Après Cogent, Lumen est le second fournisseur Internet américain à annoncer la fin de ses opérations en Russie. Si cette décision va dans le sens des sanctions imposées par l’Occident, elle risque d’isoler un peu plus le peuple russe du reste du monde.

Un choix pour la « sécurité »

« Nous avons décidé de déconnecter le réseau en raison du risque accru de sécurité à l’intérieur de la Russie. Nous n’avons pas encore connu de perturbations du réseau, mais compte tenu de l’environnement de plus en plus incertain et du risque accru d’action de l’État, nous avons pris cette mesure pour assurer la sécurité de nos réseaux et de ceux de nos clients, ainsi que l’intégrité permanente de l’Internet mondial », déclare Lumen dans un communiqué pour expliquer sa décision.

Si la firme, contrairement à d’autres entreprises technologiques, ne justifie pas son choix par l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, il est fort probable qu’elle ne craigne la nouvelle loi validée par le Kremlin faisant risquer quinze ans de prison à quiconque diffuserait de « fausses informations » sur la guerre.

Lumen assure que ses services sont « extrêmement réduits et très limités » en Russie, mais la société compte tout de même parmi ses clients Rostelecom et TransTelekom, deux entreprises publiques de télécommunications. La fin des activités du service dans le pays devrait donc se faire ressentir par la population.

Des personnes se promènent sur la Place Rouge à Moscou.

Les Russes se retrouvent de plus en plus isolés du reste du monde. Photographie : Aurelien Romain / Unsplash

Les entreprises technologiques suivent les sanctions de l’Occident

La décision de Lumen n’est pas étonnante, alors que les gouvernements et les géants technologiques occidentaux prennent des mesures drastiques pour protester contre la guerre en Ukraine. Des mastodontes de la Silicon Valley comme Oracle, Intel, Airbnb, Microsoft ou encore AMD ont ainsi décidé de suspendre leurs activités en Russie. C’est également le cas d’Apple qui n’y vendra plus ses produits, ainsi que de Samsung qui a pris une décision similaire.

Google a annoncé la fin de ses activités publicitaires en Russie, mettant en péril de très nombreuses entreprises tant la machine publicitaire de la firme de Mountain View est colossale. De même, Amazon Web Services, plus grand fournisseur cloud au monde, a déclaré qu’il n’accepterait plus de nouveaux clients venus de la Russie ou de la Biélorussie.

Un rideau de fer numérique autour de la Russie

La Russie riposte. Le Kremlin a par exemple décidé de restreindre Twitter et de bloquer Facebook dans le pays, mais cela ne fait que couper le peuple russe de sources d’information internationales. Le fait que des fournisseurs Internet venus de l’étranger quittent la Russie peut avoir des conséquences désastreuses pour les Russes.

« Déconnecter la Russie de l’Internet mondial, c’est laisser aux Russes la seule propagande d’État qui leur dit que les Ukrainiens sont leurs ennemis. Cela réduira au silence les voix anti-guerre et portera préjudice à l’Ukraine », a déclaré Natalia Krapiva, avocate spécialisée dans les droits numériques au sein du groupe de défense de la liberté sur Internet Access Now, au Washington Post. À l’heure actuelle, les principales sources de données internationales restantes en Russie sont des entreprises occidentales basées en Suède, en Italie et au Royaume-Uni.

L’Occident est en train de construire un véritable rideau de fer numérique autour de la Russie, rideau que le pays de Poutine tente de contourner. Pour y parvenir, il envisage par exemple de légaliser le piratage de logiciels afin d’avoir accès à des services et produits issus d’entreprises occidentales.