Deux régulateurs européens, le Contrôleur européen de protection des données (CEPD) et le Comité européen de la protection des données (EDPB), ont récemment demandé que la reconnaissance faciale soit interdite dans les lieux publics au sein de l’Union européenne. La fronde se fait de plus en plus oppressante pour la Commission européenne qui va devoir trancher dans les prochains mois.

Les lieux publics dans le viseur des régulateurs

Au début de l’année 2021, le Comité consultatif de la Convention du conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, a déjà fait part de sa volonté d’encadrer la reconnaissance faciale dans les lieux publics. Selon l’organisation intergouvernementale, certaines applications de la reconnaissance faciale ne devraient pas être utilisées, sauf en cas de « menace pour la sécurité publique ».

Il y a quelques jours, ce sont deux autres organes de régulation de l’Union qui ont pris la parole pour défendre cette même cause. Le CEPD et l’EDPB ont aussi déclaré ceci : « il devrait être illégal d’utiliser l’intelligence artificielle pour l’évaluation du crédit social ». Selon eux, il faut interdire l’utilisation de l’intelligence artificielle dans les lieux publics. Cela vaut autant pour la reconnaissance faciale, que pour tous les autres dispositifs biométriques.

Les deux régulateurs réclament : « l’interdiction de la reconnaissance des visages, de la démarche, des empreintes digitales, de l’ADN, de la voix, des frappes au clavier et d’autres signaux biométriques ou comportementaux, dans n’importe quel contexte, dans les zones accessibles au public ». Ce qui pose problème selon eux, c’est la possibilité de classer les personnes dans des groupes en fonction de leur origine ethnique, leur sexe, leur orientation politique ou sexuelle, ou d’autres types de classification discriminatoires.

L’EDPB et le CEPD sont pour une interdiction en fonction des usages

L’idée n’est pas d’interdire totalement l’utilisation de l’intelligence artificielle et de la reconnaissance faciale, mais simplement d’encadrer les usages. L’EDPB et le CEPD affirment qu’il serait possible de développer des applications de reconnaissance faciale dans des situations spécifiques, comme par exemple dans le domaine de la médecine.

Andrea Jelinek, présidente de l’EDPB, et Wojciech Wiewiórowski, du CEPD, ont déclaré que : « le déploiement de l’identification biométrique à distance dans les lieux publics signifie la fin de l’anonymat et cela n’est pas souhaitable. Le règlement proposé devrait également interdire l’utilisation de l’IA à des fins de notation sociale, car cela va à l’encontre des valeurs fondamentales de l’Union et peut conduire à la discrimination ».

Selon eux : « si nous voulons préserver nos libertés et créer un cadre juridique centré sur l’humain pour l’intelligence artificielle, il faut passer par une interdiction générale de l’utilisation de la reconnaissance faciale dans les espaces accessibles au public ». Ils estiment que ce cadre juridique devrait être un point de départ essentiel pour réglementer l’utilisation des technologies biométriques.