L’American Civil Liberties Union (ACLU) a célébré le 9 mai « une grande victoire » contre la reconnaissance faciale aux États-Unis. L’association du secteur a passé un accord avec le champion du secteur, Clearview AI, pour interdire la vente de sa base de données de 10 milliards de photos d’images à des entreprises privées. Les agences clientes de Clearview comme le FBI, l’immigration ou la douane, pourront toujours s’en servir.

Clearview, une mauvaise réputation de classe mondiale

Nathan Freed Wessler, directeur adjoint de l’ACLU Speech, Privacy, and Technology Project, s’est félicité que « Clearview ne peut plus traiter les identifiants biométriques uniques des personnes comme une source illimitée de profit ».

Clearview est l’un des concepteurs de logiciel de reconnaissance faciale les plus connus et les plus controversés du secteur. L’entreprise a récupéré un nombre invraisemblable d’images de visage en siphonnant les photos libres d’accès de Facebook, Instagram ou LinkedIn.

Une pratique qui a suscité la colère des plateformes, mais pas que. La technologie de Clearview a été jugée illégale au Canada et en Australie. En novembre, le Royaume-Uni a infligé une amende de 21,3 millions d’euros pour avoir récupéré les images sans consentement. La Commission européenne enquête depuis plus d’un an sur l’entreprise et en décembre 2021 la CNIL a donné deux mois à Clearview pour cesser d’utiliser les images accessibles sur Internet.

Aux États-Unis, Clearview s’est adjoint les services de Floyd Abrams, un expert du 1er amendement, rapporte le New York Times. L’entreprise argue qu’il est de son droit d’utiliser des images librement consultables sur Internet.

Pour passer outre cette défense l’ACLU a engagé ces poursuites, en mai 2020, dans l’État de l’Illinois. Ce choix ne doit rien au hasard. En 2008 l’Illinois a adopté le Biometric Information Privacy Act, l’une des lois les plus strictes des États-Unis sur la confidentialité des données biométriques.

Floyd Abrams a déclaré que la société a accepté de passer un accord « pour éviter un litige prolongé, coûteux et distrayant ». Il a ajouté que la société était « heureuse de mettre ce litige derrière elle ».

Merci l’Illinoi !

Selon les termes de l’accord, Clearview s’engage à limiter l’accès de sa base de données non seulement aux entreprises privées de l’Illinois, mais aussi de l’ensemble des États-Unis. Elle s’engage également à mettre fin à l’une de ses pratiques commerciales les plus agressives, des essais gratuits à tout va. Ils devront désormais être mieux encadrés.

En Illinois, Clearview ne pourra plus vendre pendant 5 ans son produit aux services publics. Tout citoyen de l’État qui en fera la demande aura la possibilité de faire supprimer sa photographie des bases de données de l’entreprise. Cette dernière devra promouvoir cette démarche en dépensant 50 000 dollars de publicités.

Nathan Freed estime que « D’autres entreprises seraient bien avisées d’en prendre note, et d’autres États devraient suivre l’exemple de l’Illinois en promulguant des lois strictes sur la confidentialité des données biométriques ».

Hoan Ton-That, directeur général de Clearview AI, a affirmé, de son côté, qu’il n’était pas dans les plans de son entreprise de vendre sa base de données « à des entités autres que des agences gouvernementales pour le moment ».