Dans des témoignages écrits rapportés dans un article de Reuters, le directeur général de Twitter, Jack Dorsey, celui d’Alphabet, Sundar Pichai, et Mark Zuckerberg s’opposent à un durcissement des règles visant la modération de contenus. Aujourd’hui, celle-ci est encadrée par la section 230 de la loi sur la décence en matière de communication, et elle pourrait être bientôt modifiée avec la mise en place du projet de loi Protecting Americans from Dangerous Algorithms Act.

Si ce projet de loi passe, les réseaux sociaux seront tenus responsables du contenu partagé sur leurs plateformes et seront obligés de modérer certains sujets. C’est le cas de ceux qui seraient reliés à du terrorisme. Cette approche va à l’encontre de la vision étasunienne de la liberté d’expression, dans laquelle chacun est libre de tenir le discours qu’il souhaite, même s’ils sont discriminants, comme des propos antisémites.

« Je recommande vivement au comité d’être très attentif »

Jack Dorsey voit dans ce changement juridique un renforcement de l’oligopole numérique américain et appelle à « la réflexion et à la retenue lorsqu’il s’agit de solutions réglementaires générales pour traiter les problématiques de modération de contenus. Des réglementations radicales peuvent renforcer la position des entreprises qui ont d’importantes parts de marché ».

Mark Zuckerberg, qui est dans une situation plus délicate que celle du PDG de Twitter, notamment à cause de la menace de scission entre Instagram et Facebook, fait plutôt profil bas : « L’article 230 a permis la mise en place de tous les grands services d’internet. Le Congrès devrait mettre à jour la loi pour s’assurer qu’elle fonctionne comme prévu. Nous soutenons les idées sur la transparence et la collaboration dans le secteur, qui sont discutées dans certaines des propositions bipartites actuelles ».

Quant à Alphabet, avec son moteur de recherche Google, la situation est plus délicate. L’objectif premier, encore plus que pour les réseaux sociaux, est de transmettre de l’information. « Je recommande vivement au comité d’être très attentif à toute modification de la section 230 et d’être très conscient des conséquences que ces changements pourraient avoir sur les affaires et les consommateurs ».

Le directeur de la Commission fédérale des communications, Ajit Pai, n’a pour le moment pas apporté beaucoup de détails sur l’avenir de la section 230 : « Nous ne parlons pas d’imposer des réglementations aux réseaux sociaux. Nous parlons d’interpréter une clause d’immunité », explique-t-il. Il a toutefois précisé qu’il ne ressentait aucune pression de la part de la Maison-Blanche, un son de cloche positif alors que Donald Trump a été récemment visé par la modération de Twitter.

Du côté des politiques, il n’y a pas de grands débats. Effectivement, les Républicains et les Démocrates ont exprimé des inquiétudes communes à propos de la modération, qu’elle soit ratée ou réussie, faite par Twitter, Google, Facebook ou Instagram. L’affaire reste à suivre dès la fin de la commission sénatoriale qui se déroule aujourd’hui, le 28 octobre 2020.