Deliveroo France et trois de ses anciens cadres, ont été condamnés ce 19 avril pour « travail dissimulé » ou « complicité de travail dissimulé » entre 2015 et 2017. Pour la présidente de la 31e chambre du tribunal judiciaire, le délit est établi, rapporte l’AFP. Le tribunal a suivi les réquisitions de la procureure Céline Ducournau pour ce premier procès de l’ubérisation en France.

Le système Deliveroo condamné

Deliveroo va devoir s’acquitter d’une amende de 375 000 euros et afficher sa condamnation sur son site durant un mois, pour en informer ses livreurs. L’entreprise devra également régler 50 000 euros de dommages et intérêts à chaque syndicat partis civils, la CGT, l’Union Solidaires, SUD-Commerces et services, SUD-Commerces et services Île-de-France, le Syndicat national des transports légers, pour « préjudice moral ».

Deux anciens cadres de l’entreprise ont été condamnés pour les mêmes motifs à 12 mois de prison avec sursis et 30 000 euros d’amendes. Ils ont, en outre, l’interdiction, avec sursis de diriger une entreprise durant 5 ans. Un troisième cadre est condamné à 4 mois de prison avec sursis et une amende de 10 000 euros pour « complicité ».

Lors de la semaine d’audience en mars, une dizaine de livreurs ont témoigné à la barre de leur expérience chez Deliveroo. Ils ont décrit les difficultés pour obtenir les meilleurs créneaux, la surveillance que la plateforme exerçait sur eux.

Pour la procureure, le port de l’uniforme, les formations, le zonage des livraisons, la réservation des meilleurs créneaux aux meilleurs livreurs, constituent un faisceau d’indices suffisant pour battre en brèche le statut d’intermédiaire dont se prévaut la plateforme.

Selon Céline Ducournau il s’agit bien de « faux indépendants » et donc de travail dissimulé. Elle a regretté au cours de l’audience l’absence sur le banc des accusés de William Shu, cofondateur et PDG de Deliveroo, réel inventeur du système de la plateforme.

Un mouvement européen

Partout en Europe, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en Espagne, en Italie, des chauffeurs Uber ou livreurs Deliveroo ont obtenu des victoires similaires. Au niveau européen un projet de directive de la Commission vise à instaurer une présomption de salariat pour mettre fin aux « faux indépendants » des plateformes.

En France, Deliveroo a fait savoir à l’AFP qu’un appel était envisagé. L’entreprise va également devoir faire face à une autre procédure, l’URSSAF lui réclame 9,7 millions d’euros pour rattraper les cotisations sociales esquivées par le recours à des travailleurs indépendants.