Le Kazakhstan est traversé par une grave crise politique depuis le début de l’année 2022 avec un impact lourd sur le cours du Bitcoin. Depuis que la Chine, représentant 60% à 70% du réseau minier, a interdit l’activité en juin, le Kazakhstan est devenu le deuxième pays d’accueil des mineurs.

Le refuge des mineurs chinois

Le Kazakstan avait tout pour séduire les mineurs de cryptomonnaies jetés dehors par la Chine, un climat froid, de l’énergie à bas coût et de nombreux entrepôts vacants. Selon un décompte du Financial Times, 87 849 machines de minage sont arrivées dans l’ex-république soviétique depuis la décision chinoise.

L’installation ne s’est pas faite sans difficulté. Le minage est une activité énergivore qui a déstabilisé le réseau vieillissant du pays. Pour éviter les coupures de courant, un rationnement de l’alimentation électrique a été annoncé pour les mineurs de cryptomonnaies en décembre 2021. Selon le gouvernement kazakh, le minage accapare jusqu’à 8% des capacités énergétiques du pays.

Des discussions en vue de la mise en œuvre d’une nouvelle réglementation devaient aplanir ces difficultés, avec un nouveau cadre légal et la chasse au minage non déclaré. Interrogé par Wired, Alan Dorjiyev, président de l’Association nationale de l’industrie de la blockchain et des centres de données du Kazakhstan, estime que ce nouveau cadre allait apporter une certaine stabilité au secteur.

La crise politique la plus grave du pays depuis 30 ans

C’était sans compter sur la crise qui agite le Kazakhstan depuis début janvier. Une hausse du prix du carburant dans un pays pourtant riche en pétrole a provoqué un vaste et violent mouvement de colère populaire, réprimé dans le sang par le pouvoir, épaulé par la Russie. Si la crise touche à sa fin et que les troupes russes sont en train d’amorcer leur départ, le Kazakhstan reste ébranlé par l’une des situations les plus graves que le pays ait dû traverser depuis une trentaine d’années.

Les coupures de courant se sont multipliées, Internet a été complètement déconnecté du 5 au 10 janvier, avec, depuis, un retour de la connexion des plus timides. Les mineurs ont dû augmenter la sécurité de leurs installations, même si les troubles étaient relativement éloignés.

Du reste, leur activité a été fortement perturbée. Jaran Mellerud, analyste de la société Arcane Research, spécialisée dans l’analyse des cryptomonnaies, a estimé pour Wired que les fermetures des mines ont coûté 7,2 millions de dollars aux mineurs kazakhs. Le Bitcoin a perdu 12% de son débit depuis le début des événements.

Les dégâts pourraient avoir des conséquences au-delà de la crise elle-même. Les coupures de courant peuvent entraîner un gel rapide des appareils vu le climat local, de quoi les abîmer durablement. La nouvelle loi visant à stabiliser l’alimentation des mines est probablement repoussée aux calendes grecques par un gouvernement ayant d’autres préoccupations.

Après le Kazakhstan, où se réfugier ?

Selon les éléments recueillis par Wired, la crise au Kazakhstan n’a, pour le moment, pas engendré d’exode des mineurs. Si certains mettent en avant leur optimisme sur l’avenir du pays, beaucoup n’ont tout simplement pas les moyens de partir.

Les principaux pays d’accueil potentiel, Russie, Canada, États-Unis manquent déjà d’infrastructure pour accueillir tous les mineurs, sans compter les difficultés d’entreprendre un déménagement par les temps qui courent.

Le premier pays minier du monde, les États-Unis, rime avec au moins deux semaines de voyages durant lequel le matériel pourrait s’abîmer. La rentabilité du départ pose également question. La taxe d’exportation du Kazakhstan équivaut à 12% de la valeur marchande d’un appareil. Les barrières douanières mises en places par Donald Trump sur le matériel chinois, marché d’origine de beaucoup de mineurs expatriés, sont fixées à 27,6%.

Le Kazakhstan pourrait bien perdre son image de pays de cocagne pour mineurs après ce mois de janvier 2022. Des spécialistes des cryptomonnaies estiment que le pays n’accueillera plus autant d’investissement du secteur à l’avenir. Les machines pourraient continuer à tourner jusqu’à atteindre l’âge de la retraite, sans être remplacée. Encore faut-il trouver un nouvel état réunissant les conditions nécessaires pour accueillir l’extraction de cryptomonnaie et prêt à payer la très gratinée facture d’électricité.