Si vous prenez un groupe d’amis échangeant autour d’un verre sur LA musique des années 2010, celle dont tout le monde peut fredonner le refrain, il y a peu de chance que les protagonistes se mettent d’accord. Si nous faisons maintenant un pas de côté en interrogeant des professionnels sur la rengaine de la décennie dans les départements marketing-communication, le consensus serait sans doute plus aisé autour de la formule “il faut être sur les réseaux sociaux”.

Dans son nouveau rapport « It’s OK To Break Up With Social Media », Forrester avance que “les médias sociaux sont devenus un bourbier où les professionnels du marketing se disputent l’attention des consommateurs”, des “trouble-fêtes que les membres des réseaux sociaux n’ont jamais invités”. Chiffres à l’appui, la société d’études de marché encourage les organisations à prendre du recul sur les réseaux sociaux, sans toutefois sans désintéresser.

Des spécialistes du marketing complices du désordre des médias sociaux

Guidées par la Fear of missing out, les marques se sont toutes ruées sur les réseaux sociaux, créant des pages et s’invitant dans les conversations sans que toutefois les utilisateurs ne soient très réceptifs. Près des deux tiers des utilisateurs américains déclarent que les marques ne produisent pas de contenus intéressants, un chiffre qui souligne que les entreprises n’arrivent pas à comprendre ce que les utilisateurs désirent en matière de contenus. Mis à part quelques réussites organiques, les autres se sont rabattus sur les social ads faisant grimper le budget des dépenses mondiales à 75 milliards de dollars en 2018, un chiffre qui devrait atteindre les 165 milliards de dollars en 2023.

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Le rapport mentionne qu’en sus de la participation à la prolifération du bruit généré par les contenus de marque, les entreprises sont parfois à l’origine de la toxicité des réseaux sociaux. Forrester revient sur le cas des thés désintox qui s’appuyait sur des célébrités pour présenter de manières fausses leurs bienfaits pour la santé. De même avec l’exemple du Fyre festival qui s’est appuyé sur une campagne énorme d’influence marketing, vendant des tickets sans assurer la prestation derrière.

Des marques vaniteuses qui pensent que les réseaux sociaux tournent autour d’elles

Les analystes soulignent que la plupart des canaux marketing sont une poussée unidirectionnelle de messages aux consommateurs. Or les réseaux sociaux occupent une place à part, un espace permettant la conversation mais “les entreprises exigent beaucoup des utilisateurs sociaux : « Écoutez-nous, ouvrez votre portefeuille, engagez-vous dans une relation à long terme », c’est une histoire d’amour non réciproque”.

L’erreur tiendrait de l’excès de zèle dans l’utilisation et l’exploitation des réseaux sociaux sur toutes les facettes possibles du cycle de vie client.

À rebours des pratiques actuelles, le rapport avance que les consommateurs souhaitent mener la conversation et être entendus. En ce sens, les marques devraient appréhender les réseaux sociaux pour ce qu’ils sont, un formidable terrain pour “combiner les données d’écoute sociale avec les données non sociales pour comprendre les consommateurs”, “tirer partie du service de relation client social pour améliorer le retour d’information à l’échelle de l’entreprise” et “observer les communautés sociales, les notes, les évaluations ainsi que l’user generated contents pour obtenir des insights”.

Les médias sociaux ne seraient pas essentiels aux marques pour atteindre leurs objectifs

Le rapport de Forrester va plus loin en estimant que les réseaux sociaux n’arrivent toujours pas à constituer un versant marketing mesurable pour les entreprises, et d’assener que “sur les 4 dernières années, les CMO estiment que les médias sociaux contribuent trop peu à la performance des entreprises, leur attribuant systématiquement une note de 3 sur une échelle de 7 points. En 2020, 32% des CMO ne sont toujours pas en mesure de montrer leur impact business, alors que seulement 30% peuvent prouver l’impact quantitativement”.

Forrester enjoint les marques à se désengager pour se concentrer sur leurs valeurs en tant qu’entreprise, protester lorsque les réseaux sociaux se fourvoient et prendre du recul sur les modèles de mesure clos proposés par les plateformes sociales.

Ce sont les consommateurs, et non les entreprises, qui définiront les marques sur les médias sociaux

Selon le rapport, les médias sociaux vont, si ce n’est pas déjà fait ou en cours, perdre leur côté “cool”. 41% des millenials et de la génération Z y consacrent déjà moins de temps. Autres signaux faibles, le PDG de Pinterest qui voudrait que l’on ne qualifie pas la plateforme de réseau social tandis qu’un employé de TikTok interrogé par Forrester aurait répondu qu’il n’aimait pas le mot “réseau”.

Une étude de l’association américaine de marketing (aMa) a révélé que l’utilisation des médias sociaux diminuera ou se stabilisera au cours des trois prochaines années, alors que, paradoxalement, 68 % des annonceurs prévoient une augmentation des dépenses.

D’après Forrester, la tendance devrait faire évoluer les approches des professionnels du marketing B2C car un switch va s’opérer vers le contenu organique produit par le consommateur. Les entreprises se réorganiseront pour avoir une vision plus large sur les insights consommateurs sans la réduire aux réseaux sociaux. Enfin, les consommateurs deviendront les principaux ambassadeurs et imposeront la transparence aux marques.