Ce lundi 12 septembre 2022, l’ex-patron de Google, Éric Shmidt a ponctué une visite de 36 heures en Ukraine par une conférence de presse. Auprès de l’AFP, il a mis en avant l’efficacité ukrainienne dans la maîtrise et le déploiement des technologies de l’information depuis le début de la guerre, facteur clé selon lui de la protection des intérêts du pays face à l’invasion russe. Il insiste tout particulièrement sur la protection des données et la sécurité du partage d’information.

La protection des données via le cloud et le réseau Starlink de Musk

Retour en arrière, nous sommes le 24 février, au début de l’invasion russe en territoire ukrainien. Plusieurs fois pointée du doigt pour des tentatives de déstabilisation via le cyberespace avant le déclenchement du conflit, la Russie a accompagné son intervention militaire par plusieurs cyberattaques massives.

Pour se protéger des attaques de hackers russes, le gouvernement ukrainien réagit rapidement, « en un jour, ils ont tenu une réunion du parlement et ont changé une loi […] ils ont déplacé toutes leurs données des serveurs du gouvernement à Kiev vers le cloud », a déclaré Schmidt. « La guerre a donné à tout le monde une excuse politique pour faire ce qu’il fallait », a-t-il ajouté. Un transfert des données sensibles qui s’est par la suite accéléré, celles-ci étant envoyées en Pologne notamment, alors que des discussions avec les France étaient par ailleurs en cours.

Plusieurs géants de la tech se mobilisent rapidement en soutien à l’Ukraine. Au premier rang, Elon Musk et son réseau de satellites Starlink, en réponse à un tweet du Vice-premier ministre de l’Ukraine, Mykhailo Fedorov. Quelques jours plus tard, des photos émergeaient sur les réseaux sociaux, échantillons de livraison des quelque 20 000 paraboles Starlink.

Un accès sécurisé au réseau Starlink jugé critique par Éric Shmidt, « Elon Musk est un héros pour ça. Cela a permis de faire échouer la stratégie du camp d’en face de faire tomber le réseau Internet ». Préserver le réseau des télécommunications opérationnel pour l’appareil militaire comme pour la population a été un atout technologique de premier ordre pour résister aux vagues de cyberattaques russes et maintenir les échanges entre les unités.

Des applications de partage d’information au secours de l’Ukraine

Côté organes étatiques ukrainiens, on s’organise et s’appuie sur une coopération internationale pour se prémunir contre les déstabilisations russes. Côté population, l’entraide technologique passe par des applications, principalement autour du partage d’information de terrain. La première application, Diia, déjà très populaire, développait une fonctionnalité “E-Enemy”. Diia était à la base une application d’accès à des services du gouvernement. Avec “E-Enemy”, la population ukrainienne peut désormais effectuer – de façon sécurisée – différents types de déclarations : dommages matériels suite à bombardements, troupes russes aperçues sur le terrain… Une collecte d’intelligence terrain totalement décentralisée qui a permis à l’appareil militaire de tracer la progression russe. Le pays a aussi habilement utilisé les techniques de biométrie et de reconnaissance faciale pour identifier les troupes russes impliquées dans des atrocités, comme le massacre de Bucha au début de la guerre.

L’autre service en vogue depuis le début du conflit, c’est Threema, messagerie instantanée cryptée. L’ex-patron de Google détaille comment l’application a été mise à profit, « L’organe militaire recevait des milliers de rapports terrain chaque jour, remonté par la population. Ils les réduisaient à des cibles en utilisant des programmes d’intelligence artificielle et le renseignement humain et finissaient par les traquer », a-t-il expliqué. « Si l’on y réfléchit, voici ce qu’ils avaient : un Internet qui restait ouvert, des données gouvernementales protégées et un moyen pour les citoyens de leur fournir des informations », résume-t-il.