En analysant 200 millions de tweets à propos du coronavirus, des chercheurs de l’université Carnegie-Mellon à Pittsburgh ont démontré que de très nombreux bots diffusaient des informations erronées ou douteuses sur la pandémie. 34 % des retweets concernant la « réouverture de l’Amérique » sont également réalisés par des bots.

L’Amérique scindée en deux

Pays le plus touché par le Covid-19 avec plus de 100 000 décès, les États-Unis sont aussi en plein débat concernant le confinement de la population. Tandis que Donald Trump et ses soutiens prônent la réouverture du pays afin de faire repartir l’économie, leurs opposants continuent de vanter la distanciation sociale préconisée par la communauté scientifique… Et le débat fait également rage sur les réseaux sociaux.

Afin de se rendre compte de l’impact des bots sur ces sujets, les chercheurs ont utilisé une IA pour les débusquer et les résultats de leur rapport sont impressionnants. Sur les 200 millions de tweets analysés depuis le mois de janvier, les 1 000 comptes qui retweetent le plus sont composés à 62 % de bots. Pire encore, ce chiffre passe à 82 % pour les 50 retweeters les plus influents. Plus de 100 histoires et faits erronés sur la pandémie ont par ailleurs été identifiés.

Les chercheurs ont en outre étudié les tweets prônant la réouverture de l’Amérique et se sont rendus compte que 66 % d’entre eux étaient en fait des humains se servant de bots, et que 34 % étaient des bots. Pour Kathleen Carley, professeure de science informatique et autrice principale de l’étude, ces chiffres sont éloquents :

« Nous observons jusqu’à deux fois plus d’activité de bots que ce que nous avions prévu sur la base des catastrophes naturelles, des crises et des élections précédentes ».

Des fausses informations pour influencer l’opinion publique

Pour identifier les bots, les chercheurs ont pris en compte plusieurs facteurs : la fréquence des tweets, la localisation de ces derniers (certains publient à quelques secondes d’intervalle d’un bout à l’autre du monde), ainsi que les messages relayés qui sont souvent très similaires les uns aux autres et indiquent donc une action de copier/coller.

Les chercheurs supposent ce taux si élevé est dû aux mesures de confinement, qui ont laissé plus de temps aux individus de développer les bots. Surtout, Kathleen Carley estime qu’ils ont également été mis au point à des fins de propagande politique. Les comptes relayant des informations sur la réouverture des États-Unis étaient également ceux diffusant des théories du complot sur la 5G ou encore sur le fait que les hôpitaux étaient en fait remplis de mannequins :

« Les théories du complot augmentent la polarisation des groupes. C’est le but de nombreuses campagnes de désinformation. Les gens ont de réelles préoccupations concernant la santé et l’économie, et d’autres en profitent pour créer des divisions. Une polarisation accrue aura diverses conséquences dans le monde réel et se traduira par des comportements électoraux différents et une hostilité envers les groupes ethniques ».

Twitter doit faire mieux

Cette étude n’est pas une très bonne nouvelle pour Twitter qui avait décidé de prendre le taureau par les cornes en luttant contre la désinformation sur sa plateforme. Le réseau social a ainsi annoncé la suppression de tweets erronés à propos du coronavirus et de la 5G, mais également l’ajout d’étiquettes pour prévenir ses utilisateurs d’informations douteuses, mais il devra sûrement redoubler ses efforts.

Il semblerait que la guerre lancée en 2018 par Twitter contre les bots soit encore (très) loin d’être gagnée…