Alors que Christophe Castaner déclarait hier soir sur France 2 que l’hypothèse d’un traçage des données pour lutter contre l’épidémie de coronavirus « n’est pas dans la culture française et nous n’y travaillons pas », Emmanuel Macron n’a pas l’air d’être du même avis. Le CARE (Comité Analyse Recherche et Expertise) réfléchit actuellement à la mise en place d’un traçage numérique, ce qui inquiète de plus en plus la Cnil.

Subira-t-on en France un traçage numérique exceptionnel ?

La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) tente, en pleine crise, de prendre part au débat. L’Union européenne est déjà en train d’activer des mesures pour généraliser le pistage massif des populations afin de mieux comprendre la propagation du virus et de la limiter. Plusieurs pays sont passés par cette étape pour endiguer l’épidémie, certains sont justement européens. Parmi eux, nous retrouvons : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Chine, la Corée du Sud, l’Espagne, les États-Unis, l’Italie, Israël, la Pologne, la Russie, ou encore Taïwan.

Selon la Cnil : « l’exploitation des données de géolocalisation doit respecter certains principes fondamentaux ». La commission a envoyé ses recommandations au gouvernement pour permettre au CARE de peser le pour et le contre dans cette décision d’un potentiel pistage massif des français. La Cnil rappelle que :

« Les impacts sur les droits et libertés fondamentaux des personnes dépendront du type de traitement réalisé sur les données de localisation. Actuellement, le Règlement général sur la protection des données (RGPD) et la directive ePrivacy permettent selon certaines modalités de traiter de telles données, notamment de manière anonymisée ou avec le consentement de la personne ».

La Cnil veut protéger les français

Si demain un suivi individuel, et non plus anonymisé, devait être mis en place, la Cnil affirme qu’il devra absolument reposer sur une démarche volontaire et consentie de la part de la personne. Le risque, vous l’avez compris, serait de bafouer les libertés individuelles des citoyens français. Alors, faut-il être prêt à cela en période de crise ? C’est vraisemblablement l’opinion des coréens qui se sont parfaitement pliés à ces mesures strictes.

En effet, en Corée du Sud, l’approche est légèrement différente car ce sont des développeurs indépendants qui ont mis à disposition des cartes en ligne pour suivre les lieux qui comportent le plus de personnes infectées. Un responsable de la santé coréen affirme même que : « il y a cinq ans, après qu’une infection massive ait eu lieu lors de l’épidémie de MERS, nous avons subi une réaction négative de la part de l’opinion publique parce que nous n’avions pas rendu public l’endroit où les malades étaient allés ». Cette fois-ci le pays n’aura pas commis la même erreur.

Quoi qu’il en soit, la Cnil précise qu’elle : « se tient à la disposition des pouvoirs publics et des responsables de traitement pour accompagner les initiatives permettant de lutter contre la pandémie tout en protégeant la vie privée des personnes ».

À la fin de la crise, un examen poussé de ces dispositifs exceptionnels aura lieu pour s’assurer qu’ils ne continuent pas d’exister dans le temps. L’économiste Thomas Porcher déclarait récemment sur Usbek & Rica que « cette crise est un moment idéal pour faire passer les pires lois », attendons de voir…