Certains eurodéputés et pays membres de l’Union européenne ont reçu à la fin de la semaine du 24 janvier un courrier des autorités américaines, « préoccupées » par la version du Digital Markets Act (DMA) du Parlement européen, votée en décembre. Selon Politico, qui a dévoilé ledit document, les États-Unis sont beaucoup plus favorables aux positions de la Commission et du Conseil.

Les États-Unis défendent leurs entreprises

La législation sur les marchés numériques, ou DMA, visant à s’assurer que les grandes plateformes numériques ne se livrent pas à des abus de position dominante, en est à sa dernière étape législative à Bruxelles. Le Parlement et le Conseil de l’UE ont chacun proposé une version inspirée de la proposition de la Commission, ils doivent désormais s’accorder sur un texte commun à adopter.


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Les États-Unis n’ont jamais caché la grande méfiance que leur inspirent ce projet de règlement et son projet sœur, le Digital Services Act : en décembre, la Secrétaire au Commerce, Gina Raimondo avait suscité la polémique en critiquant le projet.

Les progrès rapides du processus législatif européen n’ont pas démobilisé les autorités américaines, comme le prouve le texte de huit points dévoilé par Politico. S’y retrouvent les critiques habituelles opposées au DMA et en particulier à la version du Parlement.

Parmi elles, le pays natal des GAFAM regrette que « Le champ d’application proposé par le Parlement européen viserait exclusivement les entreprises américaines, non seulement au moment de la mise en œuvre de la loi, mais aussi pour les années à venir ».

Les eurodéputés ont relevé le seuil au-delà duquel une entreprise sera considérée comme un « Gatekeeper », c’est-à-dire soumis au DMA, à 8 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel et une capitalisation boursière de 80 milliards d’euros. Les États-Unis estiment ce seuil discriminatoire, car englobant seulement les entreprises américaines.

Les États-Unis demandent également à limiter le montant des amendes prises en vertu du DMA à 10% du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise, comme suggéré par la Commission. Le Parlement a proposé, de son côté, une fourchette plus large, de 4% à 20%.

Autre ajout des eurodéputés critiqué, l’ajout des assistants virtuels, navigateurs web et téléviseurs connectés aux plateformes prises en compte par le DMA. Les États-Unis estiment également que seule la Commission devrait être chargée d’appliquer la nouvelle réglementation.

Un point est particulièrement intéressant, puisqu’il reprend directement des arguments avancés par Tim Cook, le PDG d’Apple, en s’opposant à l’autorisation du sideloading. Il s’agit de la possibilité de télécharger une application, ou autre, en dehors de l’App Store. Un problème de sécurité dit Apple, qui a l’utilité de justifier la fermeture de son écosystème. Le Congrès américain lui-même réfléchit à une loi pour ouvrir les services de la marque à la pomme.

Le DMA adopté en mars ?

Enfin, les États-Unis espèrent que Bruxelles va freiner l’adoption du DMA. Ils souhaitent que la mise en œuvre du règlement prenne son temps, un an, et que les « Gatekeeper » aient trois mois avant de notifier leurs mises en conformité à la Commission.

Manque de chance, la France, en la personne d’Emmanuel Macron, a fait de l’adoption du DMA l’un des principaux objectifs de sa présidence tournante du Conseil de l’UE. D’après Politico, une rencontre bilatérale a été réclamée par la mission américaine auprès de l’UE. Le temps presse pour les États-Unis, la date du 24 mars a été avancée pour l’adoption du règlement.