Le projet de la SNCF partait d’une bonne intention. Initialement, SNCF Connect avait pour objectif de simplifier la vie des 11 millions d’usagers en regroupant sur une seule plateforme toutes les solutions de mobilité. Capital révèle comment cette application à 50 millions d’euros s’est transformée en « coûteux fiasco ».

Comment SNCF Connect a réussi ce loupé magistral ?

Avec SNCF Connect, l’entreprise ferroviaire publique française a voulu remplacer OUI.sncf, la billetterie longue distance qui existait depuis de nombreuses années. L’idée était de regrouper toutes les solutions du groupe, sur une seule plateforme. Avec SNCF Connect, l’objectif est de permettre aux usagers d’acheter des billets de train, de métro, de bus, et même de réserver des vélos partagés. L’application a été développée en interne : 300 personnes ont été mobilisées pendant un an.

Pourtant, quelques mois après son lancement, SNCF Connect fait face à un échec de taille. Depuis le 25 janvier date du lancement officiel de cette nouvelle plateforme, l’entreprise ferroviaire doit essuyer les plâtres. Parmi les critiques faites à l’application, il y a notamment l’impossibilité de retrouver ses billets électroniques, le refus des portiques de s’ouvrir lors de la présentation du smartphone, ou encore la difficulté à lire les informations sur le mode sombre.

Les investissements consacrés aux technologies se sont élevés à 21 millions d’euros, dont 12,6 millions pour le site et l’application. Pour absorber des pics de connexion très hauts, l’équipe a décidé de migrer le stockage sur Amazon Web Services pour 7,5 millions d’euros. Impossible de savoir si l’État, promoteur du cloud français et d’une stratégie nationale sur le sujet, a été consulté. Par la suite, le démantèlement des deux centres de données équipés de 7 000 serveurs devenus alors inutiles, aura coûté 2,3 millions d’euros. BFM évoque également la rupture d’un contrat avec Expedia, laissant une note de 12,3 millions d’euros.

Cette partie du budget destinée aux infrastructures, la SNCF, contactée par BFM, ne l’impute pas au coût total de SNCF Connect. « La migration vers le cloud d’Amazon, le démantèlement et la fin de contrat avec Expedia sont des projets qui étaient engagés avant la création de l’application. On peut y voir une proximité, mais il y a un amalgame dans l’addition totale » affirme la société. Ainsi, 26 millions d’euros serait le coût réel de ce nouveau service. De quoi rassurer qui voudra l’être.

Un manque de transparence ?

Avant de voir le jour, l’application SNCF Connect a pourtant été testée par 4 000 agents de terrain de la SNCF. Dans les premières semaines après le lancement, la SNCF a dû faire face à 10 000 réclamations. Une source interne a même déclaré à Capital que « nous étions face à un scénario catastrophe que nous n’avions pas anticipé ». Pour promouvoir SNCF Connect, l’équipe avait prévu un budget marketing de 5 millions d’euros (spot TV, affichage, publicité sur le web). Rien de tout cela n’a vu le jour.

La directrice générale de SNCF Connect, Anne Pruvot, a commandé un audit pour comprendre les raisons d’un tel résultat. Dans son article, Capital précise que ce projet a été mené dans le secret jusqu’à sa sortie officielle. Les intervenants devaient même signer des accords de confidentialité très stricts. Une approche très éloignée des usages habituels dans le monde du numérique où les échanges entre les développeurs et les futurs utilisateurs sont censés être très fréquents.