Voici un nouvel épisode de Futurs au Pluriel, le podcast long format de Siècle Digital, centré sur un sujet très en vogue : le métavers. Au micro : Valentin Blanchot, rédacteur en chef, Grégoire Levy, journaliste, Mathieu Flaig, directeur général au sein du cabinet SYSK, et Anthony Macare, directeur du digital et de l’expérience utilisateur chez Bandai Namco Europe.


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Transcription de l’épisode : Bienvenue dans le métavers

Grégoire Levy
Le métavers, vous avez tous dû en entendre parler ces derniers jours, surtout parce que l’actualité tourne plus ou moins autour de ça. C’est quoi exactement et à quoi ça va servir ? Dans l’actualité, il y a notamment Facebook qui a officialisé son changement de nom, qui se nomme désormais Meta, en référence au métavers que Mark Zuckerberg considère comme le remplaçant de l’Internet mobile actuel. Il s’agirait pour lui notamment d’un monde virtuel où tout ce que nous faisons dans le monde réel serait potentiellement faisable.

Il y a aussi Microsoft, qui s’est lancé dans la course avec Mesh, destiné au travail collaboratif à distance. Tout ça, on en a déjà un peu parlé dans les podcasts Culture numérique de Siècle Digital. Il est aussi bon de rappeler que ces entreprises ne sont pas les premières à s’être penchées sur ce sujet du métavers. Peut-être que certains d’entre vous, si vous avez été gamers ou si vous l’êtes encore, connaissent Roblox qui n’est pas le premier, d’ailleurs, il y a eu Second Life avant, qui sont des jeux, qui proposent justement des univers qui font penser un peu à ce que pourrait être le métavers. Des univers virtuels où on se balade dedans avec des avatars qui nous représentent, où on peut même commercer, échanger, se faire de l’argent virtuel qui peut ensuite être transféré et transformé en monnaie réelle.

Avec tout ça, au fond, c’est quoi un métavers exactement ? Valentin, est-ce que tu peux éclairer un peu notre lanterne ?

Valentin Blanchot
Oui, ça va être assez simple puisque je vais pouvoir résumer tout ce que t’as dit un petit peu avant. Un métavers, ma définition, parce que je pense qu’il y a autant de définitions que de visions et de définitions du métavers possibles, c’est que c’est un univers virtuel, accessible soit en réalité virtuelle, soit en réalité mixte, dans lequel on se rend avec un avatar pour se connecter avec ses proches. On va pouvoir jouer, on va pouvoir vivre des expériences que nous a montré Facebook, en faisant un concert, ce qui me semble technologiquement assez difficile. On se projette peut-être dans pas mal d’années, voire une bonne décennie. On va aussi pouvoir y travailler.

Voilà ma définition un peu sobre du métavers. Je pense qu’on en a tous une. Mathieu, est-ce que t’as une définition propre ? Est-ce qu’il y a des choses à ajouter ou est-ce qu’on peut s’éloigner un petit peu de cet environnement-là ?

Mathieu Flaig
Le terme « métavers », c’est intéressant de se dire qu’il n’est pas récent, mais pas non plus si vieux. Le terme « metaverse » vient d’un livre qui s’appelle Snow Crash, le Samouraï virtuel en français, qui avait été créé par quelqu’un qui s’appelle Neal Stephenson et qui l’a écrit en 1992. En 2022, il va fêter ses 30 ans. Déjà pour se dire un peu l’historique de ce qu’est le terme metaverse. Tout à l’heure, on parlait de Second Life, on peut aussi se rappeler, pour les plus vieux, qu’en 1997, il y avait Canal+ qui avait fait une sorte d’univers virtuel qui s’appelait le Deuxième Monde.

À l’époque, il fallait lancer un CD-ROM pour pouvoir rentrer dedans, mais c’était déjà des premières bases. Si on parle juste de ce qu’est le metaverse aujourd’hui ou le métavers en français, déjà, c’est la contraction de deux choses : le méta-univers ou meta-universe.

Aujourd’hui, c’est un peu un mot valise sur cette année 2021, où certaines personnes vont y voir la possibilité d’avoir un équivalent de la vie virtuelle dans un univers virtuel. D’autres vont y voir le mix entre de la réalité augmentée, de la réalité virtuelle. D’autres vont y voir du jeu vidéo immersif, comme du Fortnite. Il y a beaucoup de choses qui sont incluses dedans. Ce qui est sûr, c’est que tout ça va dans le même sens, qui est la fusion du réel et du virtuel, chose à laquelle je crois depuis pas mal de temps et qu’on a déjà commencé à voir rien que dans notre rapport au smartphone, par exemple.

Grégoire Levy
Anthony, une définition peut-être personnelle du métavers ?

Anthony Macare
Je pense que ce qui vient d’être dit est assez pertinent. Je rajouterais simplement qu’il y a la notion de mondes persistants, d’univers persistants en plus, qui est important, et d’avatar, qui sont deux éléments bien connus dans l’univers du jeu vidéo, mais qui permettent de se représenter dans cet univers. Effectivement, dans l’univers des jeux vidéo, il y a eu des initiatives. Il y a eu celle de Canal+ avec le développeur français Cryo en 97. En faisant un peu de recherches sur le sujet, il s’avère que LucasArts, qui ne s’appelait pas LucasArts à l’époque, avait créé un jeu en 85 qui s’appelait Habitat et qui était un des premiers jeux de rôle massivement multijoueur avec une communauté virtuelle, avec un environnement graphique digital. Ça remonte, ces métavers, ces univers persistants, multijoueurs, à très longtemps en termes de conception intellectuelle, mais aussi de développement.

Grégoire Levy
Justement, vous avez déjà un petit peu abordé le côté aussi jeux vidéo et conception, mais en termes de technologie, est-ce que c’est faisable de faire un métavers ? Facebook a présenté une vision très idyllique de ce que ça pourrait être. Est-ce que c’est faisable de faire exactement ce que Facebook a montré ?

Mathieu Flaig
Je pense que c’est faisable, mais est-ce que c’est souhaitable ? Ça, c’est la première question. Après, si on fait la comparaison entre ce qu’est ce potentiel métavers, et ce qu’on vit aujourd’hui avec les réseaux sociaux, on peut se dire qu’aujourd’hui, on a un device, donc un smartphone, par exemple, un ordinateur qui permet de se connecter à différentes plateformes. Les gens sont heureux comme ça. C’est un seul device qui permet de se connecter à ces différents mondes virtuels dans lesquels on va évoluer, dans lesquels on a aussi parfois notre propre identité.

Je crois plus à ça pour le futur, en se disant : « Est-ce qu’on veut avoir une entreprise hégémonique comme Facebook qui impose sa vision et son écosystème à tout le monde ? » Je pense que les autres géants du numérique et les futurs aussi qui vont émerger ne voudront pas forcément faire ça. Par contre, le fait que tout soit interconnectable via un device, on parlait en introduction de lunettes, par exemple, des lunettes de réalité augmentée, ça, j’y crois plus aisément.

Il y a énormément de travail sur ce sujet. Il faut des dispositifs pour accéder à ce métavers, il faut du contenu, il faut un écosystème, il faut surtout que les gens s’y intéressent. Techniquement, c’est possible, après, c’est pas que de la technique. Il y a plein de produits techniques qui ont été lancés, qui ont été parfois des échecs ou des demi-échecs. Comment est-ce qu’on incite les gens ? Aussi, par exemple, avec Microsoft, comment on incite les entreprises à participer à ce type d’événement virtuel ?

Anthony Macare
Je mitigerais un peu ça. Faisable techniquement aujourd’hui de la manière dont ça a été montré, très difficilement ou très partiellement. Il faut beaucoup de technologie, il faut beaucoup de devices très performants, il faut beaucoup de capacité de calcul pour arriver à potentiellement faire fonctionner ce qui a été montré par Facebook. Je pense qu’aujourd’hui, on n’y est pas. Il y a beaucoup d’extrapolations. D’ailleurs, pendant la conférence de Facebook, ils prenaient énormément de précautions sur : quand est-ce que ça pourrait arriver.

On parle de 5, 10, potentiellement 15 ans. Je pense qu’effectivement, il y a une difficulté technique à couvrir sur la capacité de tout représenter en digital, de tout calculer en temps réel et d’avoir ces interfaces aussi homme-machine, que ce soit en termes de vision, mais aussi en termes de mouvements, de représentation dans l’espace. Je pense que tout ça, ça lève des très bonnes pistes en termes de recherche, de développement, d’outils, de logiciels, d’intelligence artificielle, mais je pense qu’on n’y est pas du tout aujourd’hui et qu’il y a énormément de développement à réaliser pour qu’on s’en rapproche, sauf des épiphénomènes ou des microexpériences. En tout cas de l’expérience globale présentée aujourd’hui, on en est très loin.

Valentin Blanchot
Je prends un exemple. Je me rappelle dans la vidéo de Facebook, j’avance un peu sur l’émission, mais ils montraient plusieurs jeux qui étaient très immersifs. À un moment, il montre quelque chose qui m’a assez interloqué, parce qu’il y avait des choses qui me semblaient assez concrètes. La vidéo faisable avec un casque en réalité virtuelle, même si c’était bien marketé, bien présenté par Facebook, mais il y avait surtout cette partie de basket, où la personne, elle tient un ballon. On la voit tenir un ballon. Physiquement, elle le tient presque, sauf qu’il n’y a pas encore beaucoup de gants, pas encore beaucoup de technos qui permettent de le faire, qui sont suffisamment fluides et efficaces pour ressentir ces mêmes mouvements-là et faire une vraie partie de basket, en étant chacun à des endroits différents.

Ça, c’était l’exemple qui m’a semblé un petit peu « What the fuck ». Dans l’exemple, s’il faut être concret, il y avait des choses qui étaient assez normales et plutôt logiques.

L’exemple de basket, ça nous renvoie à la problématique du device et ça nous amène aussi à une autre question, c’est : avec quoi on va aller dans le métavers ? Est-ce qu’on sera plutôt sur un casque de réalité virtuelle ? Est-ce qu’on aura des lunettes ? Est-ce qu’on est prêt à mettre des lunettes aussi plutôt qu’un casque ? On sait que le casque est juste là pour nous emmener ailleurs plutôt que des lunettes ou on va vivre avec, on va se balader dans la rue avec.

On va être assis dans le métro avec quelque chose qui va être projeté, que les autres ne vont pas pouvoir voir, mais que nous, on va pouvoir voir.

Est-ce que ça va être des appareils qui vont appartenir à Facebook et à ces marques, qui créent des métavers ? Ou est-ce que ça va appartenir aussi à d’autres marques qui vont permettre à d’autres d’aller dans le métavers, comme nos smartphones nous permettent d’aller sur Internet ? Mathieu, peut-être, est-ce que tu avais un avis là-dessus ?

Mathieu Flaig
Je pense qu’il existe déjà des choses. Moi, j’ai pu tester, par exemple, du retour haptique, le fait d’avoir effectivement des gants qui donnent l’impression d’avoir un certain poids. On pourrait imaginer ça. Ce n’est pas, par exemple, intégré aujourd’hui dans les produits de Facebook, mais il y a déjà des gens qui le testent. J’avais testé aussi des choses sur le HTC Vive avec de l’eye-tracking qui permettait aussi de faire bouger la scène en fonction de comment est-ce qu’on voulait se déplacer.

J’avais testé aussi quelque chose ou à un moment donné, quelqu’un m’avait connecté une sorte de… En fait qui prenait ma tension et mes battements cardiaques et l’expérience changeait en fonction de mes constantes vitales. Il y a des choses qui sont intéressantes qui se passent par rapport à ça. Pour revenir sur ce qui est de la vidéo de Facebook, cette vidéo de Facebook est comme pas mal de vidéos qui ont été lancées ces dernières années, avec une promesse qui est surdimensionnée et qui va créer sûrement de la déception.

J’ai un exemple, HoloLens, par exemple. Je crois que la vidéo avait été lancée sur le HoloLens V1 vers 2015. Il y avait une vidéo de Microsoft qui présentait un environnement très B2C, où on pouvait jouer à des jeux dans son salon, il y a une interaction à 360 degrés, tout ça. Dans les faits, quand on teste un HoloLens, en tout cas le HoloLens V1, on avait une petite fenêtre pas forcément très bien faite. L’expérience utilisateur n’était pas dingue. Plus le casque coûtait plus de 3 000 dollars, donc c’était pas vraiment pour le grand public.

Il y a toujours un peu cette histoire qu’on se raconte aussi pour séduire l’esprit des gens en se disant : « Voilà ce que ça va être et ça va être super ». Les gens s’excitent sur le sujet, mais en réalité, tant en termes de prix que d’expériences réelles, on est quand même en décalage. Ça, je trouve que c’est contreproductif pour la plupart des boites qui produisent de la tech ou qui veulent produire ce type d’expériences, parce qu’on sait que de toute façon, effectivement, on n’y est pas.

On parlait du sujet technique, il y a plusieurs blocs qui existent, mais est-ce que c’est orienté vers une même direction, qui est par exemple la création de ce métavers aujourd’hui ? La réponse est non. C’est aussi des entreprises en face comme Facebook, qui peut investir énormément, qui va investir cette année 10 milliards sur les sujets RVR, qui veut recruter 10 000 personnes. Et c’est pas les seuls qui veulent faire ça. Il y a une armée d’entreprises qui sont orientées vers ce type d’envie de se dire : « C’est quoi  » l’Internet d’après  » ?

C’est quoi  » le numérique d’après  » ? » Je ne sais pas si vous connaissez la série Silicon Valley, dans la série Silicon Valley, ils inventent une sorte de nouvel Internet et j’ai l’impression que les géants du numérique essaient aussi d’inventer ce nouvel Internet pour le futur et comment est-ce qu’il se [inaudible 00:12:50] ?

Anthony Macare
Je pense qu’ils ont besoin de se renouveler. Facebook cherche des relais de croissance et à s’autocannibaliser pour proposer quelque chose de nouveau demain. Aujourd’hui, ils ont un réseau social qu’ils font évoluer. Il y a des évolutions, mais il n’y a pas de transformation fondamentale et je pense que ce qu’ils cherchent à faire à travers ça, c’est de proposer quelque chose de complètement différent et d’envisager le futur du réseau social, avec notamment quelque chose de beaucoup plus immersif.

Sortir des écrans, mais il y a toujours une partie de vision, d’affichage. C’était sur des écrans, il peut y avoir beaucoup de typologies d’écrans qui soient fixes, qui soient mobiles. Maintenant, on part sur la réalité virtuelle, mais ça reste une interface homme-machine avec un écran et un moyen de communiquer avec les autres de manière plus immersive. Je pense que c’est ce qui est recherché ici et je pense que Facebook a besoin de ça pour sortir un petit peu de son modèle existant. Avec tous les déboires qu’ils subissent, je pense qu’ils ont besoin de donner un peu de vision, de plus long terme et de se projeter sur quelque chose de nouveau.

Grégoire Levy
On a abordé les devices et les questions aussi de la marque, qui va faire les devices, qui va faire aussi le métavers et à qui ça va appartenir. Ça pose intrinsèquement, la question de l’open source aussi. Est-ce que c’est souhaitable que ce soit comme Internet ? Si c’est vraiment le remplaçant de l’Internet mobile actuel, c’est censé être quelque chose de relativement libre, un espace de liberté. Est-ce que ce sera vraiment le cas si c’est le métavers de Facebook, par exemple ?

Mathieu Flaig
Est-ce que l’Internet actuellement et la façon de se connecter à Internet est libre ? La plupart des gens utilisent Chrome pour se connecter à Internet sur leur ordinateur. On a tous, soit un Android, soit un iPhone. Les différents systèmes qui pouvaient exister autour ont disparu. Android à la base est open source, mais si on veut avoir les applications qui font qu’on pourra avoir accès à ces différents services, on a besoin de payer une licence, du Google et des choses comme ça.

En réalité, Internet n’est pas vraiment libre aujourd’hui et surtout, plus ça va et moins on a une vision large d’Internet. Quand j’ai commencé Internet en 96, j’avais l’impression de découvrir beaucoup plus de choses, d’aller sur beaucoup plus de sites Internet qu’aujourd’hui. Aujourd’hui, je vais sur mes applications Twitter, TikTok, Instagram, Snapchat, peu importe. En réalité, on est sur un Web qui est quand même déjà un peu fermé. Le côté Far West qu’on avait, on va dire, il y a 20 ans, n’existe plus vraiment.

Je pense qu’au début, ça inquiète un peu les gens. Ils se disent : « OK, mais est-ce que ce n’est pas trop fermé, tout ça ? ». Si derrière le côté utile ou l’intérêt qu’ils peuvent y avoir est plus fort que, par exemple, donner leurs informations personnelles ou s’enfermer dans un écosystème, ils vont le faire. Ça se voit partout. Quand, par exemple, sur les smartphones, on a commencé à lancer les GPS, les gens étaient très inquiets. Ils ont dit : « Non, je ne veux pas un téléphone qui me suit tout le temps ».

Aujourd’hui, moi, par exemple, je ne fais pas 500 mètres sans sortir mon GPS. J’oublie ce côté : je donne mes données personnelles et, entre guillemets, je suis dans un écosystème qui est Google, qui est Android et qui est quand même assez fermé. Si l’intérêt est là et s’il y a un apport dans la vie des gens en termes d’utilité, de facilité, les gens iront.

Anthony Macare
En revanche, je crois pas au côté universel du métavers. Simplement parce que techniquement, ça demanderait un standard global utilisé par toutes les sociétés. Ça, je pense que c’est assez illusoire d’imaginer que ce sera le cas un jour. En revanche, je crois à des multiples métavers, qui proposeront des expériences différentes. Les expériences devant être tellement abouties qu’elles ne pourront pas être standardisées. On ne pourra pas avoir le même fonctionnement d’un casque de réalité augmentée ou de réalité virtuelle et de contrôle d’une application, si on veut naviguer sur le web ou si on veut jouer à un jeu vidéo, à une simulation ou se rendre à un concert avec ses amis ou échanger avec ses amis.

Je crois à une multiplicité de métavers, mais un métavers unique, global, standardisé, aujourd’hui ça ne me semble pas réaliste.

Mathieu Flaig
J’aimerais bien juste rebondir sur le terme « abouti », parce que je pense qu’il est important. Si on regarde ce qui se passe sur la réalité virtuelle ou même sur certaines expériences de réalité augmentée, on est très loin de ce qui se fait dans le jeu vidéo. Le jeu vidéo propose maintenant des expériences qui sont quasiment similaires à la vie réelle. Ce que propose Facebook dans son métavers et dans sa vidéo, c’est intéressant, mais, moi, je trouve ça… J’ai publié un commentaire sur l’une de leurs vidéos YouTube en disant que c’était « Boeing », que c’était un peu ennuyant, parce que je trouve que ce n’est pas excitant.

Ce n’est pas un peu le futur qu’on m’a promis. Même en termes de réalisation, on est habitué à tellement mieux maintenant dans plein de secteurs différents, dans l’entertainment, dans le jeu vidéo. Si jamais on propose quelque chose qui est un peu décevant, parce que, peut-être, les dispositifs, les casques, les lunettes et tout ça peuvent pas gérer un meilleur rendu, ça aussi, ça peut créer un frein chez des personnes qui sont habituées à des choses qui sont plus intéressantes.

Anthony Macare
Moi, ce qui me fait rire dans ce que je vois avec Facebook, en tout cas, ce qui me fait sourire, c’est que c’est un peu une vision du futur qu’on avait déjà il y a 20 ans. C’est déjà des choses qui étaient proposées et projetées un petit peu de cette manière-là, avec des avatars 3D qui échangent. Je ne trouve pas que ça apporte grand-chose. Je trouve pas que ce soit quelque chose de fondamentalement nouveau par rapport au futur qu’on envisageait dans les années 2000 dans l’univers du jeu vidéo, pour parler de mon univers et de mon secteur. C’est comme ça qu’on se projetait déjà et je trouve qu’il n’y a pas beaucoup d’évolution par rapport au futur qu’on envisageait il y a 20 ans.

Grégoire Levy
Facebook a lancé un « buzz word » en parlant de quelque chose qui existe finalement déjà depuis super longtemps ?

Mathieu Flaig
Déjà, que fait Facebook actuellement ? J’ai l’impression qu’ils essaient de faire en sorte que le terrain de la communication soit totalement saturé et que quand on pense métavers, on pense Meta, on pense Facebook, donc ça, c’est un premier sujet. Et un besoin de toute façon de faire penser à autre chose, parce qu’ils ont pas mal de casseroles, entre guillemets, qui les poursuivent, et aussi, ils ont besoin de se réinventer.

Par exemple, le réseau social Facebook, c’est un réseau social qui est vieillissant. La plateforme en elle-même est vieillissante. Il suffit d’aller sur le site et on s’aperçoit qu’il y a plus de bugs que ce qu’on pourrait accepter dans beaucoup de sites Internet et que la plupart des gens qui postent autour de moi, c’est des gens qui sont plutôt entre 40 et 70 que des jeunes et la future génération qui va faire le business de Facebook. Est-ce que est-ce que Facebook va sortir son épingle du jeu pour la suite et est-ce qu’ils vont réussir à faire quelque chose qui va être assez intéressant et puissant et qui va les sortir de ce côté un peu « old school » comme l’a vécu MySpace et tout ça ? C’est un peu leur pari et c’est pour ça que je pense que là, ils surcommuniquent en disant : « Regardez, on est de nouveau cool et le futur cool, c’est nous ».

Anthony Macare
Je pense qu’ils ont verbalisé quelque chose qui existait depuis longtemps, mais qui n’avait pas ce nom-là et qui était peut-être pas perçu dans son ensemble. C’est-à-dire qu’il y avait des expériences de réalité virtuelle, de réalité augmentée, des jeux multijoueurs, des univers persistants dans les jeux. Effectivement, on n’avait pas placé de nom sur cet ensemble et sur cet écosystème. Je pense que là, ils arrivent à placer simplement un nom un peu nouveau, un peu moderne, sur quelque chose qui existe, avec une vision peut-être plus globale, moins éclatée que ce qui se faisait jusqu’à présent.

Je pense qu’ils ont un fort besoin de se réinventer. Ils ont un fort besoin de réengager avec les audiences les plus jeunes qu’ils perdent depuis de nombreuses années. On voit qu’aujourd’hui, les réseaux sociaux des plus jeunes, c’est TikTok, c’est Fortnite. Il y a déjà des métavers, il y a déjà des environnements 3D avec des avatars sur lesquels les gens investissent pour les customiser, qui sont persistants et sur lesquels ils vont pour échanger avec leurs réseaux d’amis. Je pense qu’ils avaient besoin de se positionner là-dessus pour aller retoucher cette audience plus jeune.

En tout cas, se reconcentrer sur les générations de demain et pas sur celles d’hier.

Mathieu Flaig
C’est juste d’ailleurs de citer Fortnite comme un réseau social, parce que dans la tête des gens, on pense pas forcément que c’est un réseau social, mais en fait, les gens socialisent énormément. Dans les gros événements qu’on a eu ces deux dernières années et qui ont un peu amorcé cette logique de metaverse et on fait aussi de Fornite un lieu social, quand on pose des questions à des adolescents aujourd’hui qui sont sur Fortnite en leur disant : « Tu ne veux pas sortir avec tes potes, aller jouer, aller faire des trucs ? », eux, ils répondent : « Je suis avec mes potes.

On est en train de socialiser. On est en train de regarder un concert de Travis Scott sur Fortnite. On est des millions et c’est incroyable ».

J’avais vu, il y a quelques années, des tendances qui parlaient de Fortnite comme le futur du social media. Peut-être que maintenant, c’est le métavers, le futur du social media. C’est sûr que l’écosystème dans lequel les plus jeunes interagissent est en train d’évoluer et c’est plus juste une plateforme un peu à l’ancienne dans une app où on a un fil. C’est une expérience qui est plus riche que ça.

Grégoire Levy
Vous parliez de se socialiser, de se connecter, ça fait partie de l’un des trois axes qu’a un peu présenté Facebook lors de la présentation de son métavers. C’est encore un peu flou, tout ça. Au final, après tout ce qu’on vient de dire, on se rend compte qu’il y a encore beaucoup de flou autour du métavers, mais ce qu’on voit un peu apparaître comme axe, c’est que ça va servir à se connecter, se sociabiliser, à jouer aussi et à travailler. Ça, probablement, peu importe le lieu ou le moment.

C’est un peu aussi ce qu’essaye de faire Microsoft avec Mesh. Ça m’amène à une question sur l’aspect de se connecter. Est-ce que ça va remplacer, le métavers, les réseaux sociaux actuels ?

Mathieu Flaig
J’ai travaillé dans les réseaux sociaux pendant longtemps en agence social média et autres. Déjà, quand les réseaux sociaux se sont lancés, il y avait une promesse qui était : ce sont plus précisément des médias sociaux. Des médias sur lesquels on peut faire des interactions sociales. Quand j’ai commencé à travailler en agence sur ce sujet, on disait : « Le plus important, c’est la partie sociale. Le côté média est un peu annexe ». Ce qui s’est passé ces dernières années, parce que les annonceurs sont arrivés et qu’il y a de plus en plus d’argent qui est investi dessus, c’est que maintenant, c’est vraiment devenu un média avec le social en mineur.

Ce qui est un peu inquiétant pour la suite, c’est que Facebook a des milliards d’informations sur toutes les personnes qui sont connectées à son écosystème : Facebook, WhatsApp, Instagram et tout ça, et que le jour où il lance un écosystème type metaverse, ils auront aussi la capacité de retenir l’attention des personnes et surtout, à un moment donné quand même, de leur vendre de la publicité parce que c’est leur modèle. Ils ne vont pas proposer une inscription ou, en tout cas un abonnement au métavers.

C’est comment est-ce qu’on arrive à se dire : « Oui, ça va vraiment être social », mais en réalité, ces interactions sociales vont surtout être là, peut-être pour vendre de la publicité. Je pense que l’historique de Facebook joue contre lui sur ce que les gens vont pouvoir percevoir de ce qu’est ce métavers et surtout de tous les freins potentiellement que les gens auront, en disant : « Si je m’intègre pleinement dans cet univers virtuel, Facebook sait déjà trop de choses de moi et quelque part, ça peut m’inquiéter, je trouve que c’est un peu dangereux ».

Grégoire Levy
Anthony, est-ce que c’est le futur des réseaux sociaux ou est-ce que ça va inquiéter les gens et freiner un peu le développement du métavers ?

Anthony Macare
Je pense que les gens sont déjà inquiets sur les réseaux sociaux et sur la quantité de données personnelles que gèrent les GAFAM, mais je pense que ça pousse la collecte de données un petit peu plus loin. C’est-à-dire qu’à partir du moment où on veut rendre l’expérience de réalité augmentée et de réalité virtuelle complète, ça veut dire qu’on capte le son et l’image en permanence. À partir du moment où on ne capte pas le son et l’image en permanence, on ne peut pas fournir le service qui a été montré. Ça pose des vrais problèmes de confidentialité, ça pose des vrais problèmes de gestion des données personnelles et de stockage des données tout court. Il va y avoir une quantité de données qui seront à analyser, ) stocker, qui seront très nettement supérieures à ce qui est nécessaire aujourd’hui. Je pense qu’effectivement, la collection des données, c’est un vrai sujet, mais ce sera beaucoup plus complexe.

Mathieu Flaig
Je pense notamment à Oculus. Il y a une certaine défiance de la part de la communauté Oculus, je suis dans plusieurs groupes Facebook qui parlent de ça, au moment où il a fallu un compte Facebook pour pouvoir utiliser son Oculus Quest. Avant, il fallait juste créer un compte et soudainement, les gens se sont dit : « Moi, je ne veux pas avoir cette connexion avec Facebook, qu’ils puissent aussi voir ce que je fais dans ces univers virtuels ». Certaines personnes ont dit : « Je ne prendrai pas d’Oculus Quest, je pars de là ».

Récemment, avec le changement de Facebook vers Meta, Facebook a réduit cette obligation de devoir se connecter avec un compte Facebook, ce qui a rassuré la communauté. Mais quand même, le premier mouvement qu’ils avaient fait était assez oppressant, parce que c’était vraiment une volonté de verrouiller leur écosystème. Là, en l’occurrence, l’écosystème VR.

Anthony Macare
Tout ça reste très flou. Ils ont communiqué qu’il n’y aurait pas besoin de compte Facebook. Est-ce qu’il y aura besoin d’un compte ? Est-ce que ce sera agnostique ? Est-ce qu’on pourra se connecter avec tout type de compte ? Encore une fois, le côté universel de la plateforme qui serait très complexe. Ou est-ce que ce sera un compte Meta, pour ne pas dire Facebook, simplement pour jouer sur les mots et faire de la com positive ? En tout cas, la question se pose, mais je pense qu’à ce stade, c’est encore trop flou pour pouvoir juger de comment ça sera implémenté.

Valentin Blanchot
C’est pas évident. Vu que Facebook a un peu monopolisé la présence médiatique, on a aussi du mal, je trouve, à essayer de se projeter sur : que vont faire les autres plateformes sociales ? Si elles vont créer leur metaverse ? Je n’ai pas du tout envie d’aller dans un LinkedInVerse, par exemple. J’ouvre mon fil LinkedIn, je vois des publications…

Mathieu Flaig
LinkedIn est déjà un peu un univers virtuel, en tout cas, un univers parallèle, à minima.

Valentin Blanchot
Ça fait un peu peur. Ça va poser aussi, parfois ou certainement, une problématique aussi de modèle économique. Aujourd’hui, Facebook, son modèle économique est basé effectivement sur le traitement de la donnée, mais parce qu’il permet aussi de vendre un ciblage qui est ultra précis. Fortnite, son modèle économique est pas forcément basé sur la donnée, mais sur la vente d’objets dans ce monde-là, donc, ça demande aussi à Facebook de permettre aux marques de s’intégrer dans ces univers-là, ces métavers-là. Est-ce qu’on va pas être débarrassé, d’une certaine manière, de la publicité pour en avoir une autre qui va être de virtualiser des objets qu’on va vouloir nous pousser à acheter ?

Ça veut dire que là, on va devoir mettre la main au porte-monnaie. Est-ce qu’on est prêt à le faire en tant qu’utilisateur de réseau social ? C’est difficile aussi de se projeter sur quel sera vraiment le modèle économique du métavers, et s’il y en a vraiment un. Est-ce qu’il ne sera pas uniquement sur le device ? Parce que le device, on peut l’acheter chez n’importe qui. J’ai du mal à me projeter. Est-ce que vous avez déjà une idée, un peu, à quoi pourrait ressembler la publicité ? Moi, je suis pas prêt à acheter un objet dans le métavers, j’aime pas ça, je ne compte pas le faire.

Je ne l’ai jamais fait quand je jouais à des jeux vidéo. Je ne suis pas non plus prêt à voir des genres de display apparaître sur d’autres éléments environnements et en 3D. À quoi ça peut ressembler ? Là, on part un peu plus loin, on parle un peu plus marketing-

Anthony Macare
J’ai trouvé que Mark Zuckerberg, pour le coup, avait été très clair sur le modèle économique. Il s’éloignait du média et de la publicité, même si ça restera forcément omniprésent avec les marques qui pourront offrir des expériences beaucoup plus abouties et présenter des produits, peut-être, de manière beaucoup plus pertinente par rapport à un écran plat. Mais il a parlé d’économie créative et de business model d’économie créative. Il y a clairement dans son intervention, la volonté de vendre des objets virtuels et, pourquoi pas, de devenir le Amazon Digital de demain et de se positionner sur la distribution d’objets, en plus de la maîtrise de la plateforme et de la vente de médias.

Cette économie créative, elle sera sourcée par des créateurs de contenu qui viendront créer des objets, des événements qui seront clairement monétisés. Ça a été clairement mentionné.

Mathieu Flaig
Je pense que sur ce blocage aussi sur l’achat d’objets virtuels, il y a peut-être aussi une autre vision un peu européenne, parce que si on regarde en Asie, une plateforme comme Line ou même des plateformes comme WeChat, aujourd’hui les gens peuvent acheter des stickers. Ils peuvent acheter des stickers pour réagir, ça va coûter l’équivalent de quatre ou cinq dollars. On a l’impression que ça fait pas trop mal et c’est pas cher, mais en réalité, ils font énormément d’argent par rapport à ça. Sur du WeChat aussi, il y a des choses qui sont sponsorisées par les marques.

Il n’y a pas d’abonnement payant. Il n’y a pas vraiment de publicité, mais il y a quand même une intégration des marques sur ça. Dans ces cultures-là, c’est plus normal. Peut-être que c’est aussi une question générationnelle.

Sur les jeux vidéo, par exemple, ce qu’on appelle les free-to-play ou les freemium, tout le monde n’achète pas des objets. Par contre, certains qui achètent des objets, achètent beaucoup d’objets. C’est un peu comme dans le jeu PMU et tout ça. Il y a des gens qui sont des très gros joueurs, qui investissent énormément, il y en a d’autres qui jouent de temps en temps, qui investissent, mais en réalité, ça représente quand même des sommes qui sont assez colossales.

Anthony Macare
C’est, je pense, beaucoup plus générationnel que culturel. En allant cibler les plus jeunes, sur ce type d’économie, je pense qu’il y a une attente. Il y a un mode de consommation qui est déjà établi, on le voit bien dans les jeux vidéo. C’était le cas de quelques exceptions, il y a quelques années. Maintenant, c’est vraiment le modèle économique principal du jeu vidéo, c’est l’achat de contenu additionnel qui est souvent un objet virtuel cosmétique. On est déjà dans cette économie-là, notamment dans les jeux vidéo. C’est pas le modèle économique unique du jeu vidéo, mais aujourd’hui, c’est une grosse partie du marché du jeu vidéo qui repose sur cette vente d’objets virtuels.

Les nouvelles générations aujourd’hui sont très demandeuses de ce type de produits digitaux.

Valentin Blanchot
Si on veut aussi amener des objets qu’on a peut-être achetés [inaudible 00:31:45] est-ce qu’on risque pas… Je me projette, l’idée me vient spontanément, mais est-ce qu’on risque pas aussi d’avoir peut-être une option à l’achat quand on achète un objet d’une marque de luxe ? Un sac Dior, une montre Breitling qui travaille avec une plateforme qui s’appelle Arianee, qui permet d’avoir un objet numérique, un jeton NFT pour suivre un peu toute la vie de sa Breitling. Avec ce jeton-là, ce qui authentifie et ce qui certifie notre achat, est-ce qu’on risque pas aussi d’avoir parfois des modèles pour les grandes marques, et peut-être après, ça va être très généralisé aux marques grand public ?

Avec une option où on peut acheter une version virtuelle de cet-objet-là, pour la réutiliser aussi dans le métavers, ce qui permet d’alimenter un petit peu le modèle économique du média. Si des gens ne sont pas prêts à s’acheter des propres objets et des choses qui sont vraiment faites pour cet univers-là, elles veulent retrouver leur propre univers, des objets qu’elles possèdent déjà, ce qui permet aussi de s’affirmer en termes de design. On choisit pas, telle skin Fortnite versus telle autre sans raison.

Est-ce qu’il n’y aura pas aussi cette vraie transformation, un petit peu du monde réel dans le monde virtuel. Au bout d’un moment, si on a un casque ou des lunettes, si on reste vraiment sur cette idée-là, et qu’on a plus d’écrans de télé, on a plus de télévision, quelle marque on va acheter ? Quel PC on va acheter si on veut jouer ou on veut avoir un écran de marque Asus, ou je ne sais plus quelle autre marque ? Il y aura peut-être aussi un besoin d’amener des marques et de les pousser aussi là-dedans, qu’on n’achètera pas directement dans le metaverse, mais qu’on aura peut-être aussi en option à l’achat.

On part très loin, on n’est pas encore sur du concret, mais est-ce que ça vous semble quelque chose de probable ou est-ce que c’est hautement improbable ?

Mathieu Flaig
Ça a déjà existé. Il y a déjà des marques qui, en vendant des objets physiques, proposaient leur équivalent, ça pourrait être un skin dans tel ou tel jeu. Il y a déjà eu des choses qui ont été testées par rapport à ça. Quand on parle des objets virtuels qu’on peut aussi acheter ou collectionner, on parle bien sûr aussi des NFT, en ce moment. Ça fait un peu plus d’un an, qu’il y a de l’excitation aussi sur le sujet.

Un peu comme les crypto de manière générale, l’idée, c’est plutôt d’augmenter son capital et de revendre. Et puis, il y a aussi des énormes frais qui sont liés. Par exemple, le NFT, aujourd’hui, il y a ce qu’on appelle les « gas fees », qui sont en fait, quand on va acheter, par exemple, un objet qui va coûter un dollar, il faut payer les frais de la blockchain et un objet d’un dollar peut coûter 101 dollars aujourd’hui.

Il y a aussi des sujets de : si un moment donné, on achète des objets virtuels via, par exemple, la blockchain, comment est-ce qu’on gère aussi ça, qui fait que c’est un énorme blocage ? Aujourd’hui, il y a des gens qui font beaucoup d’argent. Hier, je déjeunais avec un ami qui me disait : « Là, j’achète un appartement et j’ai dû vendre deux NFT pour payer 20 pour cent de mon apport ». J’ai trouvé ça incroyable. Je me suis dit : « C’est très 2021 ». Lui est dans ça, et d’ailleurs, il me disait aussi : « On a un studio RVR et en fait, on veut le rebrander en studio metaverse ».

Il est totalement juste par rapport à ça, au bon moment et autres. Il y a beaucoup d’éléments qui existent aujourd’hui, mais est-ce que ça va être simple ? Est-ce que ça va être efficace ? Est-ce que tout un chacun peut comprendre le sujet en dehors des technophiles qu’on peut être autour de cette table ou des personnes qui sont déjà dans les sujets crypto, dans le gaming et autres ?

Parce que le but de Facebook ou de n’importe quel GAFAM, c’est quand même de toucher un maximum de personnes, que ce soit dans le B2B ou dans le B2C. Si la compréhension du sujet n’est pas claire, si ce n’est pas simple, si on ne comprend pas exactement ce qu’on doit y faire, ce qu’on peut acheter, tout ça, ça va être un petit peu dur. Si à un moment donné, on passe plus de temps dans ces univers virtuels, on voudra avoir des choses pour être cool dans cet univers virtuel ou pour montrer un certain statut et ce genre de choses, se dire : « Moi, je vais faire ma réunion virtuelle dans un univers virtuel qui, par exemple, appartient à Microsoft, et je vais m’acheter un nouveau costume parce que mon costume, il m’ennuie un peu.

Et puis là, j’ai une grosse présentation avec mes petits avatars virtuels clients et j’ai besoin de représenter ». On se dit : « C’est virtuel, du coup, ça a peut-être moins de sens ou moins d’intérêt ».

Si on parle du jeu vidéo World of Warcraft, par exemple, il y a énormément de gens qui ont passé du temps dedans, se sont fait des vraies amitiés. Il y a des gens qui se sont mariés, il y a des gens qui, dans la vraie vie, ensuite ont eu des bébés. En fait, c’est réel. Faire cette différence entre réel et virtuel n’est pas très 2021, parce qu’en réalité, on est déjà immergé dans une partie de virtuel, même si ce n’est pas au point où veut nous emmener un Facebook, par exemple.

Anthony Macare
Les marques se positionneront forcément. Les plus novatrices se positionneront d’abord pour cette image de modernité, pour faire de l’exploration, pour faire de la communication. Et puis, il y aura tout un tas de modèles économiques qui viendront. Ils seront 100 pour cent digitaux, ils seront hybrides physique/digital. En tout cas, les marques chercheront à rentrer dans ces univers-là. À partir du moment où il y a une audience, où leurs clients utilisent et sont présents dans ces univers-là, les marques chercheront à se positionner et à offrir des produits et des services.

Est-ce que ça deviendra un « mass market » ? Est-ce que ça restera pour les « early adopters » et pour quelques marques un peu techno ? Je pense que, comme pour les utilisateurs, ça dépendra de quelle est la barrière à l’entrée. Est-ce que la barrière à l’entrée, c’est simplement d’acheter un device à 100 euros pour pouvoir y aller ? Ou est-ce que la barrière à l’entrée, ce sera de devoir investir dans un casque de réalité virtuelle avec des gants, une combinaison, qui coûteront des milliers d’euros, qui devront être connectés en haut débit mobile en permanence ? Il y a un certain nombre de contraintes techniques et de barrières à l’entrée qui feront que les marques iront massivement ou pas.

Mathieu Flaig
Je pense que certaines marques, d’ailleurs, le comprennent tout de suite, parce que moi, en septembre 2020, j’ai été briefé par le directeur e-business d’un grand groupe de produits de consommation. Son sujet, c’était : il y a 350 millions de personnes sur Fortnite, ce sont des personnes qui ne passent pas du temps ailleurs, potentiellement. Comment est-ce qu’on fait pour leur parler ? Comment est-ce qu’on peut intégrer ? On avait fait une présentation pour tous les responsables marketing de toutes les entités de ce groupe pour leur dire : « Voilà l’état de ce qu’est aujourd’hui le sujet du métavers. Voilà ce qui est fait par différentes marques sur plein de sujets différents.

Et voilà les opportunités que vous pourriez avoir ». Le fait qu’ils se posaient déjà les questions il y a un an, je trouve ça très intéressant, parce que c’est vraiment un très gros groupe agro-alimentaire et ils ont un intérêt par rapport à ça.

Sur le sujet de : comment est-ce que les marques y arrivent ? Je pense que c’est la même chose que sur toutes les actions de communication. Tu parlais, par exemple, du fait que les marques vont arriver, certaines vont vouloir faire un peu un coup RP, donc un coup de relations presse ou de relations publiques. Ça, c’est intéressant, mais ça n’a qu’un temps et c’est les premiers, entre guillemets, qui vont récolter les fruits en disant : « On a été les premiers à faire telle chose dans le metaverse, à faire telle interaction ».

Si on reprend un peu les bases de la communication, il faut d’abord se poser la question : c’est quoi les objectifs ? Est-ce que je comprends assez les codes de la plateforme ? Est-ce que je les respecte assez pour faire quelque chose qui soit efficace et surtout qui soit pérenne ? Je trouve que les marques, souvent, quand il y a un buzz, type le metaverse, type les chatbots et tout ça, se posent pas assez cette question. Ils vont tête baissée et à un moment donné, ils relèvent la tête en disant : « On a dépensé beaucoup d’argent et l’impact n’a pas été forcément incroyable. Certes, on a eu des retombées, mais voilà ».

Qu’elles se posent dès le début les bonnes questions par rapport à ça, moi je trouve que ce serait rassurant sur l’intégration de ces nouveaux univers virtuels, et de se poser aussi la question de : « Ça veut dire quoi, ma marque en trois dimensions ? Ça veut dire quoi, ma marque dans un univers qui est virtuel ? Parce que je vois très bien ce que ça donne sur une affiche, sur du social media, mais qu’est-ce que c’est, ma marque à l’intérieur d’un Fortnite, d’un métavers de Facebook ? ».

Anthony Macare
Je pense qu’il y a effectivement une question à se poser sur la manière d’intégrer ces univers-là et la raison pour laquelle on y va et quelle est la stratégie derrière. Ce qu’il faut bien percevoir, c’est que la barrière à l’entrée, technologique, là aussi, elle sera beaucoup plus forte. Aujourd’hui, ouvrir un réseau social pour une marque, c’est quelques lignes de texte et une image. Demain, aller dans un environnement 3D en offrant des expériences un petit peu avancées, le coût à l’entrée sera absolument plus le même.

Il faudra du développement, il faudra des développeurs 3D, qui sont pas si nombreux sur le marché et qui sont très recherchés. Je pense que la barrière à l’entrée, là aussi technologique, technique, pour les marques, elle sera beaucoup plus forte. Elle demandera un niveau d’expertise beaucoup plus important que celui qui est nécessaire aujourd’hui pour aller sur le web.

Mathieu Flaig
Peut-être juste sur cette barrière, je me suis beaucoup intéressé au sujet réalité augmentée, réalité virtuelle, j’ai dû commencé vers 2008. Au début, c’était très compliqué. Il fallait un gros ordinateur avec une webcam, avec ce qu’on appelait des marqueurs, pour pouvoir faire apparaitre quelque chose, et c’était pas du tout simple. Le jour où Snapchat a racheté une boite en Europe de l’Est pour commencer à faire des filtres de réalité augmentée, déjà, ça a commencé à ouvrir la réalité augmentée à différentes personnes. Surtout depuis qu’autant Instagram que Snapchat ont développé des sortes de studios en ligne qui permettent de créer des filtres, on est passé de : « Un filtre en création, ça va vous coûter 50 ou 60 000 dollars » à « Vous avez la possibilité de le faire vous-mêmes, vous avez des tutoriels pour les faire vous-mêmes ».

C’est vrai que ça va prendre du temps, mais je pense qu’on peut aussi avoir un écosystème et surtout des sortes d’outils qui vont être développés par ces plateformes en se disant : « On va vous mettre différents blocs et vous allez aussi pouvoir construire votre univers virtuel », comme ça s’est fait à l’époque d’ailleurs sur Second Life.

Quand des partis politiques, en 2007, ou des entreprises comme Areva, à l’époque, ont créé leurs îles, ils ont créé différents assets avec des graphistes et autres, mais ils avaient aussi des blocs qui étaient fournis par la plateforme et qui leur permettaient de construire quelque chose. Ça ne veut pas dire que c’est idéal et parfait, mais en tout cas le fait de faciliter l’intégration dans ces mondes, je suis sûr que des plateformes comme Meta ou comme TikTok, par exemple, si à un moment ils se lancent sur le sujet du métavers, vont le faire pour faciliter ça, parce qu’il y aura un besoin d’accélération. Si effectivement, il y a ce blocage technique, ça va freiner beaucoup de marques s’il n’y a que les très grosses marques qui vont y aller et avec une question du retour sur investissement de ces marques en disant : « Est-ce qu’on n’a pas trop investi par rapport à ce que ça nous rapporte ? »

Grégoire Levy
On parle beaucoup des jeux depuis un moment, on a parlé de Fortnite, on a parlé de World of Warcraft, que Valentin connaît bien, d’ailleurs, je crois.

Valentin Blanchot
Beaucoup de jours de jeu, voire même plusieurs années, je crois, accumulées.

Grégoire Levy
C’est une transition un peu toute trouvée, mais pour parler un peu aussi des jeux, on en parle depuis le début de cette émission, c’est un aspect hyper important du métavers ou des métavers. Question bête, mais un peu bateau : est-ce que le métavers, c’est un peu l’avenir au final du jeu vidéo ou du jeu tout court même ? Anthony, est-ce qu’on en parle peut-être un peu plus du métavers chez Bandai ?

Anthony Macare
Le métavers, non, parce que c’est encore tout frais comme terminologie. En revanche, dans l’univers du jeu vidéo, l’engagement avec les communautés, aujourd’hui et depuis très longtemps, ça a toujours été la priorité. C’est un enjeu important pour fidéliser. Ces environnements persistants, c’est quelque chose sur lesquels on travaille au quotidien. Dans un métavers spécifique qui est le jeu, avec un univers dédié, parce que c’est ce que recherchent nos communautés. Oui, dans le jeu vidéo aujourd’hui, les environnements persistants, que ce soit sur des jeux massivement multijoueurs ou non, mais en tout cas des environnements persistants et l’engagement de nos joueurs dans ces environnements-là, effectivement, c’est le quotidien.

Grégoire Levy
Mathieu, est-ce que c’est l’avenir du jeu, le métavers ?

Mathieu Flaig
Ce qui est sûr, c’est que le jeu sera intégré dans ce métavers. Si on se dit que le métavers est l’équivalent de notre monde réel, à l’intérieur du métavers, il y a plein de choses. Il y a la possibilité de parler à des gens, il y a la possibilité de jouer, il y a des possibilités de se déplacer, il y a des possibilités d’aller au travail, de faire des réunions, donc oui. On parle aujourd’hui beaucoup du jeu vidéo, parce que : où sont les grands bassins d’audience actuellement ?

Typiquement, c’est du Fortnite, tout à l’heure, on parlait de Roblox, on va parler de Minecraft et de ce genre de choses. C’est des endroits où il y a beaucoup de personnes qui sont connectées. Tout comme, par exemple, sur les réseaux sociaux, il y a beaucoup de personnes qui sont connectées. On va chercher là où il y a le plus de personnes dans des univers virtuels pour aussi les intégrer dans cette future logique qui sera le métavers.

On parle beaucoup du jeu vidéo parce que c’est aussi des univers qui sont générés artificiellement, générés par des machines, que derrière, il y a des vrais humains qui interagissent avec des avatars, tous les éléments qu’on a dit avant. C’est logique de relier ça au jeu vidéo, mais on pourrait se dire aussi : est-ce que Fortnite, par exemple, est un jeu vidéo seul ? Non, on a vu que c’était aussi une plateforme sociale. C’était quelque chose qui était devenu plus large. Ce qui ressemble le plus aujourd’hui, peut-être, à un métavers, c’est typiquement un Fortnite, mais augmenté de plus de choses que ce qu’on vit dans la vraie vie, pas simplement, se poser pour un café.

Une entreprise que j’avais accompagnée, par exemple, je leur avais dit : « Quand on va dans un café virtuel dans Fortnite, est-ce qu’on ne peut pas prendre telle marque de café, la payer, s’acheter un truc virtuel comme ça ? » Il y a plein de choses qui peuvent être imaginées. C’est se dire, on ne passe pas H24 de notre temps à jouer aux jeux vidéo, notre vie est plus globale. Peut-être qu’on joue beaucoup aux jeux vidéo, mais dans ces univers, on va faire différentes choses, dont du jeu.

Grégoire Levy
Que ce soit pour les jeux vidéo ou non d’ailleurs, ou pour tout ce qu’on peut faire d’autre, il y a aussi la question, on l’a un peu évoquée avant, de l’accessibilité, du prix, notamment des équipements qu’il va falloir se procurer pour jouer ou pour même aller prendre un café virtuel. Est-ce que vous pensez que ça va être accessible en termes d’équipement, par exemple ?

Valentin Blanchot
Il y a déjà plusieurs équipements ouverts pour jouer sur un PC, pour jouer sur une PlayStation, etc. Est-ce que le metaverse, si on relit tout à ça, ne va pas aider à pousser aussi, à amener plus d’expériences immersives ? Ou est-ce que finalement, ça n’arrive pas au bon moment et qu’il y a déjà des développements et des tests de technologies pour apporter plus d’immersion dans le jeu vidéo ? Tu en parlais, tout à l’heure Mathieu, avec des combinaisons, des gants, il y aura aussi des casques en réalité virtuelle qui seront plus aboutis, moins fatigants aussi, je pense, d’un point de vue ergonomique.

Est-ce que finalement, ça ne va pas démocratiser un petit peu plus l’expérience immersive ? Si on parle vraiment de se projeter dans un univers où, effectivement on va avoir deux volets, au-delà de l’immersion, il y a surtout le côté d’un monde ouvert, un endroit dans lequel on peut se retrouver. Vraiment, on a ces deux-là, où la notion d’équipement, on n’a pas besoin d’avoir un gros équipement pour jouer à Fortnite. Par contre, si on a envie de se projeter dans un univers, sur une nouvelle licence ou un jeu qui va vraiment nous emmener très loin, on aura peut-être besoin d’un gros équipement et là, on ira très loin. Est-ce qu’on est vraiment sur uniquement ces deux spots-là ?

Ou est-ce qu’on risque d’avoir encore d’autres petits ponts entre les deux ?

Mathieu Flaig
L’équipement seul n’a pas vraiment d’intérêt dans le sens où, aujourd’hui, on est tous prêt à mettre des centaines, voire 1 000 euros dans un téléphone. On pourrait se dire : « C’est incroyable, j’aurais jamais mis autant d’argent, il y a 15 ans, peut-être, dans un téléphone ». Pourquoi est-ce qu’on le fait ? Ce n’est pas parce que c’est seulement un téléphone qui fait de belles photos. Par exemple, l’iPhone est très cher, mais ce n’est pas celui qui prend les meilleures photos.

Ce n’est peut-être pas celui qui est le plus abouti par rapport à d’autres concurrents. Par contre, quelle est la force de l’iPhone le jour où il est lancé ? C’est qu’il y a l’App Store et que dans l’App Store, il y a la possibilité d’avoir accès à différents services et que ces différents services rendent accros les gens.

Ce matin, j’ai vu une vidéo qui parlait de TikTok et qui expliquait comment est-ce que l’algorithme était fait, tout ça, et comment est-ce qu’on pouvait capter l’attention des gens. Le smartphone est pensé via les différentes app et tout ça, uniquement, principalement pour capter l’attention des gens et pour garder leur intérêt. Si derrière on a un device, peu importe lequel, et qu’on propose une expérience immersive qui rend un peu accro, toutes les personnes qui vont le tester vont avoir envie d’acheter le device ou n’importe quel device qui permettra de se connecter.

Aujourd’hui, ce n’est pas vraiment le cas .Quand on fait tester un casque de réalité virtuelle, parfois, il y a des expériences qui sont super, parfois, il y a des expériences où les gens vont se dire : « C’est cool. J’aurais testé la réalité virtuelle ». Je pense que le risque qu’il peut y avoir avec le métavers c’est : « C’est cool. J’aurais testé, c’était sympa » et qu’il n’y ait pas un intérêt très fort, comme il a pu y avoir aux débuts de Facebook, par exemple, en France en 2007, où il y avait un peu ce côté nouveau, connexion.

On allait en voyage, une personne qu’on rencontrait, c’est : « Je t’ajoute sur Facebook». Ça n’arrive plus aujourd’hui parce qu’on s’ajoute autrement. On va s’ajouter sur WhatsApp, sur Telegram et autres.

À quel point est-ce que les gens vont être un petit peu quand même accro dans ce qui peut être proposé dans cet univers ? Le device, c’est un sujet, mais on voit qu’on peut mettre aujourd’hui beaucoup d’argent dans les devices pour se connecter déjà à Internet à différents réseaux sociaux. Et après, c’est : qu’est-ce qui est proposé derrière, qui mérite que je mette de l’argent dans ce device pour me connecter à quelque chose qui est à minima, cool, voire incroyable ?

Anthony Macare
Pour remettre ça dans une temporalité, s’il faut équiper les deux milliards d’utilisateurs de Facebook pour les envoyer dans le metaverse et atteindre la même audience, ça va prendre quelques années dans un contexte de rupture de composants, dans un contexte de réchauffement climatique et d’économies d’énergie sur les ressources. Or, le metaverse présenté par Facebook semble être ultraconsommateur de ressources de par sa complexité et le fait qu’il y ait beaucoup de choses en 3D et énormément de calculs derrière.

Je pense que c’est plutôt une question de temporalité et de priorité pour les entreprises au niveau mondial. Est-ce qu’on aura la capacité de consommer cette énergie-là ? Est-ce qu’on aura la capacité de créer tous ces nouveaux devices avec la rareté de minerais, avec les complexités qu’il y a actuellement sur les composants qui sont de plus en plus rares et recherchés ? Je pense qu’il y a une vraie problématique autour de ça.

Grégoire Levy
Tu viens de parler justement du contexte de pénurie, justement une pénurie qui vient en partie de la demande qui a explosé avec notamment la pandémie, dont on est pas encore sorti. Justement, cette pandémie, elle a amené à un chamboulement aussi dans le monde du travail, avec du télétravail, du travail hybride. Est-ce que le métavers a un avenir dans le monde du travail et surtout avec cette période de pandémie qui force un peu le travail à distance ? Valentin ?

Valentin Blanchot
Difficile à dire. Moi, dans ce que je vois, et si je dois commenter ce que j’ai vu aussi, dans ce qu’a montré Microsoft, et que je me projette aussi avec toute la typologie de personnes avec qui je suis amené à échanger dans le cadre de mon travail, je pense que tout le monde n’ira pas dedans, mais ce sera une question de choix. C’est ce qu’a bien aussi montrer Microsoft dans la vidéo de présentation. Il y a des personnes qui se connectaient avec leur webcam de manière très classique sur Mesh et qu’il y avait d’autres qui étaient juste avec un avatar en 2D, il y en avait un autre qui était totalement virtualisé, avec un vrai avatar en 3D qui bougeait, etc.

Est-ce qu’il a un avenir, oui, mais est-ce qu’il sera beaucoup utilisé, pas forcément. Il y avait aussi des environnements virtualisés créés pour Accenture, notamment. Accenture, qui avait en plus, on n’en avait parlé il n’y a pas très longtemps sur Siècle Digital, acheté, je crois, 60 000 [inaudible 00:51:55], ils ont parlé d’éducation. Est-ce que créer un monde virtuel pour l’entreprise alors qu’on bosse depuis chez soi, ce ne sera pas trop ? Est-ce qu’on sera prêt à y passer 35 heures ? Je crois qu’on va essayer aussi d’en parler, d’aborder un petit peu ces points-là ensemble, mais je le trouve difficilement généralisable dans le monde du travail. De toutes façons, tous les métiers n’étaient pas prêts aussi à télétravailler, donc tous les métiers ne seront pas prêts aussi à faire des réunions dans le monde virtuel.

Est-ce qu’on sera aussi efficace en réunions ? Déjà qu’on a des réunions où parfois, on passe une heure à discuter d’un truc qui en cinq e-mails aurait été fait. Est-ce qu’en étant dans un environnement virtualisé, on risque pas encore plus d’avoir une notion peut-être d’amusement ou de non-sérieux et de s’éloigner un peu du sujet. Il y a une question de productivité un petit peu. Je pense que ça va être difficilement généralisable, mais ça peut avoir un intérêt dans certains cas.

Anthony Macare
Je pense que ça peut avoir un intérêt dans ce contexte-là, par le côté présentiel qui est pas forcément disponible en vidéo où on est vraiment via écrans interposés. Je pense que ce côté présentiel et interaction et sociabilité un peu plus forte, c’est ce qui a manqué pendant le confinement, c’est ce qui a manqué et ce qui manque encore dans le télétravail. C’est qu’on est vraiment très éloigné des autres. On a les moyens de communiquer avec eux. C’est assez artificiel, il faut prendre rendez-vous, il faut se fixer une date, donc la discussion de la machine à café, c’est un petit peu loin.

On a besoin de ce lien-là, on a besoin de se maintenir là… Si on regarde les côtés négatifs du confinement dans le monde professionnel, on a vu qu’on pouvait continuer à fonctionner ensemble très bien avec des gens qu’on connaissait depuis longtemps, mais le lien social a manqué. Ça peut rajouter, je pense, du lien social. Ça peut faciliter les échanges et rajouter une dimension présentiel dans un contexte d’échanges professionnels. Est-ce que ce sera en permanence ou est-ce que ce sera ponctuel, dans le cadre d’une prise de rendez-vous, d’une réunion, d’un salon ?

Ça, je ne sais pas. Ce que je peux dire en revanche, c’est que, vu notre capacité à supporter le masque toute la journée, supporter un casque de réalité virtuelle ou des lunettes connectées toute la journée, ça me semble aussi assez présomptueux.

Mathieu Flaig
Sur ce sujet, il y a différentes choses. Déjà, on parle du Covid. Tout le monde se met d’accord sur le fait que le Covid a été un accélérateur de transformation pour beaucoup d’entreprises. Moi, je l’ai vu, par exemple, dans mon entreprise où à la sortie du premier confinement, on a beaucoup d’entreprises qui se posaient la question de se transformer et d’accélérer tout ça, qui ont commencé à faire des appels d’offres, à se lancer sur le sujet. Il y a eu aussi la volonté de se dire : « On ne peut pas se rassembler physiquement, comment est-ce qu’on arrive à faire des séminaires ?

Comment est-ce qu’on arrive à faire des événements ? » Il y a eu des tentatives d’événements virtuels. Moi, par exemple, j’avais participé à Laval Virtual. Laval Virtual, à la base, c’est un salon de réalité virtuelle qui se passe à Laval, et ils ont fait une sorte d’île virtuelle dans laquelle on pouvait faire des conférences, chacun avait son avatar. Ils ont quand même réussi à rassembler à l’époque 16 000 personnes dans cet univers virtuel, mais sur une population qui est particulièrement adepte de réalité virtuelle et de technologies.

Si on se pose la question de: c’est quoi aujourd’hui le côté numérique dans les entreprises ? Moi, je fais du conseil en transformation numérique pour pas mal de boîtes, et l’arrivée du confinement, le télétravail et tout ça, a impliqué l’arrivée des outils collaboratifs. Beaucoup d’entreprises sont passées notamment sur Teams avec Microsoft, certains sont passées sur Zoom. Beaucoup de discussions par rapport à ça. Si on prend juste Teams, qui est une plateforme qui permet d’avoir des éléments collaboratifs, de partager des fichiers, de faire de la visio, la plupart des gens ont quand même une forte résistance au changement par rapport à ça. En fait, ils sont un peu stressés, ils n’osent pas forcément se mettre dans le sujet et ça prend du temps.

Moi, aujourd’hui, je travaille beaucoup dans mes missions sur l’accompagnement au changement de l’intégration de ces nouvelles façons d’échanger sur le numérique, et je n’imagine pas à moyen terme, que ces gens qui déjà ne veulent pas utiliser du Teams ou l’utilisent difficilement, puissent se dire : « Maintenant, on va faire toutes les réunions dans un univers virtuel ».

Par contre, le faire de façon événementielle, lors d’un salon, lors d’un événement qui rassemble beaucoup de gens parce qu’on parlait justement de l’impact environnemental, on prend moins l’avion et peut-être pour cette heure de réunion, on n’a pas besoin de faire un jour de trajet, là, il y a un intérêt. Se dire aussi, c’est un peu sexy, c’est un peu nouveau, c’est un peu intéressant. Quelque chose qui est peut-être anecdotique, mais j’ai pas mal de clients qui, quand ils font de la visio, ne veulent pas mettre leur webcam.

Ça les stresse. Ils ne sont pas habitués, ils n’ont pas envie de se regarder. Des fois, ils font sept heures de zoom pendant la journée et ils en ont marre de montrer leur tête. Alors que si je suis dans un univers virtuel avec un avatar virtuel, c’est moi qui suis représenté, mais c’est pas totalement moi. Je pense qu’il y a aussi un peu ce côté potentielle prise de recul en se disant : « Je participe à quelque chose en tant qu’une identité que j’ai choisi et en tant qu’un avatar et je suis à l’aise avec le sujet plutôt qu’avec mon être habituel que je n’ai pas envie de montrer en webcam».

Grégoire Levy
Est-ce que c’est une question de génération aussi, peut-être, cette difficulté face au changement par rapport à Teams, etc. ?

Mathieu Flaig
Je mets en place ce qu’on appelle des baromètres de confort numérique, dans les entreprises, où on pose la question aux gens de : est-ce qu’ils sont à l’aise avec tel ou tel outil ? On pose aussi en introduction la question du métier et des générations. Dans tous les baromètres qu’on a pu mettre en place, c’est pas du tout un sujet de génération. C’est un peu comme se dire : « Les gens de la génération Y, les millenials, les baby boomers, ils sont comme ça ». Non, les gens sont différents.

Certes, il y a un peu des « trends », des tendances qui peuvent émerger par rapport à ça, mais c’est plus une question de développement personnel, de curiosité, d’aptitudes justement à se dire : « Le monde a changé » et d’envie d’avancer. Dans les entreprises, de manière générale, je trouve assez triste que les gens perdent souvent leur curiosité ou leur passion, parce que le fait de ne pas avoir de curiosité fait que, justement, on va attendre une formation pour nous expliquer comment fonctionne Teams, alors que Teams n’est pas un outil qui est très compliqué. Si on clique un peu sur les différents onglets, on peut comprendre comment ça fonctionne.

Il n’y a pas très longtemps, j’échangeais avec un client qui me disait : « Je ne comprends pas que dans la vraie vie, la plupart de mes collaborateurs aient compris du jour au lendemain l’intérêt d’avoir Zoom, l’intérêt d’utiliser un WhatsApp, l’intérêt d’utiliser tous ces outils numériques lors des confinements, mais que quand je leur propose des outils numériques pour travailler entre nous dans l’entreprise, ils me disent : « On n’a pas été formé. Non, on comprend pas » ». Il y a quand même un peu ce côté : dans la vraie vie qu’on doit survivre, entre guillemets, on arrive à trouver des solutions et dans l’entreprise, parce qu’on est un peu habitué à être accompagné, bordé, c’est un peu plus dur.

Anthony Macare
Je pense qu’il y a un gros écueil culturel là-dedans. J’imagine que tu travailles beaucoup avec des entreprises françaises ?

Mathieu Flaig
C’est le cas.

Anthony Macare
Pour te contredire sur un point et sur l’adoption, je pense que c’est aussi lié aux interfaces et à l’expérience utilisateur. Nous, on travaille beaucoup avec Teams, avec Microsoft 365, c’est pas forcément très fluide, c’est pas forcément très facile d’accès. De même que l’iPhone a révolutionné l’usage du mobile avec des interfaces très simples, que des enfants d’un ou deux ans étaient capables d’aborder et de comprendre immédiatement, je pense que la réalité virtuelle ou la réalité augmentée ou le métavers, pourraient amener des usages qui sont beaucoup plus naturels et fluides et qui donc permettraient une adoption beaucoup plus simple du plus grand nombre.

Sur la partie Avatar, je trouve ça intéressant aussi, parce qu’effectivement, il y a la notion de la réalité virtuelle ou de monde digital, dans lequel on peut se projeter avec sa propre image, mais aussi avec une image différente, idéalisée, qui pourrait, via les technologies disponibles, refléter parfaitement ou quasi parfaitement ses émotions.

Chez Bandai Namco, on a investi 3 millions de dollars l’année dernière dans une startup américaine qui s’appelle Genies, qui, justement, crée des avatars en 3D. Dans les jeux vidéo, les avatars, ça existe depuis longtemps et on est convaincu qu’effectivement, il y aura besoin d’une image dans un monde virtuel, dans un monde digital qui pourra être différente de celle du quotidien et qui permettra de prendre énormément de libertés ou d’adapter son image en fonction du contexte, comme aujourd’hui, on va changer de tenue en fonction du contexte professionnel, sportif du quotidien.

Je pense que ça, c’est un élément aussi important : quelle image on va vouloir renvoyer dans cet univers.

Valentin Blanchot
C’est vrai que c’est assez rigolo, d’ailleurs. On a parlé des avatars tout au long, mais depuis les tous premiers jeux vidéo, on pouvait créer un skin sans trop se poser de problème, choisir la couleur de peau, le genre du personnage, la coiffure, la pilosité et tout ce qu’on voulait, avec des niveaux très aboutis pour certains jeux. Ce n’est pas Mass Effect ? Je sais plus, je n’y ai pas joué encore, mais je crois que c’est celui qui proposait le plus de plus de choses. Cyberpunk aussi proposait quelque chose d’assez abouti avec quelques frasques.

Est-ce que l’avatar, finalement aujourd’hui, c’est un peu : le skin qu’on avait dans le jeu vidéo, on va essayer de le retransposer dans le monde du travail. J’essaie de me projeter, mais est-ce qu’on va autoriser les gens d’avoir des choses qui sortent du corporate. Est-ce qu’on ne veut pas venir déguisé ou est-ce qu’on va vraiment essayer d’avoir un avatar virtuel qui va vraiment représenter l’autre. Dans vos entreprises respectives, imaginez que vous faites un Teams sur Mesh ou un autre logiciel de visio qui propose la même chose. Est-ce que ça vous poserait un problème si votre N+1 ou un de vos collaborateurs a une tête de nounours, au lieu d’avoir un espèce de truc qui lui ressemble un petit peu.

Mathieu Flaig
Moi, ça m’est déjà arrivé parce que j’ai notamment une de mes consultantes qui aime bien utiliser… En fait, on peut plugger la Snapchat Camera notamment, sur les Zooms [diaphonie 01:02:30]. Je t’ai déjà vu avec différentes têtes, un peu en décalage. Je trouve intéressant de voir que dans la vidéo de Meta, du metaverse, Mark Zuckerberg, il n’a pas cherché à se faire un avatar particulier. Il s’est juste représenté lui-même. Est-ce que ça veut dire aussi qu’il est un peu tristement sans créativité ou sans envie de quelque chose ? Il s’est représenté plus jeune, peut-être un peu mieux galbé, je ne sais pas, mais il aurait pu proposer un truc plus fou et ça aurait peut-être rajouté un peu de sympathie à ce qu’il est, en disant : « Tiens, tu rêves de quelque chose d’autre que toi ».

Valentin Blanchot
Peut-être un peu moins reptilien aussi. Tu fais un peu moins peur. Peut-être, l’univers aussi et le domaine et le secteur s’y prêtent plus. Il y a la culture d’entreprise aussi qui joue forcément.

Anthony Macare
Effectivement, le secteur s’y prête plus. On n’est pas le seul secteur, mais je pense qu’effectivement, on a un secteur qui est assez inclusif, sur lequel on peut se permettre beaucoup plus de choses que dans d’autres secteurs, qui sont historiquement un peu plus fermés, où les codes sont un petit peu plus marqués. Je pense que dans le quotidien d’une société de jeux vidéo, ça serait pas choquant. Où est-ce qu’on met les limites ? Est-ce qu’on peut arriver en nounours dans une réunion ?

Je pense que ça dépend du sujet de la réunion. Si c’est une réunion créative, pourquoi pas . Si c’est une réunion financière, je pense que ce serait un petit peu plus difficile à percevoir ou à comprendre. Oui, c’est quelque chose qui est envisageable dans notre univers. C’est une question de contexte et d’acceptation de chacun.

Grégoire Levy
J’ai une autre question qui me vient aussi, on parle de la transformation digitale, je pense que Mathieu, tu vas pouvoir bien nous en parler. Est-ce qu’on doit percevoir ça, le metaverse ou ces univers, etc., comme un élément d’une transformation digitale ? Comme certaines personnes sont outillées et sont équipées aussi de solutions de travail collaboratif pour pouvoir mieux travailler à distance, etc. Est-ce qu’il faut le voir vraiment comme un outil de transformation ou comme une couche supplémentaire pour un point qui est finalement pas si important pour le monde de l’entreprise ? Ou est-ce qu’on verra ça comme un élément un peu plus fédérateur ?

Mathieu Flaig
Quand on parle de transformation au numérique ou au digital en fonction de l’école qu’on a envie d’avoir par rapport à ça, le sujet de la transformation, ça veut dire souvent : on a pris du retard et on a besoin de se transformer. On a besoin d’accélérer en termes d’expérience client, en termes d’expérience collaborateurs, en termes d’IT, de tous ces éléments. Pour moi, la transformation en tant que telle, normalement, on n’a qu’un temps. On lance une transformation et à la fin normalement, on est censé être transformé. Moi, dans mon cabinet, on parle plutôt d’accélération numérique et c’est intéressant parce qu’on parle de ça depuis trois ans et demi et depuis le Covid, tout le monde parle d’accélération, de la transformation numérique et tout ça.

Ce que j’explique souvent au client, c’est : il y a le côté transformation donc à un moment donné, on va devoir partir d’un point A pour aller vers un point B, mais par contre, le numérique ne va jamais s’arrêter.

C’est plutôt : quelle est votre capacité à être tout le temps dans l’adaptation par rapport à ça ? Par exemple, dans le conseil, on parle d’un monde VUCA, qui est volatile, incertain, complexe, ambigu. L’arrivée d’un sujet comme le métavers, comme plein d’autres sujets numériques sont des nouveaux blocs, et c’est la capacité des entreprises à avoir une culture qui est adaptative par rapport à ça, la capacité des gens à comprendre comment est-ce que ces nouveaux numériques s’intègrent dans leurs méthodes de travail, plutôt que, comme aujourd’hui, où à un moment donné, ils ont pris beaucoup de retard, à un moment donné, ils se disent : « Il faut qu’on appuie sur le champignon ».

S’ils sont dans une accélération constante et que chacun est aligné par rapport à leur culture et à comment est-ce qu’ils doivent aborder ces sujets, je pense qu’un sujet comme le métavers a totalement sa place, il sera intégré, tout comme d’autres. Parce que là, on parle de ça en particulier, il y a quatre ans, on parlait des chatbots, on a beaucoup parlé d’intelligence artificielle, énormément de sujets où à un moment donné, les gens savent plus exactement vers quoi se tourner. Si on est dans une logique de test, d’expérimentation et qu’au fur et à mesure, on commence à mettre des blocs et où l’organisation est capable d’absorber ce type de nouveauté, oui, ça a sa place.

Grégoire Levy
On arrive malheureusement à la fin de ce podcast, petit à petit.

Mathieu Flaig
Il faut bien.

Grégoire Levy
Il faut bien. Si je devais conclure en vous posant une ou deux questions, je vous demanderais d’abord si, au final, il faut avoir peur de ce métavers, de ces métavers ? Est-ce que c’est un danger ? S’il ne faut pas en avoir peur, est-ce que vous seriez prêt personnellement à plonger dedans, à sauter, à aller dans ce métavers et à prendre le parti de l’utiliser ?

Anthony Macare
En avoir peur, non. Je ne pense pas qu’il faille avoir peur de la technologie. Je pense qu’il faut rester pragmatique par rapport au métavers, par rapport à ce que ça représente et par rapport « buzz word » que c’est aujourd’hui. Ça sera un outil digital de plus qui permettra d’avoir des expériences potentiellement plus abouties dans certains domaines. À utiliser avec toutes les précautions d’usage en termes de confidentialité des données, en termes de réglementation aussi, parce que je pense que ça peut ouvrir des risques, comme ça pourra ouvrir beaucoup d’opportunités.

Je pense pas qu’il faille en avoir peur. Je pense que sur toutes les technologies, il faut être vigilant dans les usages qu’on en fera.

Grégoire Levy
Mathieu, faut-il en avoir peur de ce métavers ?

Mathieu Flaig
Je pense que ça dépend de quel côté on se place. Moi, je me suis toujours défini comme un technophile humaniste. J’adore la technologie, c’est ma passion. Je suis aussi très regardant sur l’impact que cette technologie peut avoir sur les humains. Ça fait plus de 10 ans que je m’intéresse aux technologies réalité virtuelle, réalité augmentée et autres. J’ai souvent dit : « Le jour où, par exemple, on pourra avoir des lentilles de réalité augmentée, le jour où on pourra avoir des lunettes de réalité augmentée, je serais le premier à en porter », tout comme j’ai porté des Google Glass, tout comme j’ai testé des casques et autres.

C’est le même sujet aujourd’hui pour moi que les réseaux sociaux. Aujourd’hui, il y a des gens qui utilisent les réseaux sociaux sans comprendre l’utilisation qui est faite de leurs données. Qu’est-ce qui peut-être récupéré, quelles informations ils devraient protéger ou pas. Et il y a des gens qui sont plus sachants, qui savent exactement quand ils postent quelque chose, quand ils font une interaction en ligne, quel est l’impact. Je pense qu’il y a aussi un sujet un peu d’acculturation pour les personnes, en leur disant : « Univers virtuel, oui, très excitant, il y a plein de choses à faire, mais prenez aussi un peu plus conscience de tout ce que ça inclut et tout ce que ça imbrique ».

Je pense qu’aujourd’hui, les gens ont peur du fait qu’on leur dit : « Attention, ces géants du numérique utilisent vos données, font énormément de choses et tout ça », mais c’est pas du tout nouveau. C’est pas les premiers à le faire. S’il y avait une meilleure culture de la donnée, une culture numérique de la part des gens, ils seraient sûrement plus apaisés par rapport à ça.

Il y a un peu deux camps qui s’opposent sur ces technologies type metaverse. Il y a des gens qui sont très technophiles et surtout, qui vont être très challengeants pour les entreprises comme Facebook, parce que quelqu’un comme moi qui va dire : « Votre truc n’est pas excitant et merci, j’ai pas trop envie ». Et puis, des gens qui vont être un peu stressés en disant : « Facebook, on m’a dit que c’était le diable et qu’ils allaient utiliser toutes mes données et faire des choses horribles » et qui eux aussi vont être, entre guillemets, dans le frein.

Juste pour répondre à la question : est-ce que moi, je m’intégrerais dedans ? Avec plaisir, mais j’ai aussi, par exemple, un enfant de quatre ans, je serais très regardant sur ce que lui va faire dans les prochaines années, comment est-ce qu’il va évoluer. Si jamais à un moment donné, il se connecte à un métavers, je serai avec lui pour lui tenir la main.

Grégoire Levy
Valentin, est-ce que tu es prêt à utiliser le métavers de façon aussi courante que les réseaux sociaux actuellement peut-être ?

Valentin Blanchot
Bonne question déjà. Je n’ai pas encore la réponse, mais à tester oui. Comme tu l’as dit tout à l’heure, Mathieu, est-ce qu’on va peut-être pas juste l’essayer, faire : « C’était sympa, mais pas tout de suite, on va attendre des mises à jour». Donc prêt à le tester. À plonger dedans, je dirais, non, totalement. Tout dépend de la manière dont on conçoit un petit peu le métavers et comment on va le vivre. Dans le meilleur des mondes et peut-être dans une dizaine d’années où, effectivement, on aura plus de smartphones, je porte des lunettes toute la journée, donc ça me posera pas de problème d’avoir la possibilité de faire apparaître une fenêtre dans mon champ de vision et d’augmenter un petit peu tout ce que je croise autour de chez moi.

Et qu’en arrivant chez moi dans mon salon, en posant des clés, là où j’avais une télé, je n’ai plus de télé, mais avec mes lunettes, je peux faire apparaitre un cadre. Depuis ce cadre-là, je peux lancer Netflix, je peux lancer plein d’éléments, je peux faire apparaitre d’autres éléments aussi, je peux changer ma déco sur certains murs. Dans ce cadre-là, il y a un côté intéressant, un côté sexy, mais très futuriste et pas encore très réaliste. Dans la forme de ce que ça représente aujourd’hui, ça m’intéresse, je suis curieux.

Dans la forme de ce que ça peut être demain et comment j’aimerais bien le voir, ça m’intéresse. Et pourquoi pas avec une paire de lunettes, etc.

Côté danger, il faut rester très vigilant sur : à qui ça appartiendra, comment on s’y connectera, quelles données seront récoltées. Il faut peut-être garder espoir.

Grégoire Levy
On suivra ça avec attention, parce qu’à mon avis, l’actualité de ces prochaines années va beaucoup tourner autour du métavers. Merci à tous les trois pour avoir été là. Merci à Anthony et Mathieu pour avoir répondu à notre invitation et avoir apporté un peu de votre expertise. On se retrouve bientôt sur Siecledigital.fr.