Pour faire face à la pénurie de semi-conducteurs qui agite le monde depuis 2020, les entreprises du secteur et notamment les leaders TSMC, Intel, Samsung, ont massivement investi dans des moyens de production supplémentaire. Problème, les fournisseurs des machines nécessaires craignent eux-mêmes de manquer de puces pour répondre à cette explosion de la demande. L’association professionnelle Semiconductor Equipment and Materials (SEMI) tire la sonnette d’alarme dans un billet de blog publié le 2 mai.
Trop de nouvelles usines, pas assez de fournisseurs pour les remplir
La pénurie de puces n’en finit plus. Les entreprises les plus optimistes, qui visaient sur un retour à l’équilibre entre l’offre et la demande courant 2022, n’y croient plus vraiment. Pat Gelsinger, le PDG d’Intel, l’un des trois plus grands fabricants de semi-conducteurs, a admis récemment qu’il ne voyait pas la situation s’améliorer avant 2024.
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Pour tenter de répondre à la pénurie mondiale de puces, la construction de nouvelles usines a explosé. Entre 2020 et 2024, 86 fabriques doivent sortir de terre et commencer à produire. Si ce chiffre peut sembler dérisoire, il est en réalité énorme.
Chaque usine coûte très facilement des dizaines et des dizaines de millions d’euros, pour les plus grandes l’unité de mesure est plutôt en milliards d’euros : la construction d’un méga-site de fabrication de pointe en Allemagne va coûter 17 milliards d’euros à Intel. Au Japon, TSMC projette de construire une usine pour environ 6 milliards d’euros.
Ces investissements ruissellent sur les fournisseurs de ces géants. La vente mondiale d’équipement pourrait dépasser les 100 milliards de dollars en 2022. Sanjay Malhotra, vice-président de SEMI, 25 ans d’expérience dans le secteur, a confié au Wall Street Journal, « Il y a cinq ou six ans, j’aurais dit que 75 milliards de dollars, c’était tiré par les cheveux ».
Naturellement, il n’y a pas que du positif dans cette course au semi-conducteur. Les fournisseurs ne sont pas toujours capables de suivre le rythme. Le délai moyen pour obtenir les machines nécessaires pour fabriquer les puces est passé de 3 à 6 mois en 2020 à 14 mois en juillet 2021. Dans certains cas spécifiques, la file d’attente dépasse les deux ans.
Et le serpent finit par se mordre la queue. Ajit Manocha, PDG de SEMI redoute que les fournisseurs soient eux-mêmes touchés par la pénurie de puces et ne puissent plus fournir les machines pour en fabriquer. Il demande expressément aux gouvernements et à l’industrie de « Garantir l’approvisionnement en puces nécessaires aux fournisseurs » pour pouvoir « construire les outils essentiels à la montée en puissance des nouvelles fabriques ».
À force de schéma il explique que ces fournisseurs, 1% du marché mondial, permettront d’améliorer considérablement l’approvisionnement en outils et donc de fabriquer plus de semi-conducteurs.
Puce, où es-tu ?
Un manque de puces s’ajouterait aux difficultés d’un secteur qui subit déjà des problèmes pour se fournir en produits chimiques, principalement produits en Ukraine et en Russie, une pénurie de substrats de silicium qui relie les puces aux circuits imprimés, une difficulté à embaucher…
En parallèle, la demande générale en semi-conducteur ne faiblit pas. Le pic d’achats d’ordinateur survenu à l’occasion de la crise sanitaire en 2020 est bien retombé, mais à un niveau toujours élevé. La multiplication des appareils électroniques connectés, des véhicules électriques, des systèmes d’automatisation industrielle maintient pour longtemps un fort besoin de puces.
Du côté des fournisseurs d’équipement, ASML Holding NV, une société néerlandaise, connue pour fabriquer parmi les outils les plus perfectionnés et les plus chers de la planète, tente de produire davantage, avec l’aide de ses clients. Elle ne s’attend pas pour autant à pouvoir le faire avant 2025…