Alors que Tencent, géant chinois du divertissement, se heurte aux mesures répressives de Pékin et à une concurrence agressive dans le secteur du jeu vidéo, l’entreprise cherche à élargir ses horizons. D’après des sources proches de la firme, interrogées par Reuters ce 4 août, Tencent envisagerait de renforcer sa prise de position dans l’éditeur français Ubisoft. Si l’affaire se conclut, l’entreprise chinoise deviendrait l’actionnaire majoritaire de la société, surpassant les parts de la famille Guillemot, fondatrice d’Ubisoft.

Tencent veut vendre ses jeux à l’international

Même si Tencent reste le leader mondial du jeu vidéo, la tendance commence à s’inverser malgré des titres parmi les plus joués dans le monde comme PUBG: Battlegrounds ou Dungeon Fighter Online. Au premier trimestre 2022, la firme a connu sa première baisse de revenus locaux de 1 % dans le jeu vidéo, alors que son chiffre d’affaires au niveau mondial a grimpé de 4 %. Engagé dans une politique restrictive, Pékin n’a pas autorisé Tencent à publier de nouveaux titres dans l’Empire du Milieu depuis juin 2021. Une situation qui permet à la concurrence de se renforcer, poussant Tencent à regarder ailleurs.

Depuis 2018, Tencent possède 5 % du capital d’Ubisoft. Des sources proches de l’entreprise ont affirmé que le géant a entamé des négociations avec l’éditeur français pour augmenter ses parts dans l’entreprise. Dans cette optique, des cadres supérieurs de la firme auraient rencontré en mai dernier la famille Guillemot, qui possède 15 % d’Ubisoft, pour discuter de ce projet.

Tencent serait prêt à offrir jusqu’à 100 euros par action pour acquérir des parts supplémentaires, alors qu’elle avait payé 66 euros lors de sa prise de position en 2018 et que l’action coûte aujourd’hui 44 euros. Ce prix extrêmement agressif a pour but d’assurer à Tencent de ne pas être devancé. Une des sources interrogées par Reuters affirme que « Tencent est déterminé à conclure l’accord, car Ubisoft est un atout important pour Tencent ».

Ubisoft prêt à céder son indépendance ?

Ubisoft a longtemps lutté pour son indépendance éditoriale et créative. En 2018, l’éditeur avait réussi à se séparer de Vivendi qui avait vendu les 27,27 % de parts que le groupe possédait dans Ubisoft. Depuis, la famille Guillemot est restée l’actionnaire majoritaire. Si Ubisoft accepte l’offre de Tencent, il s’agira d’un véritable basculement dans la stratégie de la société française.

Ce changement pourrait être lié aux difficultés opérationnelles que rencontrerait actuellement l’éditeur de jeux vidéo. Il a récemment décalé la sortie de plusieurs titres comme Avatar: Fontiers of Pandora ainsi que le prochain Assassin’s Creed. Il a aussi pris la décision radicale d’annuler quatre projets en cours, dont Splinter Cell VR et Ghost Recon Frontline.

Ce n’est pas la première fois que Tencent s’intéresse à un éditeur étranger. La firme chinoise a déjà une participation importante dans le développeur américain Riot Games et dans le géant Epic Game. En 2016, elle avait acquis des parts majoritaires dans Supercell, un des leaders des jeux sur mobile, pour 8,6 milliards de dollars. L’entreprise s’engage également dans des collaborations avec des acteurs occidentaux, comme avec l’annonce d’une nouvelle console portable.