Dans son projet de budget pour 2023, la première ministre Giorgia Meloni a proposé de donner aux commerçants italiens le droit de refuser les paiements numériques. Avec cette proposition, la nouvelle dirigeante du pays s’attaque directement au pouvoir des banques.

Giorgia Meloni veut promouvoir l’argent liquide

Alors que la Banque de France annonce l’euro numérique pour 2027, les propriétaires italiens de petites entreprises pourraient bientôt ne plus avoir à accepter des paiements numériques de faible valeur, si la nouvelle loi italienne est adoptée. En Italie, si le nouveau gouvernement de coalition de droite parvient à ses fins, l’ère des paiements numériques pourrait bien connaître un coup d’arrêt. Giorgia Meloni, qui est à la tête du parti d’extrême droite Fratelli, voit les paiements numériques comme un « cadeau illégitime fait aux banques et une taxe cachée sur les petites entreprises et les foyers ».

Elle a fait de grandes promesses sur ce sujet : le gouvernement a l’intention d’augmenter le plafond des transactions légales en espèces de 1 000 à 5 000 euros. Giorgia Meloni a déclaré qu’il n’était plus « tolérable de faire peser sur l’économie une taxe cachée, dans le but d’engraisser les banques, d’espionner le comportement des consommateurs et de faire de l’argent facile ». De nombreuses entreprises ont salué cette initiative. Si Meloni entend s’opposer au passage de l’Italie à l’ère des paiements numériques, de son côté Bruxelles pourrait s’opposer à ce projet de loi.

En effet, la Commission européenne a conseillé à Rome de promouvoir l’utilisation des paiements numériques dans le cadre de son plan de relance de 200 milliards d’euros. En Italie, de nombreux économistes, analystes et politiciens de l’opposition ont exprimé leur consternation face à ce que beaucoup considèrent comme « un retour en arrière ». Certains estiment que « c’est une erreur qui va accroître l’évasion fiscale ». Carlo Calenda, leader du parti centriste Azione, a déclaré que si les petites entreprises étaient autorisées à refuser les paiements numériques, cela leur permettrait d’éviter de payer des impôts.

Valeria Portale, directrice de l’Observatoire des paiements innovants à l’école de gestion du Politecnico di Milano, s’est dite surprise par ces projets et déclare ne pas comprendre « comment il est possible d’encourager les paiements en espèces en 2022 ». C’est un problème qui ne concerne pas seulement l’évasion fiscale. Les paiements numériques permettent aussi de développer de nouveaux services modernes. C’est une voie vers la modernité mais l’Italie est l’un des pays d’Europe qui adopte le moins les paiements numériques.

Le consommateur italien moyen utilise sa carte bancaire pour 85 transactions par an, alors que la moyenne de l’Union européenne est de 155. Par ailleurs, le montant de la transaction moyenne en Italie est de 47,50 euros en carte bancaire, l’une des plus élevées d’Europe. Ce qui reflète une tendance à utiliser de l’argent liquide pour les petits achats.