Le gouvernement russe prend le contrôle des infrastructures Internet de l’Ukraine et redirige le trafic vers des opérateurs russes afin d’avoir accès aux données des utilisateurs ukrainiens et de pouvoir les censurer.

Des opérateurs Internet ukrainien détournés

La population de Kherson, une ville sous le contrôle de l’armée russe, se retrouvait connectée à Internet depuis la Crimée après une coupure de courant de plusieurs heures. C’est l’entreprise spécialisée dans la surveillance et la gouvernance d’Internet, NetBlocks, qui en fait la découverte le week-end dernier.

Le trafic de l’opérateur ukrainien Khersontelecom était redirigé vers le fournisseur Miranda, situé en Crimée, qui renvoyait ensuite vers Rostelecom, en Russie. « La connectivité sur le réseau a été conduite via l’Internet russe au lieu de l’infrastructure de télécommunication ukrainienne et est donc possiblement soumise à la réglementation, à la surveillance et à la censure de l’Internet russe », explique NetBlocks sur son site.

Trois des plus grands fournisseurs d’accès à Internet en Ukraine ont enregistré de sérieux dommages de leurs infrastructures. Cependant, les milliers de réseaux et l’abondante quantité de redondance qui composent l’Internet ukrainien l’ont rendu incroyablement résilient aux différentes attaques perpétrées par la Russie pendant ces deux mois.

La Russie veut contrôler l’entièreté d’Internet

L’objectif de Moscou derrière ces détournements d’infrastructures est d’établir un Internet souverain et centralisé sur lequel le Kremlin pourrait exercer sa censure en toute impunité.

« En Russie, le trafic Internet est régulé par les forces russes – elles collectent les données et recherchent les personnes qui soutiennent l’Ukraine afin de briser le mouvement de résistance », a déclaré Yurii Shchyhol, chef du service d’État de la communication spéciale et de la protection de l’information de l’Ukraine. « L’ennemi a parfaitement compris que sa mission était d’éliminer l’accès des Ukrainiens à leur propre Internet et ils savent comment s’y prendre depuis 2014. »

En 2014, au début de la guerre du Donbass, les réseaux de télécommunications avaient déjà été détournés afin de réacheminer les données du peuple ukrainien vers les groupes de séparatistes pro-russes soutenus par Moscou.

« Ces détournements font partie de la stratégie de « russification » des territoires occupés par l’armée russe », précise Alp Toker, directeur général de NetBlocks. « Sans aucun doute, ce n’est que le début. »