C’est par le biais d’un décret fédéral, pris ce jeudi 15 septembre, que le président américain Joe Biden a franchi une nouvelle étape dans la guerre commerciale à laquelle se livrent Chine et États-Unis.

Un comité gouvernemental dédié au contrôle des investissements étrangers a ainsi vu ses prérogatives étendues. Le Committee on Foreign Investment in the United States (CFIUS) devra désormais porter une attention particulière sur les transactions étrangères impliquant des données personnelles et des technologies avancées. Le décret souhaite notamment que le CFIUS mette l’accent sur la sécurité des chaînes d’approvisionnement logistiques, en prévenant la prise de contrôle de capacités de production, de ressources naturelles ou de technologies par une entité étrangère.

« En mettant en évidence et en renforçant l’attention portée par le comité à ces risques évolutifs et émergents, le décret contribuera à guider le comité et devrait également aider les entreprises et les investisseurs à mieux identifier rapidement les risques pour la sécurité nationale », a déclaré un haut responsable de l’administration lors d’un point presse.

Un décret dans la droite ligne de la stratégie de l’administration Biden sur la protection des intérêts nationaux

Depuis sa prise de fonction, le président Biden n’a de cesse de prendre des mesures pour la protection des intérêts nationaux. Celles-ci trouvent plus particulièrement un champ d’application privilégié dans la sécurité et la technologie. En plus de majoritairement cibler la Chine. Un an et demi de mandat plus tard, et la guerre économique et commerciale que se livrent les deux superpuissances est à peine déguisée.

Pour empêcher la Chine de dominer le secteur technologique mondial, l’administration traçait dès ses débuts son fil rouge : alliances multiples et focus sur les semi-conducteurs. Pour les alliances, au-delà d’une coopération renforcée avec l’UE, cela s’est aussi traduit par des frictions ponctuelles. L’année dernière, la Chine s’agaçait notamment de voir le géant taïwanais TSMC accepter de partager ses données clients avec l’administration Biden.

Des mains tendues d’un côté, des portes fermées de l’autre. Sur le territoire américain, c’est la protection des intérêts nationaux qui est mise en avant. L’année dernière déjà, un décret était signé pour interdire les investissements américains dans les technologies de surveillance chinoises. Un fonds d’investissement chinois s’est également vu bloqué dans sa tentative de rachat d’une entreprise de semi-conducteurs.

Un an plus tard, au mois d’août dernier, Joe Biden ratifiait le Chips and Science Act. Objectif : rapatrier la production de semi-conducteurs sur le sol américain, réduire la dépendance envers les importations de l’étranger, et concurrencer la technologie de la Chine. Un acte fort, que commentait la secrétaire au Commerce, Gina Raimondo, en avançant que c’était là « une occasion unique en son genre, de garantir notre sécurité nationale ».

Le CFIUS en garde-fou contre les investissements étrangers venus de Chine

Pour protéger ses intérêts technologiques nationaux, les États-Unis ont à disposition une batterie d’entités. La plus proéminente d’entre elles est sans doute le CFIUS, directement citée par le dernier décret signé par Biden. Créé en 1975, le comité, supervisé par le Trésor américain, est chargé d’examiner les implications sur la sécurité nationale de rachats ou investissements étrangers. En 2018, le congrès américain allait même étendre son autorité. La cible : les transactions et investissements minoritaires venant de l’étranger via des fonds de capital-risque, une tactique identifiée par certains responsables comme empreinte venue de Chine.

En 2021, les entreprises chinoises se classaient au second, derrière les entreprises japonaises, pour le nombre d’investigations lancées par le CFIUS, d’après le Trésor américain. La Chine dans le collimateur du CFIUS, une tendance qui devrait s’accentuer comme l’explique le cabinet d’avocat de New York White & Case, avançant que « même s’il n’y a pas eu d’augmentation notable de l’ensemble des [investissements directs étrangers] chinois aux États-Unis […] un plus grand nombre d’investisseurs chinois pourraient être enclins à notifier leurs transactions, compte tenu des sensibilités connues du CFIUS à l’égard de la Chine et de la procédure plus agressive de non-notification, qui rend généralement plus probable une demande d’intervention. »