La Russie a annoncé avoir ralenti le fonctionnement de Twitter au sein de son territoire. Une décision communiquée par le Roskomnadzor, l’agence de surveillance russe des télécommunications et des médias, qui estime que le réseau social américain n’a pas supprimé des contenus « incitant les mineurs à se suicider, contenant de la pédopornographie, ainsi que des informations sur l’usage de drogues » malgré des demandes répétées. Mais est-ce vraiment la raison principale qui a poussé la Russie à ralentir Twitter ? Rien n’est moins sûr.

La Russie met en cause le manque de modération de Twitter

Depuis 2017, le Roskomnadzor affirme avoir émis « plus de 28 000 demandes de suppression initiales et répétées de liens et de publications illégales » à Twitter. Autant de demandes auxquelles l’oiseau bleu n’aurait pas réagi. La goutte d’eau qui aurait fait débordé le vase serait l’appel de plusieurs mineurs à commettre un suicide de masse le 3 mars 2021 et qui, lui non plus, n’aurait pas été modéré par le réseau social.

L’agence de surveillance russe des télécommunications et des médias a ainsi décidé de ralentir considérablement la vitesse de chargement de Twitter au sein de son territoire. Effective depuis le 10 mars dernier, cette décision concernerait 100% des appareils mobiles, et 50% des appareils fixes. Une « punition » qui pourrait venir à s’aggraver davantage « si Twitter continue d’ignorer les exigences de la loi », prévient le Roskomnadzor. Dans son communiqué, l’agence russe n’hésite plus à faire planer l’ombre de la menace d’un blocage définitif du réseau social.

En réponse, Twitter a affirmé dans un communiqué qu’il appliquait une politique de tolérance zéro en matière d’exploitation sexuelle des enfants, qu’il n’autorisait pas l’utilisation de sa plateforme pour tout comportement illégal, notamment l’achat et la vente de drogues, et qu’il était contraire à ses règles de glorifier ou d’encourager le suicide et l’automutilation. Pour conclure, il a ajouté resté déterminer « à plaider en faveur d’un Internet ouvert dans le monde » et s’est dit « profondément préoccupé par les tentatives croissantes de bloquer et d’étrangler la conversation publique en ligne ».

Le contexte politique du pays pourrait avoir son rôle à jouer dans cette décision

Si Twitter s’inquiète, c’est parce que les motivations de la Russie pourraient bien se trouver ailleurs que dans les raisons avancées par son agence. De fait, le pays fait actuellement face à un important mouvement de contestation du pouvoir en place, dont Alexeï Navalny est le porte-drapeau. Alors qu’il revenait d’Allemagne après plusieurs mois passés à soigner l’empoisonnement duquel il a été victime, l’homme n’a pas hésité à se servir des plateformes sociales, parmi lesquelles Twitter, pour appeler à l’organisation de plusieurs manifestations à travers la Russie.

Un appel entendu dans une soixantaine de villes, et qui a poussé le gouvernement russe à exhorter les réseaux sociaux de supprimer les messages appelant à protester de leurs plateformes. D’après un communiqué publié quelques jours seulement après cette ordonnance, YouTube aurait ainsi modéré 50% des messages visés par la Russie, quand TikTok en aurait supprimé 38%, et Instagram 17%. Twitter ne figurait pas dans cette liste, laissant ainsi entendre que l’oiseau bleu ne s’est pas plié aux exigences de la Russie.

L’oiseau bleu est-il en train d’en payer son manque de coopération avec le pouvoir en place ? Il semblerait bien. Reste à savoir si la punition infligée s’arrêtera là, ou si elle ira jusqu’au blocage définitif, comme l’a laissé entendre le Roskomnadzor.