Selon le département de la Justice, Google dépense plusieurs milliards de dollars auprès d’autres géants de la tech pour être le moteur de recherche préférentiel sur les appareils électroniques, ce qui empêche ses concurrents de se développer.

Un procès antitrust d’une importance capitale pour les régulateurs

Menée par le département de la Justice, la plainte à l’encontre de Google pourrait mener au plus grand procès antitrust du XXIe siècle. L’affaire porte sur Google Search, le moteur de recherche de l’entreprise, et sur le monopole colossal exercé par celui-ci. Selon les autorités américaines, le géant du Web a mis en place différentes stratégies et a eu recours à des pratiques anticoncurrentielles afin de dominer le secteur des moteurs de recherche et d’empêcher l’émergence de rivaux.

« Le Google d’aujourd’hui est un gardien de son monopole sur Internet, et l’une des entreprises les plus riches de la planète, Google a utilisé des tactiques anticoncurrentielles pour maintenir et étendre ses monopoles sur les marchés des services de recherche, de la publicité pour la recherche et de la publicité textuelle pour la recherche, les pierres angulaires de son empire », expliquaient-elles, en 2020, dans leur document de plainte.

Ce jeudi 8 septembre, les deux parties se sont opposées lors d’une audience capitale pour la suite de l’affaire, puisque celle-ci permet d’avoir un aperçu des arguments qui seront avancés lors du procès qui se tiendra en 2023.

Les mécanismes de Google pour maintenir son monopole

Le département de la Justice a expliqué comment Google a établi des contrats exorbitants avec des entreprises afin de mettre fin à toute concurrence potentielle, faisant de Search la principale porte d’entrée donnant accès à Internet aux utilisateurs. Si aucun chiffre précis n’a été annoncé, le mot « milliards » a quant à lui été évoqué, rapporte Bloomberg.

Les mécanismes de Google Search seraient parfaitement ficelés. Par exemple, pour maintenir sa présence sur les téléphones mobiles, Google passerait des contrats avec Apple, les fabricants de smartphones tels que Samsung et Motorola, la plupart des navigateurs et les trois opérateurs de télécommunications américains, AT&T, Verizon et T-Mobile, pour s’assurer que son moteur de recherche est défini par défaut et est préinstallé sur les nouveaux téléphones.

Le moteur de recherche Google sur un iPhone.

Google établit de très importants contrats avec les marques de smartphone pour être le moteur de recherche par défaut sur ces derniers. Photographie : Solen Feyissa / Unsplash

« Google investit des milliards dans les solutions par défaut, en sachant que les gens ne les changeront pas. Ils achètent l’exclusivité par défaut parce que les défauts de paiement ont une grande importance », a déclaré l’avocat Kenneth Dintzer. Par ailleurs, le DoJ assure que Google a recours à des pratiques anticoncurrentielles au sein même de son moteur de recherche afin de mettre en avant les résultats de ses propres sociétés.

Ainsi, la firme réduirait injustement le trafic vers des sites tels que Kayak, Booking.com et Yelp en remplissant les pages de recherche de boîtes de réponse et de résultats sponsorisés par Google, ce qui a pour effet de repousser les résultats de recherche de ces sites vers le bas de la page, où les utilisateurs ne sont pas susceptibles de les faire défiler.

Google affirme que les régulateurs ont une faible connaissance du marché

John Schmidtlein, l’avocat de Google, a expliqué que le DoJ, ainsi que les autres pays enquêtant sur les pratiques anticoncurrentielles de l’entreprise, n’avaient pas une bonne connaissance du marché et se concentraient bien trop sur les petits moteurs de recherche rivaux comme Bing de Microsoft et DuckDuckGo. Il a affirmé que la concurrence de Google venait des autres géants de la tech, comme Meta, TikTok ou encore Amazon.

« Vous n’avez pas besoin d’aller sur Google pour faire des achats sur Amazon. Vous n’êtes pas obligé d’aller sur Google pour acheter des billets d’avion sur Expedia. Le fait que Google ne soit pas confrontée à la même concurrence sur chaque requête ne signifie pas que l’entreprise ne doit pas faire face à une concurrence acharnée », a-t-il déclaré. Il a également rappelé que les utilisateurs étaient capables de modifier par eux-mêmes un paramètre par défaut, et que les contrats établis avec d’autres sociétés étaient également basés sur le mérite : en voyant le succès de Google, les entreprises souhaitent collaborer avec elle.

Ces différents arguments montrent le ton et laissent entrevoir la substance du futur procès, durant lequel Google risquera très gros si elle est reconnue coupable.