L’e-santé à de beaux jours devant elle. Un accord vient d’être paraphé par 235 industriels du secteur et le ministère de la Santé. Objectif : multiplier les chantiers numériques et moderniser un système de santé soumis à rude épreuve depuis le début de la crise de Covid-19.

« Nous sommes heureux et fiers de compter autant de signataires de cette charte d’engagement pour faire avancer la e-santé en France. Cela démontre le partage, par les industriels du secteur, du cadre de valeurs et de la vision que nous portons au travers la feuille de route du numérique en Santé », ont commenté Laura Létourneau, déléguée ministérielle au Numérique en Santé, et Dominique Pon, responsable ministériel au Numérique en Santé.

Le système de santé face au chantier du numérique

La charte fait suite aux conclusions rendues lors du Ségur de la Santé de juillet dernier, au cours duquel le gouvernement s’était engagé à injecter 2 milliards d’euros pour le développement de l’e-santé. Le Ségur de la Santé avait pris forme le 17 mai, lorsqu’une consultation avait été lancée pour mettre en lumière axes de développement du numérique en santé. Un projet nécessairement accéléré par les défaillances soulevées depuis le début de la pandémie. Le gouvernement précisait d’ailleurs dans son communiqué que l’enveloppe allouée devra permettre de « donner un coup d’accélérateur sans précédent pour rattraper le retard dans la modernisation, l’interopérabilité, la réversibilité, la convergence et la sécurité des systèmes d’information en santé ».

Parmi les axes prioritaires, celui de la télésanté fait l’objet d’une attention particulière. Lors du pic de la première vague de Covid-19 fin avril, le leader français de la consultation en ligne Doctolib publiait un chiffre révélateur : la plateforme est passée de 1 000 à 100 000 téléconsultations par jour. Un usage qui se démocratise par nécessité. Si pendant de nombreuses années, le corps médical a pu se montrer dubitatif envers la pratique des consultations en ligne, nombre d’entre eux ont sauté le pas depuis le début de l’épidémie. Comme le rapportait 01net février dernier, seul un médecin sur dix exerçait en téléconsultation. Deux mois plus tard, c’était un médecin sur trois. La décision de la sécurité sociale de rembourser désormais 100% de ces consultations en ligne (contre 70% auparavant) a sans doute aidé à convaincre.

La téléconsultation fait partie des dossiers concernés par la charte « Engagé pour la e-santé ». Celle-ci liste également d’autres axes de travail : développement de systèmes d’information, de services et outils numériques conformes aux référentiels du ministère, la création d’applications dans le futur espace numérique de santé, la communication transparente sur les initiatives dans le secteur de l’e-santé. La feuille de route est tracée, et les 235 industriels signataires ont pris l’engagement d’apporter leur expertise pour faire évoluer le secteur de la santé grâce aux outils numériques.

la e-santé : un marché à 22 milliards d’euros

Parmi les acteurs engagés, on trouve notamment Withings, le fabricant d’objets de santé connectés. Fin juillet, Withings bouclait d’ailleurs un nouveau tour de table à hauteur de 53 millions d’euros pour financer son développement aux États-Unis ainsi que pour concevoir de nouveaux objets médicaux non invasifs dotés d’algorithmes plus poussés.

Docaposte, la filiale de La Poste spécialisée dans les affaires numériques, se trouve également dans la liste des signataires. Il y a deux mois, Docaposte faisait justement une entrée majoritaire au capital de Nouveal e-santé, start-up française spécialisée dans la numérisation du parcours médical et les solutions de suivi des soins.

Autre étoile montante dans la numérisation du système de santé, la start-up lilloise Mon Qualiticien développe un logiciel de gestion à destination des établissements de soin. L’objectif est de digitaliser les services liés à la démarche qualité des établissements de santé. 80% de ses clients sont des EHPAD, établissements en grande difficulté depuis début mars pour se prémunir contre l’entrée de la Covid-19 et contenir sa propagation.

On trouve donc dans cette charte signée par le gouvernement français plus de 200 autres acteurs de la transformation numérique du système de santé. Un marché encore embryonnaire, mais qui a toutes les chances de prendre une ampleur conséquente dans les années à venir. L’Institut Montaigne chiffrait, en juin dernier, à 22 milliards d’euros le marché annuel potentiel de l’e-santé. Le rapport établit que « Les technologies numériques, encore sous-utilisées dans le secteur de la santé en France, sont pourtant des outils clés pour améliorer l’efficience, la qualité et la sécurité de notre système de santé. Elles sont créatrices de valeur pour l’ensemble des acteurs de l’écosystème. »

L’Institut Montaigne soulève également un aspect qui sera crucial dans le développement de l’e-santé en France : la transparence et la sécurité dans la gestion des données personnelles: « l’utilisation responsable des données de santé est un préalable pour garantir la confiance des utilisateurs dans ces solutions numériques, qui s’appliquent dans des domaines variés comme la prévention, le maintien à domicile, le suivi d’une maladie chronique à distance les dossiers médicaux électroniques ainsi que les applications mobiles. »