Slack a récemment récompensé plusieurs entreprises clientes à l’occasion des Slack Customer. Deux entreprises françaises ont été saluées par l’application, Doctolib, et Veepee. Anciennement connue sous le nom de Vente-privee.com, la plateforme ecommerce a amorcé une stratégie d’adoption douce, qui a débuté en 2016 par les équipes Tech. Après une longue période de test et d’intégrations, 2019 a marqué le démarrage de l’ajout des équipes. À présent, Veepee accueille 5 000 collaborateurs sur Slack, avec un très fort taux d’adoption.

Avec Julien Mangeard, CTO de Veepee, nous avons eu l’occasion de revenir sur les motivations, les freins, et les bénéfices de l’utilisation de Slack à grande échelle.

Siècle Digital : pourquoi vous êtes-vous tournés spécifiquement vers Slack, et pas une autre solution ?

Julien Mangeard : Cela s’est fait assez naturellement à vrai dire. Du fait des différentes acquisitions qui ont été réalisées en Europe au cours des 5 dernières années, nous avions un bon échantillon des solutions disponibles sur le marché. L’adoption de Slack s’est faite assez naturellement. C’est la solution sur laquelle nous avons eu un meilleur taux.

Tout aussi naturellement, le sujet est venu de la tech, comme souvent, puis l’entreprise tout entière l’a par la suite adopté. Nous avions plusieurs solutions concurrentes utilisées depuis des années chez Veepee, mais aucune n’avait réussi à atteindre ce taux d’utilisation. Donc le choix de Slack s’est fait avant tout sur le taux et la rapidité d’adoption des équipes.

Ensuite, car Slack s’est imposée comme la solution recommandée par nos ingénieurs. En tant qu’’early adopters », ils ont plébiscité son adoption par l’ensemble du Groupe. En termes de fonctionnalités, c’était la solution la plus riche.

Enfin d’un point de vue financier, Slack s’est révélée être compétitive. Notamment grâce à l’option permettant de ne pas payer pour les comptes inactifs.

Nous avons privilégié une adoption la plus naturelle possible. Et puis, nous avons progressivement coupé les autres solutions. Évidemment, si l’on prend l’histoire récente, le fait de basculer tout le monde en télétravail, et les conditions sanitaires ont naturellement favorisé l’adoption de l’outil,et encouragé les collaborateurs à le prendre en main.

SD : Basculer 5 000 employés vers une nouvelle plateforme, ce n’est pas une mince affaire. Quels ont été les freins auxquels vous avez dû faire face ? Comment ont-ils été solutionnés ?

Julien Mangeard : La première chose à prendre en compte, c’est qu’il s’agit d’un sujet culturel. Il faut comprendre l’intérêt de ce genre de solutions d’entreprise. Beaucoup de collaborateurs vont se dire qu’ils ont déjà le téléphone ou l’email, alors pourquoi rajouter le tchat ?

La communication par email a succédé à la communication par écrit. Du courrier formel, l’email reste aujourd’hui dans l’esprit des gens une chose aussi formelle. Quand ils écrivent leur emails, ils commencent par bonjour, finissent par cordialement, ils mettent des formules de politesse, vont relire le contenu plusieurs fois avant de l’envoyer… L’email est encore beaucoup utilisé comme un document qui fait foi, et qui est officiel.

La problématique que nous avions, était que Veepee a beaucoup grossi à l’échelle européenne. Nous avons des bureaux un peu partout en Europe, avec des équipes qui sont extrêmement décentralisées. Moi-même je dirige beaucoup d’équipes avec des groupes parfois de 5-6 personnes qui travaillent dans 5-6 bureaux différents. Ces personnes ont besoin de collaborer au quotidien, mais si à chaque fois elles doivent se parler par email, ça ne fonctionne pas.

Moi-même je lis assez peu mes emails. Avec l’email, il faut être à jour, les réponses doivent être circonstanciées… Il y a un bagage culturel qui va avec, qu’il n’y a pas avec Slack. On est beaucoup plus sur une discussion informelle. Les collaborateurs vont plus facilement s’ouvrir et dire ce qu’ils pensent.

Aussi, la politique aura tendance à passer au second plan, puisque dans les emails on laisse une trace écrite. Si l’on veut travailler dans un environnement où on souhaite être le moins politique possible, le fait d’avoir un dialogue direct, c’est ce qui fonctionne le mieux et qui permet aux gens de dire exactement ce qu’ils pensent. Sur ce point, avec le déploiement de Slack à grande échelle, nous le ressentons vraiment.

Également, une partie des collaborateurs était un peu perplexe sur le choix et le déploiement de la plateforme. Je pense que ça a pris beaucoup de sens pour eux lorsque nous avons été obligés de passer en 100% remote.

Tout le monde a perdu la capacité d’avoir des échanges informels et à peu près en même temps. Les réticences à utiliser Slack comme outil pour échanger avec son équipe, avec les équipes autour de soi se sont envolées par nécessité. C’était le seul moyen d’avoir des échanges informels avec les gens de son équipe, et c’est ce qui nous a permis, pendant la crise, de générer beaucoup d’engagement.

Aujourd’hui, je ne vois plus du tout de personnes réfractaires.

SD : Comment s’est passé le déploiement opérationnel de l’outil puis son adoption par les 5 000 employés de Veepee répartis dans toute l’Europe ? Quels départements l’ont adopté ?

Julien Mangeard : Ça s’est fait très naturellement. Chez Veepee, nous avons une vraie volonté de siloter les choses le moins possible. La Tech travaille de façon rapprochée avec ses contreparties métier, et donc il y a déjà eu un effet de propagation de proche en proche. C’est-à-dire que les équipes tech travaillant avec le marketing ont commencé à inviter leurs collègues du marketing parce que c’était plus pratique pour un certain nombre de sujets. Les personnes qui travaillaient avec la logistique ont commencé à inviter leurs collègues côté logistique qui eux-mêmes ont commencé à faire leurs réunions d’équipe dessus. Puis, il y a eu un effet d’adoption par les équipes proches, et ainsi de suite.

L’adoption s’est faite comme ça, jusqu’au jour où nous avons pris la décision avec le soutien des équipes informatiques internes de déployer Slack partout. Donc nous sommes passés d’une situation où les personnes avaient Slack sur leur poste uniquement si elles le décidaient, à une installation et un compte par défaut. Ensuite, l’adoption s’est faite par l’usage, avec du contenu mis à disposition sur slack, qui a incité les collaborateurs à s’y connecter de plus en plus régulièrement.

SD : Au-delà de l’engagement des collaborateurs, quelles problématiques organisationnelles ont pu être solutionnées en passant sur Slack ?

Julien Mangeard : Pendant la crise sanitaire, Slack a permis à l’équipe communication de partager des vidéos quasiment toutes les semaines aux collaborateurs pour leur expliquer ce qu’il se passait. Ça a permis au top management d’adopter une communication directe avec tous les employés et cela a généré un mode de communication beaucoup plus direct.

En France, on a souvent l’idée d’une information qui doit descendre des managers. Que les choses se décident dans le comité de direction, et descendent ensuite de manager en manager. Je trouve que cette idée existe beaucoup moins dans d’autres cultures d’entreprises, lorsque la communication est beaucoup plus directe avec les salariés.

Slack nous a donc permis, pour beaucoup de sujets, d’opérer une communication directe du top management à destination de tous les employés et d’éviter que l’information ne soit déformée, et de renforcer la transparence vis-à-vis des collaborateurs.

De plus, nous avons pu donner un support de communication à des équipes qui étaient extrêmement disparates. Cela a aussi permis de casser quelques barrières de langage et culturelles, puisqu’il est plus facile de parler en anglais à l’écrit qu’à l’oral.

Enfin, nous avons intégré de plus en plus d’applications et de services sur Slack. Par exemple, si les collaborateurs veulent du support pour leur ordinateur qui a un problème, il y a le canal dédié pour signaler le besoin à l’équipe concernée, etc.

SD : De quelle manière Slack facilite le travail des ressources humaines ?

Julien Mangeard : Slack a été un élément qui nous a permis d’avoir de la donnée pour savoir, post-covid, ce qu’il se passait en entreprise et prendre des décisions pour le bien-être de nos collaborateurs. Quand une telle crise survient et que l’on n’a pas de données accessibles, c’est l’intuition des gens qui prend le relais.

Le problème c’est que l’intuition, sur des grosses équipes, ce n’est pas quelque chose qui marche très bien, ou en tout cas peut avoir de la latence. Il y a souvent trois semaines d’avance, ou trois semaines de retard.

Nous avons adossé Slack à Officevibe qui permet de poser des questions de manière aléatoire, toutes les semaines, à nos collaborateurs. Il y a à peu près 300 questions qui sont posées de manière cyclique. Ce qui a été surprenant, c’est qu’avec toutes les mesures que nous avons prises assez rapidement, nous nous sommes aperçus que les équipes allaient bien. Et c’est en constante progression.

Aussi, avec les statistiques, on a pu s’apercevoir de plusieurs choses. Oui, les collaborateurs vont bien et sont toujours autant engagés … Certains avaient peur que les personnes ne viennent pas travailler. Non, le taux d’engagement des équipes n’est pas en chute libre, bien au contraire. Au bout d’un an, nous avons constaté qu’il a progressé de manière significative, et dans presque tous les départements de l’entreprise, même ceux qui ont probablement le plus souffert de cette situation. Évidemment, ça ne remplacera jamais deux personnes dans la même pièce, mais en tout cas, nous avons réussi à compenser une bonne partie de ce manque de présentiel.

Aperçu d'un sondage Officevibe sur Slack

Exemple de l’intégration d’Officevibe sur Slack

SD : Pour les équipes Tech, est-ce que l’automatisation offerte par Slack a permis de diminuer le nombre d’incidents ?

Julien Mangeard : Dans ce cas, il s’agit de deux types d’incidents. Les incidents qu’on appelle métier, sur le site par exemple, où un prix est incorrect, un logo qui n’est pas bon, une image manque… Et il y a les incidents techniques qui sont souvent invisibles des internautes, ils surviennent sur des applications de back-office.

Aujourd’hui, toute la gestion d’incidents est complètement automatisée sur Slack. En général, si nous avons des problèmes, ils se produisent au moment de l’ouverture des ventes, deux fois dans la journée. Si jamais nous sommes sur une mauvaise journée, il peut y avoir plusieurs incidents qui se déroulent en parallèle.

L’avantage de Slack, c’est que nous avons développé des robots qui créent un canal par incident. Ils vont être traités parallèlement sur différents canaux. Ça permet de bien prioriser, et de traiter les plus importants. Ça évite aussi de générer du bruit dans des discussions importantes. Cette automatisation nous a énormément apporté, notamment dans notre capacité à générer des statistiques à partir de ces incidents, et d’être capable de travailler sur les causes qui se reproduisent le plus souvent. Aujourd’hui, nous notons une baisse de 67% des incidents.

SD : Tout le volet automatisation de votre Slack a été récompensé pour la 1ère édition des Slack Customer Awards. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

Julien Mangeard : Ça représente le succès de la stratégie que nous avons mise en place pour le déploiement de Slack dans l’entreprise. Je trouve que c’est aussi un moyen très sympa de nous montrer que c’est un partenariat qui fonctionne et que les deux parties en sont contentes.

Ce prix vient notamment récompenser les équipes qui sont en charge de tout le déploiement des automates qui ont investi le plus de temps et d’énergie sur le sujet.