« Entre 2018 et 2023, notre vision c’est que le marché va passer en gros de 2 à 4 milliards d’euros », a déclaré à l’AFP Alain Biston, PDG d’Alcatel Submarine Networks (ASN). Un marché qui double, voilà de quoi ravir l’entreprise française spécialisée dans la fabrication, la pose et l’entretien de câbles sous-marins. « Sur la même période, nous allons essayer de suivre le marché, de faire deux fois plus que ce que nous faisions avant » ambitionne le PDG d’ASN.

Les GAFAM dynamisent le marché d’ASN

ASN dont l’unique actionnaire est, depuis 2015, Nokia se revendique comme un leader mondial du secteur aux côtés de l’américain TE SubCom et du japonais NEC. « Selon nos calculs, nous pensons que nous sommes aux alentours de 35% [de part de marché] sur les commandes. Mais ce ne sont pas des chiffres officiels », explique Alain Biston.

Depuis la fin des années 2010, les géants américains de la Tech investissent dans des réseaux de câbles et de fibres optiques. En mars 2021, Facebook et Google ont annoncé la construction de deux câbles sous-marins qui reliront l’Amérique du Nord avec Singapour et l’Indonésie. Une aubaine pour l’entité française : « Ce sont nos principaux clients », confie Alain Biston à l’AFP pour French Web.

Les GAFAM modifient les us et coutumes du secteur en intensifiant les commandes. Avant, les gros projets pointaient leur nez tous les 12 à 15 mois, aujourd’hui, c’est comme s’il en pleuvait. Chaque année compte 3 ou 4 projets d’envergure. « Les Gafam doivent participer à environ 60%, peut-être même 70% des projets qui existent dans l’année », estime le PDG d’ASN.

Face aux prévisions de croissance du secteur, Nokia projette d’investir 360 millions d’euros dans l’ASN sur les quatre prochaines années. « Au niveau mondial, nous allons faire entre 300 et 350 embauches sur la même période » détaille Alain Biston. Cette nouvelle masse salariale devrait se concentrer sur l’usine de Calais, une référence mondiale dans le secteur des câbles sous-marins. Aujourd’hui, l’entreprise compte 2 000 employés, sous-traitants inclus. ASN détient six bateaux câbliers et deux nouvelles embarcations rejoindront bientôt sa flotte. « Nous devrions repasser, dans les 12-18 mois à peu près, à sept vaisseaux », précise le PDG d’ASN.

Le poids stratégique des câbles sous-marins

L’entreprise est considérée comme un fleuron français dans un secteur hautement stratégique. En effet, dès qu’une donnée transite, elle est consultable. Ce qui pose des questions sur la souveraineté et l’espionnage. Le Brésil et l’Europe ont construit un câble reliant les deux continents pour ne plus dépendre uniquement des câbles américains. Le Portugal souhaite d’ailleurs déployer un réseau pour moderniser les infrastructures européennes. En 2020, selon Google, 98% du trafic internet mondial passait par des câbles sous-marins.

« L’Europe a la chance d’avoir un acteur majeur de ce domaine sur son territoire. Si nous n’étions pas là, il n’y aurait absolument plus de technologie sous-marine en Europe […] L’intérêt pour l’Europe, c’est que s’il y a un besoin d’un projet particulier, nous avons toute la technologie et la maîtrise disponible au sein de l’Europe », soutient Alain Biston.