Le français Withings poursuit sa renaissance. Quatre ans après un rachat par Nokia, et deux ans après être revenu dans les mains de son cofondateur Eric Carreel, le fabricant d’objets connectés boucle un tour de table à hauteur de 53 millions d’euros. Mené par le fonds spécialisé dans la santé Gilde Healthcare, Idinvest Partners et Bpifrance, Withings affiche ses ambitions pour reconquérir un marché qu’elle avait quelque peu délaissé.

Withings, passé entre les mains de Nokia

Véritable pionnier dans l’e-santé, Withings sort d’une parenthèse tumultueuse de quatre ans. En 2016, Eric Carreel cède son entreprise à Nokia, la mort dans l’âme. « Nous ne cherchions pas particulièrement un acquéreur. Nokia nous a approchés et cette opportunité avait du sens car le groupe disposait de la force de frappe ou des compétences que Withings n’avait pas encore acquises à l’époque, pour asseoir une marque médicale sur le plan mondial »explique Maïlys Ferrère, directrice du fonds Bpifrance Large Venture. Withings s’efface et devient alors Nokia Health. Une idylle avec le groupe finlandais qui ne sera finalement que de courte durée.

Deux ans après avoir déboursé 170 millions d’euros pour acquérir Withings, la stratégie de diversification de Nokia est un échec. Nous sommes en 2018, et Withings revient sous le giron de son cofondateur Eric Carreel. Un retour aux sources, et à l’indépendance salué par beaucoup en France, où se trouve toujours la maison mère et ses plus de 200 salariés. « La raison profonde de cette revente est que Nokia a décidé de se concentrer sur le B2B. Le travail autour de Withings durant près de 2 ans a été fait avec conviction et sincérité, aussi bien la décision d’acheter la société en 2016 que celle de se dire, finalement, que ce n’était pas leur métier », précisait Eric Carreel dans une interview pour Les Numériques en juin 2018.

L'équipe de Withings recrute pour la fin d'année

Image : Withings

Un marché de l’e-santé en pleine expansion

Dans un monde où médecine et data sont très étroitement liés, les habitudes consommateurs ont évolué. Une évolution certes bousculée par le contexte de la crise sanitaire, mais qui aura aussi pour effet de créer des attentes sur le marché. Les exemples sont multiples. Le français Doctolib a multiplié par 100 le nombre de téléconsultations journalières. De l’autre côté de l’Atlantique, Microsoft déployait en mars son IA pour aider à la détection des symptômes du coronavirus.

Le CEO de Withings, Mathieu Letombe, évoque l’impact de la crise de Covid-19 sur le marché de la santé : « Deux tendances ont été renforcées par la crise sanitaire : les utilisateurs ont pris conscience qu’il est important de prendre soin de soi et de surveiller le risque de maladie chronique. Cela s’est traduit pour Withings par une augmentation de 50% de la demande pour toutes nos catégories de produits. D’autre part, le monde de la santé s’oriente vers une médecine axée sur le quotidien, avec un suivi à distance ».

Pour Withings, le tour de table bouclé la semaine dernière poursuit deux objectifs.

Premier chantier, l’acquisition de parts de marché avec en ligne de mire : les Etats-Unis. Un marché cible de Withings, que son cofondateur Eric Carreel juge plus mature que le marché français : « Aux Etats-Unis, de nouveaux métiers se créent autour de l’accompagnement des malades ou des gens soucieux de leur santé. C’est là-bas que nous devons travailler. Une nouvelle médecine préventive est en train de s’inventer. Nous sommes à l’intersection des consommateurs, des données et de la santé ».

Une partie des fonds levés sera donc consacrée à soutenir la croissance sur le marché américain. Le CEO de Withings, Mathieu Letombe, détaille la feuille de route : « L’enjeu sera de comprendre quels seront les prochains biomarqueurs indispensables à l’industrie pour adapter nos futurs produits en fonction de leurs besoins. Nous recherchons des forces commerciales et marketing pour le marché américain, mais aussi des ingénieurs pour l’équipe technique car ces acteurs BtoB ont des demandes spécifiques pour lesquels il faut personnaliser nos produits ». 

Withings investit en R&D et signe des partenariats dans la santé

Cependant, la priorité a été entourée : les 53 millions d’euros levés seront d’abord investis en R&D. D’un côté, il s’agira de continuer à concevoir de nouveaux objets médicaux non invasifs dotés d’algorithmes plus poussés. Les produits actuels seront également enrichis, à l’image du tensiomètre Withings : « L’objectif est de passer d’une vingtaine de paramètres vitaux que l’on peut suivre aujourd’hui avec nos produits à une centaine sur les prochaines années », indique Mathieu Letombe.

Des objets connectés estampillés Made in France. L’année dernière, nous vous présentions la montre connectée Move, produite dans la toute fraîchement inaugurée manufacture d’Issy-les-Moulineaux. Dans quelques jours, Withings s’apprête à sortir une nouvelle montre connectée, la SanWatch.

Dix ans après le lancement de son tout premier objet connecté sur le marché (la balance Body Cardio), Withings devrait continuer à développer ses gammes ; et ses partenariats avec la communauté médicale. L’université de Harvard et l’hôpital Georges Pompidou de Paris sont désormais des partenaires privilégiés de l’entreprise dans le cadre de projets de recherche.