Il est fort probable que vous n’ayez jamais entendu parler de Kuaishou et pourtant, son introduction à la Bourse de Hong Kong pourrait être la plus importante du secteur de la tech depuis celle d’Uber en 2019. Méconnue en occident, cette application fait fureur en Chine, pays dans lequel elle s’inscrit comme étant la plus grande rivale de TikTok. Pour cause, Kuaishou revendique 480 millions d’utilisateurs actifs mensuels et a enregistré une impressionnante croissance de 50% de ses revenus sur les neuf premiers mois de 2020.

L’histoire d’un succès né d’une rencontre

C’est en 2011 que commence l’histoire de Kuaishou. Initialement pensée par le chinois Cheng Yixiao pour être un outil de création et de partage d’images animées (GIF), cette application a pris un tournant majeur en 2013, lorsque Su Hua a rejoint l’aventure.

Ancien ingénieur de Google et de Baidu, Su Hua a décidé, en 2011, de lancer sa propre entreprise centrée sur le e-commerce social et qui finira par être rachetée plus tard par Alibaba Group. Lorsqu’il rencontre Cheng Yixiao pour la première fois, il comprend qu’ils partagent tous deux la même ambition : créer un produit destiné aux internautes ordinaires de Chine. Cheng Yixiao décide alors de propulser Su Hua à la tête de son entreprise en tant que CEO, pendant que lui demeurerait chef de produit.

Un arrangement rare, mais qui convient au fondateur historique de Kuaishou. Décrit comme étant un homme préférant le monde virtuel au monde réel, ce dernier serait davantage intéressé par les technologies et les produits, que par le domaine entrepreneurial. Dans le livre The Power to be Seen: What is Kuaishou, Su Hua a d’ailleurs estimé que Cheng Yixiao « pourrait être le PDG de Kuaishou, mais il ne serait pas heureux dans ce rôle ».

Avec une ambition commune et des rôles partagés selon les spécialités et les affinités de chacun, les deux hommes ont pu commencer à mener Kuaishou vers le chemin du succès. Passant d’un simple outil de GIF (2011) à un réseau social destiné aux vidéos courtes (2013), l’objectif de l’application a été trouvé : permettre à Monsieur et Madame Tout Le Monde de s’exprimer sur Internet.

Dans un discours tenu en 2018, Cheng Yixia expliquait que « Kuaishou n’est pas destinée aux stars de cinéma, ni au Big V [leaders d’opinion en ligne, NDLR], mais aux personnes ordinaires ». Plus encore, l’homme estimait que son application se devait d’être aussi simple que possible afin que les gens puissent l’utiliser « quelque soit leur âge ou leur niveau d’éducation ». En ajoutant à cela un algorithme qui privilégie l’égalité et l’inclusion, Kuaishou offre à ses utilisateurs la sensation que « la vie de chacun vaut la peine d’être racontée » et c’est bien là, la clé de son succès.

Kuaishou prêt à faire son entrée à la Bourse de Hong Kong

Au mois de novembre 2020, Kuaishou revendiquait 262,4 millions d’utilisateurs actifs quotidiens et 480 millions d’utilisateurs actifs mensuels, avec un temps de connexion moyen de 100 minutes par jour. Plus encore, l’application a vu ses revenus atteindre les 40,7 milliards de yuans (5,1 milliards d’euros) sur les neuf premiers mois de 2020, ce qui équivaut à une croissance de 50% de ses revenus. Des chiffres vertigineux que l’application doit à ses efforts de monétisation dans l’eCommerce et la publicité, mais aussi au succès de ses vidéos en direct dont elle tire désormais les trois-quarts de son chiffre d’affaires.

Aujourd’hui valorisée à 60 milliards de dollars (contre 28 milliards de dollars en février 2020), Kuaishou est prête à faire son entrée à la Bourse de Hong Kong dès le 5 février prochain, et entend profiter de cette introduction pour lever entre 4,9 et 6 milliards de dollars. Une nouvelle qui a profité à Tencent puisque la firme qui possède 21,5% de Kuaisho, a vu ses actions bondir de plus de 10% à la Bourse de Hong Kong à la suite de cette annonce.

Considérée comme la plus grande rivale de Douyin (la version chinoise de TikTok qui est détenue par ByteDance) dans l’Empire du Milieu, Kuaishou devra néanmoins faire face à un environnement réglementaire particulièrement complexe pour mener à bien son introduction en Bourse.

Rappelons que Pékin se montre de plus en plus méfiante face à la croissance rapide des acteurs de la tech et a décidé de durcir le ton. En novembre dernier, Ant Group en a d’ailleurs fait les frais avec la suspension de dernière minute de son introduction en Bourse. Le même sort sera-t-il réservé à Kuaishou ? Difficile à croire, mais seul l’avenir pourra le confirmer.