En juillet 2020, de nombreuses compagnies comme Honda, Coca-Cola, Starbucks ou encore Ben & Jerry’s décidaient de soutenir le mouvement #StopHateForProfit, lancé par plusieurs groupes défenseurs des droits civiques. L’objectif était simple, lutter contre la diffusion de propos racistes et haineux sur les réseaux sociaux en retirant leurs contenus publicitaires de la plateforme Facebook. Directement liée aux protestations qui auront suivi la mort de George Floyd en juin 2020, cette campagne aura-t-elle vraiment servi ?

Une action de communication qui profite aux grandes entreprises sans vraiment inquiéter Facebook

Si les associations reconnaissent que la participation d’un groupe comme Coca-cola aura évidemment permis de donner un énorme coup de projecteur sur leur campagne, celle-ci ne semble pas avoir l’effet escompté. D’après les déclarations de Mark Zuckerberg au début de l’été 2020, ce type d’action ne risquait pas d’impacter lourdement sur les revenus du groupe. Il semblerait qu’il ne se soit pas trompé, si l’effet d’annonce groupée avait entamé une chute des actions en bourse pour le réseau social, il n’empêche que les revenus, eux, sont toujours aussi conséquents : « Facebook a déclaré que les revenus publicitaires globaux avaient augmenté de 10% par rapport à l’année dernière, un taux la société prévoit de continuer pendant tout le trimestre. », pouvait-on lire dans le New York Times le 1er août.

Certains employés restés anonymes ont déclaré au journal The Guardian que sans engagement à long terme de la part des annonceurs, rien ne pourra changer. À en croire les propos tenus par Mark Zuckerberg qui comparait cette campagne de juillet à un chantage auquel Facebook ne céderait pas, il semblerait en effet que l’action doit être maintenue par l’ensemble des acteurs sollicités par le groupe de défense des droits civiques, l’Anti-Defamation League.

Combat difficile à mener lorsqu’on apprend que sur 60% des clients DEG qui ont rejoint le boycott de juillet, quatre sur cinq prévoient de revenir sur Facebook en août, beaucoup ayant « décidé que c’était trop pour eux pendant une période économique difficile de rester à l’écart », déclare Quinn Sheek au journal, spécialiste en recherche média.

 

Coca-Cola, un des vrais gagnants de cette histoire ?

Dans un contexte plus large que celui qui a été décrit, la crise due au Covid-19 aura poussé les entreprises à faire des coupes dans leur budget, en particulier dans le secteur de la publicité. Aussi nombreuses sont les sociétés qui, sans pour autant se joindre publiquement à la campagne de juillet, ont décidé de réduire les budgets publicitaires.

Certains avaient même annoncé quelques mois plus tôt, comme ce fut le cas pour Coca-cola en mars 2020, la suspension de l’ensemble de ses investissements dans la communication et la publicité. Difficile de ne pas considérer la campagne anti-racisme de juillet comme une aubaine pour la direction marketing… Un mal pour un bien, sans doute.

Il est intéressant en tout cas d’observer les différentes stratégies suivies par les grands groupes pour surmonter la crise sanitaire de cette année. Coca-Cola a su profiter de cette dernière action de communication pour lancer une nouvelle campagne titrée « Plus ouvert que jamais » et censée prôner une nouvelle manière de voir les choses…

Capture d'écran bande-annonce de Coca-Cola

Capture d’écran : YouTube – Coca-Cola / Siècle Digital

Facebook, lui, ne déroge pas à ses habitudes. Attitude relativement logique quand on sait que le réseau social est désormais incontournable pour des milliers de petites entreprises en terme de visibilité. Pression modérée donc pour le réseau social qui a de quoi résister financièrement sous l’effet de ces suspensions reliées à la campagne de juillet et qui plus est, temporaires.

Pour finir, si Facebook, soucieux de son image n’a de cesse de déclarer que tout est fait pour améliorer le système de régulateurs de contenus, une question persiste : étant donné son nombre d’adhérents, le groupe a-t-il les moyens réels de réguler le contenu diffusé sur sa plateforme ? C’est en tout cas la question que posait le Congrès américain à Mark Zuckerberg lors de son audition le 29 juillet 2020, au sujet de la circulation de fausses informations concernant la procédure à suivre pour lutter contre le Covid-19. Le cas étant jugé plus qu’épineux puisque ce type de propagande peut coûter la vie des gens, rappelait le président du Comité. Une fois plus donc, il s’agit de déterminer jusqu’à quel point les citoyens, comme les entreprises, sont capables de développer une responsabilité tantôt individuelle, tantôt collective face à l’ampleur d’un réseau social comme Facebook.