L’Union européenne vient de passer un accord avec plusieurs géants technologiques pour établir un code de conduite visant à combattre la désinformation. Il sera encadré par le Digital Services Act, dont l’entrée en vigueur ne devrait plus tarder.

44 lignes de conduite

Ce code a notamment été motivé par la situation mondiale et le rôle de plus en plus dangereux que prend la désinformation dans le monde. Utilisée par la Russie en tant que propagande, elle a également été impliquée dans l’élection de Donald Trump et a eu de graves conséquences durant la pandémie de Covid-19. « Ce nouveau code anti-désinformation intervient à un moment où la Russie utilise la désinformation comme une arme dans le cadre de son agression militaire contre l’Ukraine, mais aussi où nous assistons plus largement à des attaques contre la démocratie », a déclaré la vice-présidente de la Commission pour les valeurs et la transparence, Věra Jourová, dans un communiqué de presse.

Ce code est en fait une mise à jour du Code de pratique sur la désinformation de 2018. De nombreuses lignes de conduite y ont toutefois été ajoutées ; par exemple, les entreprises signataires devront démonétiser les sites de désinformation en supprimant leurs revenus publicitaires, réduire le nombre de bots et de faux comptes utilisés pour diffuser de fausses informations ou encore collaborer étroitement avec des vérificateurs de faits indépendants pour vérifier les sources d’information. Les signataires devront aussi lutter contre la prolifération de deepfakes et l’usurpation d’identité, précise Le Monde.

En outre, les utilisateurs devront avoir accès à des outils plus évidents pour signaler la désinformation et accéder aux « sources d’autorité ». « Les plateformes ne devraient plus recevoir un seul euro issu de la diffusion de la désinformation », a souligné Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur. Si les contenus faux ne seront pas forcément supprimés, ceux qui les diffusent ne pourront donc plus profiter financièrement de leur mise en ligne.

Un ordinateur ouvert sur de fausses informations.

Depuis l’élection présidentielle de 2016, la désinformation a de graves conséquences dans le monde. Photographie : Pixabay

Les géants de la tech américain presque tous au rendez-vous

Les plateformes qui se sont portées volontaires pour se conformer au nouveau code devront soumettre un premier rapport expliquant comment elles l’ont mis en œuvre au début de l’année prochaine. Parmi elles, on retrouve les géants Meta, Microsoft, Google, TikTok, Twitch ou encore Twitter, des entreprises qui, depuis la pandémie, ont multiplié les efforts pour lutter contre la désinformation, parfois en vain.

« La lutte contre la diffusion de fausses informations est un problème de société complexe et en constante évolution. Nous continuons à investir massivement dans les équipes et la technologie, et nous attendons avec impatience une collaboration accrue pour y faire face ensemble », a tweeté Nick Clegg, président des affaires mondiales de Meta.

Un porte-parole de Twitter a également affirmé que l’entreprise accueillait favorablement la mise à jour du code : « À travers et au-delà du code, Twitter reste engagé à s’attaquer à la désinformation et à la désinformation, alors que nous continuons à évaluer et à faire évoluer notre approche dans cet environnement en constante évolution ». Google et TikTok ont eux aussi réagi favorablement à la signature de ce nouveau code de conduite.

Parmi les signataires, on relève toutefois un absent et pas des moindres, Apple. Pourtant, la marque à la pomme dispose d’une activité publicitaire florissante. Telegram est également manquante, alors que la messagerie est utilisée pour diffuser de la propagande dans le contexte du conflit entre l’Ukraine et la Russie, rapporte The Verge.

Désinformation, concurrence… L’UE veut être pionnière

Si adhérer au code de 2018 était une démarche bénévole, celui qui vient d’être établi sera encadré par le Digital Services Act (DSA) : « Pour être crédible, le nouveau Code de pratique sera soutenu par le DSA – y compris pour des sanctions lourdes et dissuasives. Les très grandes plateformes (Ndlr : qui ont plus de 45 millions d’utilisateurs au sein de l’UE) qui enfreignent le Code à plusieurs reprises et qui n’appliquent pas correctement les mesures d’atténuation des risques risquent des amendes pouvant aller jusqu’à 6 % de leur chiffre d’affaires mondial », a déclaré Thierry Breton.

Le DSA définit de nouvelles règles pour le retrait des contenus illégaux. Il exigera également des plus grandes plateformes qu’elles procèdent à des évaluations de risques sur les contenus que les régulateurs considèrent comme potentiellement dangereux. « Nous disposons désormais d’engagements très importants pour réduire l’impact de la désinformation en ligne et d’outils beaucoup plus robustes pour mesurer la façon dont ils sont mis en œuvre dans l’ensemble de l’UE, dans tous les pays et dans toutes ses langues », a déclaré Věra Jourová.

Avec ce nouveau code de conduite, l’Union européenne se positionne en tant que pionnière dans la lutte contre les contenus dangereux et, plus globalement, dans la régulation des géants technologiques. D’ailleurs, son autre loi majeure, le Digital Markets Act, vise à combattre le monopole exercé par les big tech en Europe.