Dans le pays du crédit social, un projet de loi sur la protection des informations personnelles cherche à limiter leur contrôle par les entreprises. Cette loi prévoit des amendes s’élevant jusqu’à 7,6 millions de dollars. Toutefois, du point de vue de la protection des données personnelles, les répercussions restent très limitées – pour ne pas dire quasi-inexistantes.

« En comparant les bénéfices des géants de la technologie sur l’exploitation des données personnelles des utilisateurs, je ne pense pas que les sanctions soient si importantes », estime Wang Zhicheng, un professeur de finance de l’université de Pékin. Au premier trimestre 2020, Alibaba, l’un des BATX, enregistrait un chiffre d’affaires équivalent à 14,7 milliards d’euros. La condamnation du Safari Park de Hangzhou à une amende 1 038 yuans (de l’ordre de 132 euros) pour avoir remplacé son système d’identification sans prévenir les clients, et pour avoir collecté illégalement des données biométriques, témoigne de ce déséquilibre.

Pour le professeur, même avec des montants plus élevés les amendes resteront peu dissuasives pour réduire les violations liées aux données personnelles. D’autant plus que la loi sera soumise à un autre obstacle, celui des conditions générales d’utilisation : « Il est facile pour les entreprises d’ajouter telle action pour se conformer à la loi, mais cela ne permet pas d’atteindre l’objectif de la loi qui est de protéger les données personnelles », explique Wang Zhicheng. D’autant plus que pour l’instant, le projet de loi, qui n’est pas soumis aux observations du public, contient peu de précisions sur ce qui est considéré comme conforme. Cette ambiguïté peut accroître l’application de la loi ou au contraire la restreindre.

Ce projet de loi sur la protection des informations personnelles vient en appui de la loi sur la cybersécurité, et sur un autre projet de loi sur la sécurité des données.

Derrière cette image progressiste en matière de protection des données personnelles, le Parti communiste chinois développe dans le même temps une carte d’identité biométrique. Le ministère de la Sécurité publique expérimenterait cette nouvelle carte dans les provinces du Fujian et du Guangdong, avant de l’étendre à l’ensemble du pays. Le directeur de la cybersécurité à l’institut pour la défense nationale et la recherche sur la sécurité à Taiwan, Tseng Yi-shuo met en garde sur la centralisation de données personnelles dans un endroit unique : « Nous parlons des informations personnelles les plus confidentielles et sensibles, comme la santé, et les données biologiques. Il s’agit d’une collecte de données à grande échelle ».