Dans un document long de 37 pages destiné à convaincre la FTC de ne pas bloquer le rachat d’Activision Blizzard, Microsoft explique que la transaction n’aura pas d’impact négatif sur la concurrence dans le secteur du gaming.

La FTC veut bloquer l’acquisition

La firme de Redmond a annoncé son rachat du studio indépendant Activision Blizzard en janvier 2022. À hauteur de 68,7 milliards de dollars, il s’agit de l’acquisition la plus importante de l’histoire du jeu vidéo. Avant sa complétion, Microsoft doit toutefois obtenir l’aval des régulateurs et pour l’instant, l’affaire s’annonce compliquée. Tandis que la Commission européenne et la Competition and Markets Authority (CMA) britannique enquêtent sur l’opération, la Federal Trade Commission (FTC), agence fédérale américaine, a entamé une procédure visant à la bloquer.

Selon la FTC, le rachat va affecter la concurrence mais également les consommateurs en donnant accès à Microsoft à des franchises incroyablement populaires, notamment Call of Duty, qui a rapporté 30 milliards de dollars à elle seule. L’agence estime notamment que la firme de Redmond a les moyens de bloquer l’accès aux jeux d’Activision à ses concurrents, notamment Sony, ou d’en dégrader volontairement l’expérience sur les plateformes autres que les siennes.

Les arguments de Microsoft

Dans sa réponse, Microsoft a adopté la même défense que lors de ses premiers échanges avec les régulateurs. L’entreprise rappelle qu’elle n’est pas du tout le leader du secteur des jeux vidéo, en étant grandement devancée par Sony et Nintendo ou encore le chinois Tencent. Selon elle, l’acquisition d’Activision Blizzard la placera en troisième position derrière Tencent et Sony en termes de revenus.

Infographies de Microsoft pour démontrer qu'elle ne domine pas du tout le secteur des jeux vidéo.

Infographies de Microsoft pour démontrer qu’elle ne domine pas du tout le secteur des jeux vidéo. Infographie : Microsoft.

Surtout, le géant américain affirme que Call of Duty ne deviendra pas un titre exclusif à l’écosystème Xbox. Afin d’apaiser les régulateurs, la société a passé des accords avec Nintendo et Valve pour que les jeux d’Activision soient présents sur leurs plateformes, et a même proposé un deal à Sony pour que Call of Duty soit également lancé sur PlayStation le même jour que sur Xbox, accord refusé par la firme nippone selon Microsoft.

« L’acquisition d’un seul jeu par le fabricant de consoles qui occupe la troisième place ne peut pas bouleverser une industrie hautement concurrentielle. C’est particulièrement vrai lorsque le fabricant a clairement indiqué qu’il ne retiendrait pas le jeu », déclare la firme de Redmond. Cette dernière a également affirmé qu’elle s’attendait à ce que le secteur devienne plus compétitif avec l’essor du cloud gaming, ce à quoi elle se prépare à travers cette acquisition.

« Il n’y a aucune raison raisonnable et légitime d’empêcher la conclusion de notre transaction. Notre secteur connaît une concurrence énorme et peu de barrières à l’entrée. Nous n’avons jamais vu autant d’appareils permettant aux joueurs de disposer d’un large éventail de choix pour jouer à des jeux. Les moteurs et les outils sont librement disponibles pour les développeurs, grands et petits. L’étendue des options de distribution des jeux n’a jamais été aussi vaste. Nous pensons que nous allons l’emporter sur le fond de l’affaire », déclare Bobby Kotick, PDG d’Activision Blizzard.

Dans son document, Microsoft explique en outre que trois jeux exclusifs ont d’ores et déjà sélectionnés pour l’avenir, mais que ceux-ci émanent du studio Bethesda, dont la société a fait l’acquisition en 2020. À l’époque, elle assurait néanmoins que le jeu Starfield ne deviendrait pas exclusif à son écosystème. Depuis la complétion du rachat, elle a fait marche arrière.

Une galère réglementaire pour la FTC ?

Comme l’explique le Wall Street Journal, cette affaire est complexe d’un point de vue réglementaire pour l’autorité de la concurrence américaine. Il s’agit en effet d’une « fusion verticale », ce qui signifie que Microsoft veut acheter une entreprise de sa chaîne d’approvisionnement plutôt qu’un concurrent direct. Son argument attestant que la concurrence sera affectée peut être considéré comme non recevable. En revanche, la FTC peut faire valoir que la transaction mettrait indirectement les consommateurs en danger, par exemple en permettant l’utilisation abusive d’informations sensibles sur les concurrents par l’entreprise.

L’affaire doit désormais être portée devant Michael Chappell, le juge administratif de la FTC. De leur côté, Activision Blizzard et Microsoft, qui veulent conclure la transaction en juin 2023, ont déclaré que la décision de la FTC violait leur droit à une procédure régulière en vertu du cinquième amendement de la Constitution des États-Unis.

En marge de cela, un groupe de gamers américains a déposé plainte contre Microsoft avec l’objectif de bloquer le rachat. Ils estiment que celui-ci aurait des répercussions négatives sur l’ensemble du secteur, concurrence, environnement de travail et consommateurs compris.