À reculons, Netflix a dévoilé ses résultats du premier trimestre 2022 le 19 avril. Un chiffre concentre toutes les attentions, la perte de 200 000 abonnés par rapport à fin 2021. L’entreprise s’attend à perdre 2 millions d’abonnés au deuxième trimestre 2022. Le leader du streaming a déjà lancé plusieurs pistes pour enrayer cette chute.

Les raisons d’un cataclysme

2,5 millions d’abonnés en plus. Voilà à quoi s’attendait Netflix pour son premier trimestre 2022, les analystes, eux espéraient 2,7 millions de mieux. Cet objectif était déjà loin des 4 millions d’utilisateurs attiré par la plateforme un an plus tôt. Lors de la publication de cette projection en janvier, Techcrunch rapporte qu’elle était justifiée par la sortie tardive de contenus médiatisée comme les nouvelles saisons Bridgerton et Adam Project.

Ce sera finalement 200 000 abonnés de moins. Si le nombre apparaît faible, mis en lien avec les 221,6 millions de la plateforme la dynamique alerte. Sur les marchés prolongés après la clôture la valeur de Netflix a immédiatement chuté de 25%, soit une perte de valeur de 30 milliards de dollars. Presque anecdotique, le chiffre d’affaires de l’entreprise est, lui, en faible croissance de 2%, atteignant 7,78 milliards de dollars.

cours boursier de Netflix 20/04

Le cours en bourse de Netflix s’est effondré après l’annonce des résultats trimestriels. Source : Google

Le leader mondial du streaming n’a pas été avare en explication pour décortiquer cette piètre performance. Tout d’abord la suspension de son service en Russie, suite à l’invasion de l’Ukraine, l’a instantanément privé de 700 000 abonnés. Une perte compensée par l’arrivée de 500 000 nouveaux. La guerre a aussi entraîné un ralentissement de sa croissance en Europe de l’Est et Centrale en mars.

Cela reste toutefois un peu court : Netflix a également perdu des usagers dans ses deux régions américaines pour en gagner seulement dans celle de l’Asie-Pacifique. Il faudrait voir ici un effet Covid. Avec la fin des confinements, les gens passent naturellement moins de temps devant les écrans. Les investisseurs ne s’y sont pas trompés, puisque l’annonce des résultats de Netflix a également entraîné une baisse de la valeur boursière de ses concurrents.

Ces derniers sont également un facteur de pertes d’abonnés. Entre le 1er trimestre 2020 et le 1er trimestre 2022, la part de marché de Netflix est passée de 55,7% à 45,2%. Dans sa lettre aux actionnaires, la plateforme juge que depuis 3 ans la concurrence des Amazon Prime, Hulu, Disney+, AppleTV, HBO Max, YouTube, se fait de plus en plus pressent. Elle constate, « Les sociétés de divertissement traditionnelles ont compris que le streaming est l’avenir, de nombreux nouveaux services de streaming ont également été lancés ».

Enfin, Netflix pointe le partage de mot de passe, « Le partage de comptes en tant que pourcentage de nos membres payants n’a pas beaucoup changé au fil des ans, mais […] cela signifie qu’il est plus difficile d’augmenter le nombre de membres sur de nombreux marchés – un problème qui a été occulté par notre croissance de COVID ». 100 millions de foyers partageraient leurs comptes à travers le monde.

Une image du jeu This is a True Story de Netflix.

Sur Netflix, le jeu This is a True Story vise à sensibiliser les joueurs sur le manque d’accès à l’eau potable de millions de personnes à travers le monde. Image : Netflix / Frosty Pop.

Netflix s’ouvre à la publicité et à la sévérité

Sur ce dernier point, le discours de Reed Hasting, PDG de la plateforme, a sensiblement évolué. Alors qu’il le qualifiait le partage de compte comme « quelque chose avec lequel vous devez apprendre à vivre », il a désormais décidé de le combattre. Les difficultés de l’époque subsistent : comment différencier le partage de compte légitime, dans un même foyer et celui qu’il l’est moins ?

Le leader du streaming a commencé à tester un système de surfacturation pour les partages hors du foyer au Costa Rica, Pérou et Chili. Il devrait être étendu au reste du monde. Aucune date précise n’a été dévoilée, mais CNBC s’est laissé entendre dire que ce serait pour 2023.

Autre changement de paradigme pour Reed Hasting, la publicité. Absente de la plateforme elle pourrait faire son entrée d’ici un ou deux ans. Netflix s’est dit « tout à fait ouvert à l’idée de proposer des prix encore plus bas avec de la publicité, en tant que choix du consommateur ».

Cette solution pourrait parer l’une des difficultés de l’entreprise, l’augmentation de ses marges. À part augmenter ses tarifs, ce qu’elle a fait en mars aux États-Unis et au Canada, elle dispose de peu de levier. La publicité et la lutte contre le partage de compte représentent des alternatives séduisantes pour conserver la place de champion mondial du streaming.