport annuel « State of european tech 2022 », relayé par Le Monde Informatique, Atomico affirme qu’environ 85 milliards d’euros ont été investis dans des start-up européennes. Un chiffre plus important que les résultats de 2018, 2019 et 2020 compris entre 27 et 41 milliards de dollars.

Graphique représentant le capital investi par les fonds d'investissement entre 2018 et 2022.

En 2021, les fonds d’investissement n’ont pas hésité à placer leur argent sur des entreprises technologiques pour se renflouer après la crise du Covid-19. Graphique : Capital Invested ($B), 2018 to 2022E, dealroom.co.

Afin de trouver des investisseurs, les entreprises réalisent des tours de table, ce qui leur permet de lever des fonds. En général, ils permettent de réunir plusieurs investisseurs ou fonds d’investissement qui injectent de l’argent contre une part de la start-up. Une levée de fonds est donc constituée généralement de plusieurs investissements.

Le nombre de tours de table de série A, c’est-à-dire celles dont le but est de trouver des fonds pour financer le développement de l’entreprise, ont baissé de 50 % en un an. Les tours de table de série C, ayant pour vocation de trouver des investisseurs pour étendre l’activité l’entreprise notamment à l’étranger et permettant le rachat d’autres structures, ont chuté d’environ 60 % par rapport à 2021.

Entre le premier trimestre 2022 et le dernier trimestre 2022, les levées de fonds comprises entre 100 et 250 millions de dollars ont été divisés par quatre. À titre d’exemple, 6 start-up françaises, dont Spendesk qui propose une plateforme tout-en-un de gestion des dépenses, sont devenues des licornes entre décembre 2021 et février 2022. Pour le devenir, elles ont réussi à lever plus de 100 millions d’euros.

Seules deux nouvelles start-up ont ensuite rejoint ce cercle très fermé entre mars et décembre 2022. Tout d’abord EcoVadis, start-up spécialisée dans l’évaluation des performances des entreprises (en matière de responsabilité sociétale et environnementale (RSE) et Younited Credit, une start-up proposant des crédits à la consommation aux particuliers. Ce pattern au niveau des levées de fonds conséquentes est sensiblement le même pour les autres pays européens.

Par rapport d’autres pays européens, la France est mieux lotie puisqu’avec 735 opérations et 13,49 milliards d’euros levés, elle dépasse notamment l’Allemagne et des 664 opérations pour 10,04 milliards d’euros levés. Toutefois, les deux puissances européennes sont largement dépassées par le Royaume-Uni qui compte près du double d’opérations pour plus de 27 milliards d’euros investis.

Graphique présentants les investissements vers les start-up françaises, allemandes et britanniques en 2021 et 2022.

Si la France était derrière l’Allemagne en 2021, elle le dépasse en 2022. Toutefois, les deux pays restent bien loin du Royaume-Uni. Graphique : Baromètre EY.

En 2021, Thierry Breton, Commissaire européen au marché intérieur, annonçait l’ambition de l’UE de doubler le nombre de licornes d’ici 2030. Il passerait ainsi d’environ 140 au début de l’année 2023 à 240 à la fin de la décennie. De son côté, le président de la République française, Emmanuel Macron, avait fixé en juin 2022 l’objectif d’atteindre 100 licornes tricolores à l’horizon 2030.

Le gouvernement français continue d’accompagner les start-up

Avec 13,5 milliards d’euros levés, les start-up françaises ont réuni plus d’argent qu’en 2021. Néanmoins, moins d’entreprises ont bouclé un tour de table en 2022 : 735 opérations contre 784 l’année précédente. En tout, 8,4 milliards d’euros ont été investis au premier semestre, contre 5,1 milliards au second semestre. Entre-temps, le contexte géopolitique mondial a évolué, ce qui explique cet écart entre les deux semestres. Tous les secteurs d’investissements au second semestre 2022 sont en baisse, une première depuis 2017.

Le gouvernement français en a conscience et souhaite davantage accompagner les start-up. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique, avait présent de nouvelles mesures pour faciliter l’introduction en bourse des licornes. Ensuite, le gouvernement a investi près de 500 millions d’euros supplémentaires pour favoriser la création de start-up deeptechs.

Au niveau des tours de table, 29 opérations ont affiché un résultat supérieur à 100 millions d’euros. Parmi elles, le groupe Sarbacane devenu le groupe Positive et qui a levé 110 millions d’euros. Le record de cette année est attribué à Qonto, service financier pour les professionnels,  qui a bouclé un tour de table de 486 millions d’euros et a ainsi pu racheter son concurrent allemand, Penta.

Au niveau des régions, l’Île-de-France reste en tête et monopolise 74 % des levées de fonds en 2022. Les Hauts-de-France et l’Auvergne-Rhône-Alpes suivent avec respectivement 7,3 % et 6,2 %. Pour ce qui est des secteurs privilégiés par les investisseurs, les services internet et les logiciels représentent environ 2,95 milliards d’euros de financement chacun. Ces deux secteurs sont suivis par les fintechs avec 2,34 milliards d’euros. À noter une baisse pour le secteur de la santé numérique qui avait pourtant levé 2,3 milliards d’euros en 2021 et qui ne se retrouve pas dans le top 3 de cette année.

Pour 2023, les spécialistes s’attendent à une baisse des investissements. Les entreprises seront prudentes et la sobriété sera de mise. Même si l’année 2022 fut plus que correcte pour les levées de fonds, les disparités entre le premier et le second semestre montrent que l’année 2023 sera un peu plus compliquée…