ByteDance, la maison mère de TikTok, a avoué, le 22 décembre, que certains de ses employés avaient eu accès aux données personnelles de plusieurs utilisateurs américains du réseau social. Parmi les personnes touchées se trouvent deux journalistes. Ces révélations remettent en question les efforts du géant chinois pour essayer de construire une relation de confiance avec Washington. L’application de partage de courtes vidéos est en passe d’être bannie aux États-Unis.

Des journalistes couvrant l’actualité de TikTok espionnées

Quatre employés de ByteDance, membres de la division responsable de la surveillance de la conduite des employés, ont tenté, au cours de l’été, de remonter la trace des fuites de conversations et de documents internes. Ils cherchaient à établir un lien entre le personnel et plusieurs journalistes américaines, Emily Baker White du Financial Times et Cristina Criddle travaillant pour Forbes. Les deux reporters ont dévoilé plusieurs informations confidentielles sur le poids lourd chinois au cours des derniers mois.

Pour remonter aux sources de ces fuites, les salariés de ByteDance ont eu accès, grâce au compte TikTok des journalistes, à leur adresse IP et à leurs données personnelles. Leur enquête s’est soldée par un échec. Les quatre employés, deux travaillant aux États-Unis et deux en Chine, ont été renvoyés.

Dans une note interne partagée au reste de son personnel et relayée par le New York Times, Rubo Liang, président-directeur général de ByteDance, indique avoir été « profondément déçu lorsque j’ai été informé de la situation ». Il explique que « la confiance du public, dans laquelle nous avons mis énormément d’efforts pour la construire, va être fortement ébranlée par la mauvaise conduite de quelques individus ».

Depuis plusieurs mois, ByteDance affirme que les informations des utilisateurs américains de TikTok ont été transférées au sein du service cloud d’Oracle. Cependant, d’après le New York Times, les anciennes données étaient toujours accessibles pour les employés de l’entreprise basée à Pékin. Shou Zi Chew, directeur général de TikTok, assure « que TikTok prend très au sérieux la sécurité des données » et s’engage à supprimer toutes les données en dehors des systèmes d’Oracle.

La relation entre ByteDance les États-Unis était déjà difficile

Les aveux de ByteDance mettent à mal la relation, déjà tendue, entre TikTok et le gouvernement américain. Alors que Chris Wray, directeur du FBI, estimait que TikTok représentait un danger pour la sécurité nationale des États-Unis, Washington et surtout les républicains réfléchissent à interdire la plateforme. Aujourd’hui, plus de 100 millions d’Américains utilisent TikTok.

Pour apaiser les tensions, ByteDance s’entretient depuis plusieurs mois avec le Comité pour les investissements étrangers aux États-Unis, chargé de s’assurer que les entreprises étrangères opérant aux États-Unis ne représentent pas de danger. Malgré ses efforts, un projet de loi bipartisan pour l’interdiction de TikTok dans le pays a été présenté au Congrès le 13 décembre. Dans la foulée, le Sénat a approuvé un autre texte pour bannir l’application de tous les appareils gouvernementaux.

L’affaire inquiète également les régulateurs du monde entier. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, a souligné sur Twitter qu’il « attend de TikTok des explications claires et des engagements irrévocables ». Il avertit que « la France et l’Europe ne transigeront jamais sur la liberté de la presse ».