Une cellule spéciale de la police de Delhi s’est rendue le 24 mai devant les locaux de Twitter India, à Delhi, pour signifier à la direction une notification d’enquête. Les locaux étant vides à ce moment-là pour cause de télétravail, les policiers sont rentrés bredouilles. Cette opération, médiatisée, a été lancée sous fond de rivalité entre le parti au pouvoir, le BJP et le parti du Congrès, dans l’opposition.

L’affaire de la « boîte à outils »

Le porte-parole du BJP, Sambit Patra et d’autres membres du parti, ont publié le 18 mai, sur leurs comptes Twitter, ce qu’ils ont appelé une « boîte à outils ». Il s’agit de plusieurs documents censés démontrer l’existence d’un plan du parti du Congrès pour profiter de la pandémie pour embarrasser le gouvernement du Premier ministre Narendra Modi.

Un site de factcheking indien, Alt News, a démontré le 19 mai que la « boîte à outils » était un faux attribué à tort à l’opposition. Dans la foulée et en vertu d’une politique introduite en février 2021, Twitter a étiqueté les tweets relayant la fausse « boîte à outils », en « média manipulé ». Une plainte a été déposée par des représentants du parti du Congrès pour diffamation.

Ce serait dans le cadre de cette plainte que la police serait venue dans les locaux du réseau social. La police a expliqué vouloir envoyer un « avis » à Twitter à propos de l’enquête en cours. Les forces de l’ordre ont expliqué au média local The Indian Express que Twitter ayant étiqueté le tweet comme manipulé, le réseau social devait avoir des preuves de la diffamation, des informations utiles à la police pour son enquête.

Des responsables de l’opposition doutent des motivations avancées par la police de Delhi. Le chef de la communication du parti du Congrès, Randeep Surjewala, s’est étonné qu’elle se soit rendue dans les locaux de Twitter plutôt qu’au siège du BJP, selon lui « Le BJP a peur que ses mensonges et ses fraudes soient découverts et qu’il soit considéré comme manipulé et frauduleux par les plateformes de médias sociaux ». Twitter n’a pas voulu communiquer sur cette affaire.

L’Inde et Twitter, une relation conflictuelle depuis six mois

Les relations entre Twitter, mais aussi Facebook, et le parti au pouvoir sont tendus depuis plusieurs mois en Inde. En janvier et février, le ministère des Technologies de l’information avait reproché aux réseaux sociaux de ne pas retirer des publications diffusant « des informations erronées » et pouvant « conduire à une violence imminente affectant l’ordre public dans le pays » en marge de manifestations d’agriculteurs. Le ministère était allé jusqu’à menacer d’emprisonnement des employés de Twitter India. L’entreprise avait fini par satisfaire 95% des demandes du gouvernement.

En avril, une autre série de tweets critiques sur la gestion de l’épidémie de Covid-19 a été signalée par le gouvernement puis supprimé par Twitter. Plus récemment encore, le gouvernement indien a demandé aux réseaux sociaux de censurer le terme « Variant indien ». Ces affaires interviennent alors que les réseaux sociaux doivent se conformer prochainement à une nouvelle législation indienne sur les plateformes numériques qui vise à « supprimer les informations générées, transmises, reçues, stockées ou hébergées sur le web qui pourrait affecter l’ordre public ».