Qu’ont en commun Apple et Manchester United ? Ces marques mondialement connues ont créé leurs propres cartes bancaires sans lien original avec le secteur financier. Cette facilité à émettre des cartes est permise par le modèle « Card-as-a service » (CaaS) déployé par les Fintech…

Un système dépoussiéré par les Fintech

Initialement, le concept de cartes de crédit en « marque blanche » repose sur un partenariat entre une banque et des entreprises majeures telles que les compagnies aériennes. Ces cartes étant développées et supervisées par des banques traditionnelles (Mastercard.…). Cependant, chaque fois qu’une compagnie aérienne souhaite émettre une nouvelle carte avec un nouveau système de fidélité, les conditions doivent être renégociées avec les banques émettrices. Il faut repartir de zéro. Un processus qui peut prendre plusieurs mois contre désormais quelques semaines avec les CaaS.

Comment est-ce possible ? Les fournisseurs de CaaS offrent des solutions globales et clé en main pour les entreprises, en industrialisant l’ensemble du processus d’émission de cartes tel que les banques, processeurs de paiement, vérification d’identité, conformité, service client, gestion des risques… Jusqu’à la livraison de la carte physique ou virtuelle. À l’aide d’API ouvertes, les entreprises personnalisent leurs propres programmes de cartes pour tester de nouveaux modèles commerciaux et accroître la notoriété de leur marque. Ainsi, les délais de mise sur le marché des cartes fondent comme neige au soleil.

L’exemple d’Enfuce

Enfuce, La fintech finlandaise aux plus de 16 millions d’utilisateurs de cartes actifs, permet aux entreprises, via des API, d’émettre leur propre carte en 8 semaines seulement : cartes de débit, cartes prépayées, cartes-cadeaux, carte de crédit à la consommation… Le tout en intégrant des fonctionnalités pilotées par une app en marque blanche : Buy Now Pay Later (BNPL), multi-devise, blocage géographique, code PIN, perte de carte et intégration aux portefeuilles numériques. Enfuce vient de créer une nouvelle plate-forme permettant aux clients de gérer les opérations de back-office avec un reporting en temps réel sur les comportements d’achat de leurs clients. De son côté, la Fintech Intergiro permet d’émettre des cartes virtuelles et physiques en marque blanche et de tokéniser Applepay & Googlepay avec des cartes à « jeton » pour les paiements mobiles.

Un monde de « facilitateurs »

Créée en 2010 aux États-Unis, Marqeta, qui fonctionne en API ouverte, a permis notamment à Uber et Coinbase d’émettre leurs propres cartes. Sa plateforme émet des cartes physiques et virtuelles avec la possibilité d’activer ou de désactiver des paramètres (taux annuels en pourcentage…). Récemment, ce concepteur de carte « à la carte » a conclu un partenariat avec Klarna, l’acteur du paiement différé, pour créer la Klarna card : « Pay in 4 ». Marqeta se positionne au milieu des Fintech, des fournisseurs de cartes tels que Visa, Mastercard, Pulse et des banques émettrices. Outre son API ouverte, cette plateforme fonctionne avec un environnement Sandbox pour les tests. Le principal concurrent de Marqeta, qui fonctionne sur un modèle proche, est Galileo Financial Services (propriété du géant Fintech SoFi), à l’origine des programmes de cartes de Revolut et Robinhood. Parmi les concurrents, figure aussi Stripe, le géant mondial des paiements. D’autres facilitateurs se sont spécialisés sur certaines « verticales » : Cardless pour les équipes sportives (Manchester United, Boston Celtics…) ou encore Nudge pour les influenceurs…

De nouveaux usages

L’ouverture du marché à la concurrence permet une toute nouvelle génération de cartes de crédit. Par exemple, un titulaire de carte peut être intéressé par la crypto de sorte que sa carte lui permette de lier chaque dépense à un investissement de portefeuille crypto. De la même façon, une carte de crédit créée par une application de santé et de bien-être pourrait mettre en place un système de récompenses en argent qui est activé lorsque le titulaire de la carte atteint des objectifs de remise en forme hebdomadaires sur son appareil portable. Les options sont pratiquement illimitées.

La résistance des acteurs historiques

Il existe des acteurs financiers « historiques » qui prennent les devants. C’est le cas de Goldman Sachs à l’origine du succès de l’Apple Card. La célèbre banque a développé une interface de programmation d’application avancée pour ce produit et chercherait à reproduire le modèle de carte Apple avec d’autres sociétés partenaires. Cela faisant, Apple pourrait être tenté de lancer un jour sa propre carte bancaire en misant uniquement sur ses propres compétences oui en procédant par croissance externe. En effet, Apple a racheté les startups Credit Kudos et Mobeewave qui permettraient à l’entreprise de transformer les iPhone en terminaux de paiement. Plus récemment, la firme à la pomme a lancé son service « Buy Now, Pay Later » qui fonctionnera à l’aide du réseau de Mastercard et sera intégré au portefeuille Apple.

Le paysage bancaire et celui des cartes n’ont donc pas fini d’être bouleversé. À suivre…