Les entreprises Facebook, Twitter et Google, représentées par le groupe Asia Internet Coalition, ont transmis le 25 juin 2021 une lettre adressée aux autorités compétentes, dans laquelle elles menacent de quitter Hong Kong en cas de vote d’un projet de loi anti-doxing. Cette pratique consiste à révéler l’identité et autres informations personnelles d’un individu sur internet, principalement dans un objectif de harcèlement.

L’ombre des manifestations de 2019

Ce projet de loi a été formulé suite aux manifestations qui ont agité la ville en 2019. Cette année-là, Pékin avait voté une loi dite de sécurité nationale transposée dans la législation de Hong Kong. La cité-état était censée bénéficier d’un statut semi-autonome jusqu’en 2047 selon le traité de rétrocession du territoire du Royaume-Uni à la Chine de 1997.

Au cours des mouvements populaires pro-démocratie, des milliers de cas de doxing, visés contre des policiers ou des membres de l’opposition, ont dû être traités par les autorités. En réaction, en mai 2021, le Bureau des affaires constitutionnelles et continentales de Hong Kong a prévu de modifier la loi de protection des données locales.

Les entreprises américaines redoutent en particulier que leur personnel sur place soit tenu pour responsable des actes de doxing des utilisateurs. Il pourrait subir des enquêtes criminelles et, selon les amendements en discussion, être passible d’un million de dollars hongkongais d’amendes (environ 128 800 dollars américains).

Selon la lettre révélée par le Wall Street Journal, « la seule façon d’éviter ces sanctions pour les entreprises technologiques serait de s’abstenir d’investir et d’offrir les services à Hong Kong ». Elle ajoute que la réponse du gouvernement hongkongais à cette pratique est « complètement disproportionnée et inutile ». Enfin, elle pointe le flou des amendements envisagés, pouvant aller jusqu’à criminaliser « les actes innocents de partage d’informations en ligne ».

Un contexte pesant à Hong Kong

Une porte-parole du commissaire chargé de la protection des données à Hong Kong a certifié que « les amendements n’auront aucune incidence sur la liberté d’expression ». Pourtant, selon Paul Haswall, chef du département technologie, médias et télécommunication d’un cabinet internationale de Hong Kong, cette loi pourrait effectivement rendre « risqué le fait de poster sur internet tout ce qui concerne une autre personne ».

La pratique du doxing est en soi condamnable, mais cette loi arrive dans une période particulière pour Hong Kong. Depuis 2019, la Chine accroit son contrôle sur la ville : la loi sécurité nationale, la disparition de l’Apple Daily (dernier média indépendant hongkongais) le 24 juin dernier, son fondateur en prison…

De plus en plus d’entreprises envisagent de quitter ce centre financier qui, finalement, n’est plus si accueillant. Pour le moment les géants de la Tech sont restés implantés, en refusant de transmettre des données au gouvernement. Ils pourraient finir par partir, d’autant plus que Hong Kong ne représente, au final, « que » 7,5 millions d’utilisateurs potentiels.