Les systèmes de conduite autonome introduits dans les véhicules du quotidien représentent l’une des avancées majeures du secteur de l’automobile. Si les constructeurs automobiles vantent la sécurité de leurs pilotes automatiques, de nombreuses interrogations demeurent quant à la fiabilité de ces dispositifs. Dans une enquête, le New York Times s’intéresse à la réelle sûreté de l’Autopilot de Tesla aux États-Unis.

La mortalité est haute sur les routes américaines

Tesla, General Motors, Ford… Les entreprises de l’industrie de l’automobile sont nombreuses à équiper leurs véhicules d’une technologie de conduite assistée de niveau 2, c’est-à-dire qui permet d’aider le conducteur à accélérer, à se diriger et à freiner. La société dirigée par Elon Musk a intégré son système de conduite autonome, l’Autopilot, dans ses voitures en 2015, suivi par le Super Cruise de General Motors en 2017 et, plus récemment, du BlueCruise de Ford Motor en 2021.

Les géants de la technologie et des transports sont connus pour ajouter de nombreuses fonctionnalités dans l’habitacle qui, selon leurs dires, renforcent la sécurité des passagers. Pour autant, plusieurs autorités américaines indiquent qu’il est difficile de vérifier leurs affirmations. La National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA), une agence fédérale chargée de la sécurité routière, a révélé fin mai que le nombre de décès dus à des accidents de la route aux États-Unis a atteint son plus haut niveau depuis 16 ans l’année dernière.

« Nous faisons face à une crise sur les routes américaines que nous devons résoudre ensemble », alerte Pete Buttigieg, secrétaire aux Transports des États-Unis. L’année dernière, 42 915 personnes sont mortes dans un véhicule motorisé sur le territoire américain, soit une hausse de 10,5 % par rapport à 2020. En comparaison, 2 947 personnes ont perdu la vie sur les routes de France en 2021.

Aux États-Unis, les institutions demandent aux constructeurs automobiles qui équipent leurs véhicules d’un système de conduite autonome de se montrer transparent sur les accidents qui impliquent leurs modèles. L’année dernière, la NHTSA a ordonné aux entreprises du secteur de remonter ce genre d’événements dans la journée suivant la découverte. L’agence est censée publier un rapport incluant toutes les données récoltées auprès des acteurs du milieu. Celui-ci n’a pas encore été diffusé.

Tesla veut montrer que son pilote automatique est sûr

Si ces chiffres sont censés alarmer, pour Tesla, les véhicules munis de l’Autopilot sont plus sûrs que des voitures classiques. Pour le prouver, depuis octobre 2018, l’entreprise recense sur son site un bilan trimestriel rapportant le nombre de kilomètres parcourus entre deux accidents lorsque les conducteurs utilisent le système d’aide à la conduite et lorsqu’ils ne l’utilisent pas.

Au cours du dernier trimestre 2021, dernier rapport en date, Tesla signalait un accident tous les 7 millions de kilomètres lorsque l’Autopilot est activé contre 2,5 millions de kilomètres parcourus avant un accident lorsque le système de conduite autonome est éteint. Des données bien plus rassurantes que les chiffres de la NHTSA. L’agence fédérale rapportait un accident tous les 779 000 kilomètres lors de sa dernière enquête.

Cependant, ces données ne sont pas comparables. Noah Goodall, chercheur au Conseil des Transports de l’État de Virginie, a déclaré au New York Times que « nous savons que les voitures utilisant l’Autopilot sont moins impliquées dans des accidents que lorsque l’Autopilot est éteint. Mais sont-elles conduites de la même façon, sur les mêmes routes, au même moment de la journée et par les mêmes conducteurs ? ». Les nombres fournis par Tesla sont trompeurs. L’Autopilot serait principalement utilisé lors de trajets d’autoroutes considérées, par une étude menée par le Conseil des Transports de Virginie, comme deux fois plus sûrs que de conduire en ville.

L’inquiétude des experts en sécurité

Ce qui inquiète particulièrement les experts de la sécurité américaine, ce sont les arguments utilisés pour vendre ces véhicules équipés de pilotes automatiques. Pendant des années, Elon Musk a annoncé que les Tesla étaient à deux doigts d’être entièrement autonomes, ce qui est faux. À l’heure actuelle, les voitures produites par le milliardaire requièrent une surveillance permanente de la part du conducteur.

De fausses allégations comme celles tenues par le directeur général de Tesla peuvent mener à une baisse de la vigilance chez les conducteurs. Les pilotes automatiques ont déjà été au cœur de plusieurs tragédies mortelles dans lesquelles la personne derrière le volant n’était pas préparée à reprendre le contrôle du véhicule. C’est la cause du premier décès aux États-Unis impliquant un véhicule autonome d’Uber en 2017. Une piétonne avait été renversée de nuit alors que la conductrice de sécurité, censée veiller au bon déroulement du trajet, regardait un épisode de The Voice sur son smartphone.

Qu’en est-il des véhicules entièrement autonomes ?

Certaines entreprises proposent déjà des véhicules totalement autonomes, notamment dans le cadre de services de transports. C’est le cas de Waymo, une filiale d’Alphabet, la maison mère de Google, et de Pony.ai, une start-up chinoise soutenue par Toyota. Les deux sociétés proposent des services de VTC dans certains quartiers de Phoenix aux États-Unis et de Guangzhou en Chine. Bien que ces courses soient effectuées par des voitures autonomes, un conducteur de sécurité est présent dans l’habitacle pour intervenir en cas de perte de contrôle.

Si Elon Musk insiste sur la sécurité du pilote automatique de Tesla, rien ne peut garantir la fiabilité totale de ces systèmes de conduite autonome. En août 2021, les autorités américaines avaient ouvert une enquête sur l’Autopilot à la suite d’une série d’accidents qui ont fait, d’après la NHTSA, au moins 17 blessés et deux morts. 765 000 véhicules Tesla sortis entre 2004 et 2021 sont concernés.