Et si on mettait à la poubelle les mots de passe, les cartes bleues, les clefs, les multiples badges, les identifiants et qu’on les remplaçait par… notre visage ? Ce serait bien pratique puisque notre tête, est bien la seule chose qu’on ne peut pas oublier, même pour les plus étourdis ! Ce scénario idéal relève encore de la science-fiction mais les entreprises numériques font de grands pas dans ce sens. Preuve en est la nouvelle technologie de reconnaissance faciale d’Intel, baptisée RealSense ID. Cette dernière repose sur la détection de profondeur de la caméra RealSense qui fonctionne à l’origine comme une caméra de style Kinect, c’est-à-dire qu’elle repère nos mouvements de manière à ce que nos gestes remplacent les touches d’une télécommande. Avec la version ID, Intel repositionne son activité de caméra vers la reconnaissance faciale pour sécuriser l’accès à des appareils dans des lieux publics comme les guichets de banque automatique ou bien les serrures intelligentes.

Le système RealSense ID d’Intel est disponible en précommande à partir de 99 dollars US pour un début de commercialisation en mars 2021. Il existe deux versions : un module qui peut être intégré à d’autres produits et un périphérique autonome branché à un ordinateur.

Quid de la question de la sécurité et des données personnelles ?

La technologie sera-t-elle cependant à la hauteur de la promesse ? Il ne s’agirait pas qu’un bug technique empêche un utilisateur de retirer de l’argent parce que la caméra ne le reconnait pas. On pourrait imaginer une situation similaire à Rekognition d’Amazon qui avait du mal à identifier les femmes et les personnes à la peau foncée. De son côté, Intel assure que sa technologie est à la pointe de la pointe : « Nous avons effectué une vaste collecte de données sur toutes les ethnies d’Asie, d’Europe, du Moyen-Orient et d’Afrique. » RealSense ID s’adapterait même au visage au fil du temps : si on porte des lunettes ou non, si on a de la barbe un jour puis qu’on est rasé le lendemain, si l’on change de coupe de cheveux, etc. Et tout cela, en moins d’une seconde !

Deuxième question : est-ce qu’on peut usurper mon identité et se connecter à ma place avec une photo ou une vidéo ? Non, assure Intel qui précise que sa technologie est axée « sur la protection de la vie privée et conçue pour la protection des utilisateurs ». RealSense ID est censée avoir des mesures pour empêcher les fausses tentatives d’accès avec des masques, des photos ou des vidéos. La firme américaine affirme que sa technologie a une chance sur un million d’identifier une personne à tort. Quant aux informations personnelles, elles seront cryptées rapidement et traitées localement. Enfin, la solution ne devrait s’activer qu’à l’arrivée d’un utilisateur et ne pourra identifier une personne que si elle est enregistrée au préalable.

La caméra RealSense ID créée par Intel

RealSense ID combine la profondeur active avec un réseau de neurones artificiels spécialisé, un système sur puce (SoC) dédié et un élément sécurisé intégré pour chiffrer et traiter les données de l’utilisateur rapidement et en toute sécurité. Image : Intel

Les multiples usages de la reconnaissance faciales et ses dangers

De nos jours, on utilise déjà la reconnaissance faciale dans certaines situations, notamment pour déverrouiller nos smartphones. Le fonctionnement de RealSense ID repose d’ailleurs sur la même technique que Face ID d’Apple, soit le fait de relier la caméra à un réseau de neurones artificiels qui scanne le contour du visage.

Intel n’en est pas à son premier coup d’essai : elle a déjà utilisé la technologie RealSense comme reconnaissance faciale lors de démonstrations diverses comme l’insertion de votre visage dans le jeu Fallout 4, ou bien pour déverrouiller un ordinateur portable avec Windows Hello. L’entreprise fait aussi des tests de reconnaissance faciale sur des images thermiques à des fins médicales. Elle projette même de construire des fauteuils roulants qui se déplaceraient grâce aux expressions du visage de l’utilisateur et une intelligence artificielle. L’application pour s’identifier sur des appareils publics auraient cette fois deux atouts principaux : éviter de toucher des surfaces publiques (notamment en période de pandémie) et sécuriser davantage les services.

D’autres usages de cette technologie ne font pas l’unanimité, notamment ceux fait par le gouvernement et les forces de l’ordre pour la filature d’un individu ou la surveillance de la population par exemple. C’est notamment le cas l’année dernière de la Chine pour identifier la minorité ouïghoure qu’elle persécute ou encore l’été 2020 par la police de New York pour traquer un militant du mouvement Black Lives Matter. Cette question fait l’objet de nombreux débats dans le monde et nécessite une réglementation précise. En France, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) insiste même sur le besoin d’établir un « modèle européen ».