La phase 2 du projet Inthanon-LionRock a porté ses fruits. Dans un récent rapport, la Banque des règlements internationaux (ou BIS), explique que les délais de transfert transfrontaliers peuvent être réduits « à quelques secondes ». Ces délais sont aujourd’hui de plusieurs jours. Il s’agit d’une grande avancée dans le développement des monnaies numériques de banques centrales (MNBC).

En 2019, le projet Inthanon-LionRock a été lancé par la banque centrale de Thaïlande et la banque centrale de Hong-Kong. Ils ont été rejoints plus tard par la société de technologie blockchain Consensys. Ce projet implique également la Chine, les Émirats arabes unis, et la BIS. Actuellement, la phase 2, intitulée « Inthanon-LionRock to mBridge », a pour but de « construire une plateforme multi-MNBC pour les paiements internationaux », explique le rapport.

Pour rappel, l’objectif derrière cette plateforme est de simplifier, et réduire, les coûts de transfert entre les différentes monnaies nationales. Un premier prototype a été lancé fin 2019. Il était fondé sur une technologie de DLT, et utilisait des contrats intelligents. Exécutés automatiquement, ils permettent de fluidifier les paiements en temps réel. Ce premier prototype était donc censé démontrer tout ce qu’il serait possible de faire avec une plateforme multi-MNBC.

« Une réduction d’environ 80 % du temps de transaction »

Dans le cadre de la phase 2, un essai de paiements transfrontaliers utilisant des monnaies numériques de banque centrale a été réalisé. Ce test a permis « une amélioration substantielle de la vitesse de transfert transfrontalier, qui passe de plusieurs jours à quelques secondes », selon le rapport de la BIS sur cette expérience.

Schéma du fonctionnement du prototype de paiement transfrontalier en MNBC

Schéma représentant la construction de la plateforme test multi-MNBC. Elle est constituée de 3 parties (de haut en bas), la première relevant de tout ce qui touche à la Blockchain, la seconde des accès, et la troisième de l’interface utilisateur. Image : rapport de la BIS.

Pour réaliser ce test, les participants ont commencé par répartir les informations dans un conteneur logiciel. Ils ont ensuite utilisé des plateformes permettant justement de lancer des applications dans ces conteneurs logiciels. Pour les transferts d’argent en eux-mêmes, ils ont fait appel à la blockchain Hyperledger Besu.

La plateforme prototype était hébergée par AWS (Amazon Web Services). Elle utilisait également Amazon CloudFront (qui permet la diffusion de contenu), pour connecter les différentes banques concernées entre elles. L’infrastructure de ce prototype était constituée de trois couches. La première contenait la blockchain et les contrats intelligents. La seconde servait à tout ce qui relève de l’identification et des accès à la blockchain. La troisième et dernière couche servait d’interface utilisateurs.

Le rapport conclut simplement, en expliquant que le prototype a prouvé que les échanges transfrontaliers de MNBC fonctionnaient, rapidement et avec peu de coûts. « Les résultats […] estiment une réduction d’environ 80 % du temps de transaction. Il y a actuellement un délai de 3 à 5 jours entre le paiement et le règlement d’une transaction transfrontalière [classique] », expliquent les auteurs du rapport. Concrètement, le temps moyen de transaction en MNBC, estimé par ce prototype, serait ainsi de 2 à 10 secondes.

Les MNBC, un secteur en pleine ébullition

De plus en plus de pays se penchent sur le développement de leur propre monnaie nationale numérique. Une telle plateforme facilitant les transactions transfrontalières en monnaie numérique, pourrait permettre un développement plus rapide des MNBC, qui sont encore largement expérimentales.

Le rapport conclut en affirmant qu’il « reste encore du travail à faire pour transformer le prototype en une solution prête pour la production », et que « Les questions juridiques, politiques, de gouvernance et commerciales sont cataloguées, analysées et classées par ordre de priorité pour la recherche et le développement ». C’est là toute la difficulté. Outre un bon fonctionnement, il faut que la future plateforme corresponde aux juridictions et aux cadres définis par les lois.

Enfin, pour les pays impliqués dans le projet, son aboutissement serait une aubaine. Cela permettrait à la Chine, par exemple, de renforcer sa position dans les échanges internationaux. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle travaille sur un yuan numérique. Derrière tous ces projets se trouve celui de devenir le pionnier des MNBC, et de se poser en leader des paiements transfrontaliers dématérialisés. Une position de leader qui fragiliserait celle du dollar physique, aujourd’hui monnaie de référence dans les échanges internationaux.