Un audit interne consulté par Politico révèle qu’Amazon avait connaissance que 4 700 de ses employés avaient accès aux données non-publiques des vendeurs tiers. Ces données doivent, en théorie, être accessibles à seulement quelques salariés. Toutefois, les employés du monde entier y avaient accès et pouvaient s’en servir afin d’améliorer les ventes d’Amazon sur sa propre plateforme marchande. Néanmoins, seul un cas d’utilisation de données non autorisées a été prouvé. Une pratique contraire aux règles de concurrence. En effet, Amazon se présente à la fois comme le fournisseur de la marketplace et un vendeur. Une situation qui revêt bien des avantages.

« Les autorisations ne sont pas suffisamment restreintes, ce qui permet à des utilisateurs non autorisés de consulter des informations spécifiques aux vendeurs, telles que l’historique des performances et les clés d’authentification, de modifier les niveaux de stock et les prix, ainsi que de gérer les retours », détaille le rapport d’audit.

En d’autres mots, un « vendor manager » aurait pu accéder illégalement aux données de stock d’un vendeur tiers dans le but d’améliorer les performances de sa « buy-box » qui permet aux internautes d’ajouter des produits à un panier.

Alors que depuis novembre 2020 une enquête pour pratique anticoncurrentielle a été ouverte par l’Union Européenne, la Commission européenne n’a pas commenté cette fuite de documents, arguant que son « enquête est en cours », rapporte Politico. Quant à Amazon, l’entreprise reste de marbre. En avril 2020, sur le même sujet mais aux États-Unis, l’entreprise avait démenti les accusations, avant que l’Europe ne s’y intéresse en juin.

Enquête antitrust en Europe, aux Canada et aux États-Unis, ça chauffe pour Amazon

Selon le rapport, Amazon a connaissance de cette situation depuis un autre audit datant de 2010. Plus de 10 années sont passées et les réponses se font toujours attendre. Un ancien salarié de l’entreprise de Jeff Bezos ayant demandé l’anonymat affirme que l’accès à ces données a duré au moins jusqu’en 2018. « La conformité pour le principe de conformité n’a pas été bien accueillie [par les dirigeants d’Amazon]. Une conformité répondant aux objectifs commerciaux pourrait avoir un certain succès », explique la source anonyme de Politico qui avait soulevé la question en interne lorsqu’elle travaillait pour Amazon.

En février 2021, Politico a publié une autre enquête mettant la lumière sur de possibles violations de données stockées par Amazon qui ne parviendrait pas à en contrôler correctement leur accès. Un ancien de l’entreprise a déclaré que ces contrôles d’accès « n’auraient pas passé l’épreuve de la plupart des audits ». Une autre source anonyme affirme que de nombreuses données personnelles étaient accessibles par des personnes n’ayant pas les droits. Des accusations encore une fois réfutées par l’entreprise de Jeff Bezos.

L’enquête de novembre 2020 de la Commission européenne a été ouverte contre Amazon pour avoir « systématiquement utilisé des données commerciales non publiques de vendeurs indépendants qui vendent sur la plateforme marchande, au profit de la propre activité de vente d’Amazon, qui est en concurrence directe avec ces vendeurs tiers ». Si la pratique anticoncurrentielle est démontrée, Amazon risque une amende pouvant aller jusqu’à 10% de son chiffre d’affaires mondiale. Par ailleurs, Amazon fait l’objet de plusieurs enquêtes antitrust, notamment en Allemagne, au Canada et aux États-Unis.