Bien qu’à ses balbutiements, l’essor de l’informatique quantique promet d’apporter avec elle une nouvelle révolution numérique majeure. Si elle a le potentiel de découvrir de nouveaux matériaux et concevoir de nouveaux médicaments, il y a un revers à la médaille : utilisée de façon abusive, cette technologie pourrait conduire à la création de nouvelles armes dévastatrices, ou à une manipulation néfaste du génome humain. C’est pour enrayer ces éventuelles dérives qu’un groupe de scientifiques spécialisé dans l’informatique quantique a appelé à la création d’un code de conduite éthique, a rapporté le Wall Street Journal ce 1er février 2021.

L’informatique quantique, une technologie à double tranchant

Chaque nouvelle technologie apporte avec elle son lot de bénéfices, mais aussi son lot de risques. L’intelligence artificielle en est d’ailleurs un parfait exemple : d’un côté, elle a permis de concevoir l’un des antibiotiques les plus puissants du monde et d’aider à la préservation des coraux, quand de l’autre, elle a laissé place à l’émerge des deepfakes, qui peuvent s’avérer particulièrement dévastateur dans la politique.

L’informatique quantique ne fait pas exception à la règle. En exploitant la physique quantique, les ordinateurs quantiques ont le potentiel de trier un grand nombre de possibilités en un temps (quasi) réel. C’est ainsi qu’en 2019 déjà, Google affirmait avoir réussi à produire un algorithme en 200 secondes, là où un ordinateur classique aurait nécessité environ 10.000 ans. Avec de telles vitesses de calcul, l’informatique quantique a le potentiel de découvrir de nouvelles exoplanètes, de créer des modèles sur les changements climatiques ou encore de concevoir de nouveaux médicaments en seulement une heure après le lancement d’un programme.

Pourtant, comme l’explique John Martinis, professeur de physique à l’université de Californie et ancien responsable scientifique du matériel quantique chez Google, « chaque fois que nous disposons d’une nouvelle puissance de calcul, nous pouvons en faire profiter l’humanité, [mais] vous pouvez imaginer que cela pourrait aussi nuire aux gens ».

Tombée entre de mauvaises mains, l’informatique quantique pourrait, en effet, conduire à d’importantes dérives. Dans un article intitulé « Drones, radars, nucléaire : comment le quantique va changer la guerre« , nos confrères de Numerama expliquent notamment que cette technologie pourrait « favoriser les interventions armées et miner la dissuasion nucléaire », ce qui pourrait faire ressurgir « le spectre de la guerre nucléaire ». De la même façon, l’informatique quantique pourrait conduire à des manipulations nuisibles du génome humain.

Des scientifiques veulent instaurer un guide éthique dès aujourd’hui, en préparation du futur

C’est entre autre pour ces raisons qu’un groupe de scientifiques a publié un mini-documentaire intitulé « Quantum Ethics | A Call to Action », et dont l’objectif est de « susciter un débat sur les décisions éthiques auxquelles la société est confrontée à l’ère quantique ».

Selon eux, et bien que les ordinateurs quantiques n’en soient qu’à leurs débuts, il est important de commencer à discuter dès à présent des avantages et des dangers potentiels que pourrait apporter cette technologie. Plus encore, ils estiment qu’il est indispensable de trouver un moyen de les équilibrer, et de les formuler à travers un code de conduite éthique.

Un processus qui demandera très certainement de longues années d’élaboration, mais qu’llyas Khan, fondateur et directeur général de Cambridge Quantum Computing, affirme avoir déjà commencé en entamant notamment des discussions avec les responsables du gouvernement britannique.