Alors que la CNIL s’inquiétait du projet de surveillance numérique de la part des services fiscaux, c’est officiel : la grande majorité de cette mesure controversée a été validée par le Conseil constitutionnel.

Le fisc va expérimenter la surveillance numérique

Le projet initié par Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des comptes publics a suscité de vives inquiétudes chez le gendarme du net. La CNIL expliquait en octobre que cette proposition soulevait des « questions inédites en matière de protection des données personnelles ». Concrètement, le projet consiste à surveiller automatiquement certains réseaux sociaux et plateformes web (Le Bon Coin, Facebook, Rakuten, Ebay, Instagram…) dans le but de détecter plusieurs infractions fiscales à l’aide d’un algorithme créé à cet effet. Les Sages viennent de valider (partiellement) le projet du ministre.

Si le Conseil constitutionnel ne s’oppose pas à l’intégralité du texte, il décide toutefois de restreindre légèrement son champ d’application : « le législateur a assorti le dispositif critiqué de garanties propres à assurer, entre le droit au respect de la vie privée et l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée ». Les membres du Conseil constitutionnel ont censuré l’un des sept cas d’application du projet de surveillance numérique. En effet, il ne sera pas possible de recourir à ce dispositif pour les cas de contribuables coupables d’un défaut de déclaration et déjà sous le coup d’une mise en demeure.

Cette nouvelle mesure fera donc l’objet d’une expérimentation de trois ans, de la collecte par le fisc et les douanes, des données personnelles publiques, notamment sur Facebook, Instagram, et toutes les autres plateformes susceptibles de donner des indications sur le train de vie des contribuables. L’intelligence artificielle est au cœur du projet car c’est un algorithme qui aura la tâche de débusquer les signes qui pourraient laisser penser qu’un internaute est un fraudeur.

Cet algorithme sera-t-il respectueux de notre vie privée ?

Avant que le texte ne soit adopté, la CNIL se demandait si les données de fraudeurs seraient les seules à être collectées. C’est toute la question car pour être performant l’algorithme devrait collecter de nombreuses données pour repérer les fraudeurs. Les données d’internautes n’ayant rien à se reprocher devront donc aussi être collectées pour que l’intelligence artificielle puisse faire la différence avec les fraudeurs.

Le gendarme du net réclame toujours des garanties qui permettraient d’éclaircir cet aspect. De son côté, Gérald Darmanin estime que : « ce ne seront que des contrôles ciblés. La CNIL a été consultée dès le début d’année sur le projet. La loi n’était pas juridiquement nécessaire, mais le ministre a souhaité qu’il y ait un vrai débat démocratique et que le Parlement puisse vérifier que les bonnes garanties ont été prévues ».