Tandis que l’on commence à enfiler bonnets et gants, il y a un endroit où il ne fait pas froid du tout : dans le réacteur expérimental de la Corée du Sud, aussi appelé « soleil artificiel ». Le centre de recherche KSTAR de l’Institut coréen de l’énergie de fusion (FKE) a annoncé le 24 novembre avoir même atteint un record mondial en maintenant la température des ions plasma au centre du réacteur à plus de 100 millions de degrés Celsius pendant 20 secondes. Plus qu’un simple record, cette performance est historique puisque, auparavant, aucune tentative au monde n’avait réussi à dépasser la limite de 10 secondes.

Créer de l’énergie de la même manière que le soleil

L’objectif de ces expériences est de recréer sur Terre les mêmes réactions en fusion nucléaire que sur le soleil, d’où le surnom de « soleil artificiel ». En plus d’aider les scientifiques à comprendre le fonctionnement de notre étoile, cette reproduction consiste surtout à créer une nouvelle source d’énergie possible par la fusion nucléaire. C’est cette réaction qui permet au soleil de briller. Le but des scientifiques est de l’utiliser pour faire briller nos ampoules et par extension faire fonctionner l’ensemble de nos appareils qui nécessitent de l’énergie. Autant dire beaucoup de choses !

Comment ça marche ? Le « but du jeu » est de transformer un atome d’hydrogène en hélium. Pour faire simple, on insère des atomes d’hydrogène dans un tube à l’étrange forme de donut. On le fait ensuite chauffer à très très haute température (plus de 100 millions de degrés Celsius). Cette chaleur va permettre de dépouiller l’atome de ses électrons. Il ne restera plus que les ions qui formeront une nouvelle masse appelée plasma ionique. Cette mixture particulière va créer de l’énergie (jusqu’à plusieurs milliers d’ampères) que l’on va récupérer via les parois du réacteur et transformer en électricité. La difficulté réside dans la stabilisation du plasma. Si ce dernier n’est pas maintenu à très haute température suffisamment longtemps, il va endommager les parois du système et donc tout casser. Or, jusqu’à présent, les réacteurs ne parvenaient pas à tenir plus de 10 secondes. En doublant la mise, la Corée du Sud fait ainsi un bond technologique considérable !

Prochaine étape : maintenir la température pendant 300 secondes d’ici 2025

L’avantage de cette fusion nucléaire par rapport aux autres manières de créer de l’énergie aujourd’hui (essence, charbon, énergie renouvelable, etc.) est double : théoriquement, il s’agit d’une source d’énergie pratiquement illimitée et surtout propre puisqu’elle ne produit aucun déchet radioactif (bien que l’on parvenait aujourd’hui à transformer ces déchets en batterie). Voilà un programme qui serait totalement compatible avec le besoin d’électricité de la population allié à nos ambitions écologiques de plus en plus fortes.

Pour le moment, l’énergie générée par un soleil artificiel n’est pas encore prête à venir illuminer nos maisons. Les centres de recherche que ce soit en Corée du Sud, en France ou en Chine ont encore besoin de plusieurs années d’expérimentation avant la commercialisation d’un système efficace et fiable. Les avancées technologiques sont toutefois considérables, notamment pour le KSTAR. Le centre coréen a réussi en deux ans à maintenir la température des ions plasma au-dessus de 100 millions de degrés d’une petite seconde et demi (2018) à 8 secondes (2019) jusqu’à 20 secondes (2020). La prochaine étape consistera à tenir le fonctionnement continu pendant 300 secondes d’ici 2025.