Dans le cadre d’une campagne de sensibilisation destinée aux investisseurs, la Securities and Exchange Commission (SEC) souhaite mieux encadrer les entreprises chinoises cotées aux États-Unis. Depuis le 30 juillet, le président de la SEC, Gary Gensler, a imposé un gel des introductions en bourse des sociétés venant de Chine, rapporte Reuters.

L’entité à intérêt valable (VIE) l’arme pour contourner les règles de Pékin

Cette décision était une réaction à celle de Pékin, quelques jours plus tôt, d’imposer aux entreprises de l’éducation privée de devenir des associations à but non lucratif. En imposant cette règle, la Chine a interdit aux sociétés du secteur de passer par des « entités à intérêt valable » (VIE) pour s’introduire en bourse. L’effet sur la bourse a été immédiat.

Ces VIE sont utilisées depuis au moins vingt ans par les entreprises technologiques chinoises, comme Alibaba, pour entrer en Bourse à l’étranger, y compris à Hong Kong. Les investisseurs qui détiennent des actions de VIE n’ont pas directement accès au capital de l’entreprise, ils n’ont donc pas la possibilité de prendre des décisions ou de la réorganiser. En contrepartie la société chinoise s’engage à reverser ses bénéfices à la VIE, qui redistribue les mêmes retours sur investissements à tous.

Les entreprises chinoises appliquent ce modèle pour contourner une interdiction de Pékin. Les sociétés de vastes secteurs économiques, dont la technologie, n’ont pas le droit de devenir des propriétés étrangères. Ce système déjà décrié aux États-Unis couplé avec son interdiction subite aux Edtech a eu tendance à échauder la SEC.

La SEC réclame de la transparence aux entreprises chinoises

Dans un courrier révélé par Reuters l’agence américaine exige plus de clarté sur ce mode de fonctionnement aux entreprises chinoises cotées aux États-Unis. Le texte exige qu’elles expliquent que « les investisseurs ne peuvent jamais détenir directement des participations dans la société d’exploitation chinoise ». Il demande également de décrire les éventuelles conséquences de ce système sur les investisseurs.

le batiment de la sec

Le quartier général de la SEC à Washington D.C. Photographie : SEC / Unsplash.

Autre exigence de la SEC liée à l’actualité : que les entreprises chinoises annoncent les risques que représente l’intervention des régulateurs chinois dans leur activité. En particulier concernant la sécurité des données. L’allusion est transparente : en juin 2021, l’introduction en Bourse à New York de l’Uber chinois, Didi Chuxing a été suivie par une vague répressive de Pékin sur l’entreprise, avec des conséquences sur le cours de l’action.

Les entreprises soumises aux désirs contradictoires des régulateurs américains et chinois

La SEC veut s’assurer que les entreprises se soumettent aux lois américaines sur l’audit. La Chine interdit à ses entreprises de partager le travail de leurs auditeurs au Public Company Accounting Oversight Board (PCAOB), l’organisme chargé du contrôle des audits des entreprises cotées aux États-Unis.

Le président de ce dernier, incapable d’obtenir un audit indépendant des entreprises concernées, a été démis de ses fonctions par la SEC. En vertu d’une loi de 2020, la Holding Foreign Companies Accountable Act, ne pas se soumettre au contrôle du PCAOB sous trois ans pourrait valoir la radiation de l’entreprise par la SEC. Une décision complexe à prendre pour l’agence.

La réaction des entreprises et du gouvernement chinois à ces injonctions de la SEC seront intéressantes à suivre. L’Administration chinoise du cyberespace (CAC) a soumis un avis en juillet pour renforcer les contrôles de sécurité sur les entreprises locales souhaitant entrer en Bourse aux États-Unis. L’objectif est d’éviter que trop de données traversent le Pacifique. Les deux décisions pourraient se percuter dans un futur proche.