180 voix contre 0, c’est le résultat du vote au parlement coréen du Telecommunications Business Act le mardi 31 août. Un résultat écrasant qui fait de la Corée du Sud le premier pays à obliger l’App Store d’Apple et le Play Store de Google à autoriser des systèmes de paiements tiers pour les achats in-app. De quoi menacer les très profitables commissions des deux entreprises américaines.

Google et Apple pas content

En octobre 2020 Google a fait l’erreur de commencer à prélever une commission sur les applications dans une Corée du Sud jusque-là exemptée. Cette décision a déclenché le processus qui a abouti au vote de la loi ce mardi. Elle entrera en vigueur dès qu’elle aura été ratifiée par le président Moon Jae-in, dont le parti a soutenu la législation.

Apple et Google n’ont eu de cesse de la combattre via leurs lobbyistes depuis la naissance du projet de loi. Ils ont même fait appel à l’administration américaine, en s’appuyant sur un traité de 2007 dans lequel Corée du Sud et États-Unis s’engagent à ne pas discriminer leurs entreprises, sans succès.

Après le passage du projet de loi en Commission en août, Apple a insisté sur les risques de fraudes et d’exposition de données privées qui pourraient en découler. Google justifie ses commissions par l’argent nécessaire « pour construire et maintenir un système d’exploitation et une boutique d’applications ». Dans le Wall Street Journal, le directeur principal des politiques publiques d’Alphabet, la maison mère de Google, a déclaré que « le processus précipité n’a pas permis d’analyser suffisamment l’impact négatif de cette législation sur les consommateurs et les développeurs d’applications coréens ».

Google refuse de donner les revenus tirés de ses commissions pouvant aller jusqu’à 30% des transactions sur le Play Store. Ils sont noyés dans les « revenus autres » de la firme, qui s’élevait lors du dernier exercice fiscal à 21,7 milliards de dollars. Apple n’est pas plus transparent, les revenus générés par l’App Store sont compris dans les « services » qui atteignent 54 milliards de dollars.

La Corée du Sud ouvre-t-elle simplement le bal ?

Les arguments des deux entreprises sont éculés tant ils sont répétés. Epic Games attend le verdict de son procès contre Apple après l’interdiction de Fortnite sur l’App Store pour avoir introduit un système de paiement in-app. Un autre procès a été lancé contre Google. D’autres entreprises du web, comme Spotify ont ouvert des procédures aux États-Unis et en Europe.

Google et Apple ont tenté de faire passer la pilule en faisant de petits gestes çà et là. Les développeurs générant moins d’un million de dollars subissent une commission de 15% au lieu de 30%. Très récemment, fin août, Apple a généreusement autorisé les développeurs à informer leurs utilisateurs de l’existence de moyen de paiement alternatif en exploitant leur adresse mail…

Les deux géants américains ont encore du boulot pour éviter que les États-Unis et l’Europe ne suivent la voie de la Corée du Sud. Début août un projet de loi bipartisane a été déposé au Sénat américain, son titre est explicite : Open App Markets Act. En Europe c’est le Digital Market Act qui va s’attaquer au problème. Les états membres doivent discuter le texte au début de l’année 2022. La Corée du Sud pourrait ne pas être seule très longtemps.