Le Financial Times a révélé le 9 décembre l’existence d’une note non publique chinoise surnommée « 3, 5 ,2 ». Cette note date du printemps dernier. Elle vise à supprimer progressivement tous les ordinateurs et logiciels étrangers de l’administration de l’empire du Milieu.

Une décision prise en pleine guerre commerciale

La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine dure depuis bientôt deux ans. Cette guerre faite de pic de tensions et de désescalade a touché le secteur des télécommunications en mai 2019, lorsque Donald Trump a banni Huawei du territoire américain ainsi que l’entreprise ZTE.

Quelques mois plus tard, le président américain avait décidé de se montrer plus souple. Cela n’a pas empêché certains dégâts : Huawei, qui n’a plus d’accès à Android, doit développer en urgence son propre OS HarmonyOS. En parallèle les réseaux 5G de Huawei et ZTE, accusés de faciliter l’espionnage chinois, vont peut-être être remplacés aux États-Unis

Dans ce contexte particulièrement trouble, la réponse chinoise ne s’est pas fait attendre. La note date approximativement de la même période que l’annonce des sanctions américaines contre Huawei. La directive chinoise prévoit la fin de l’utilisation de matériel étranger dans l’administration chinoise d’ici 2022. Elle émane directement du bureau central du Parti communiste chinois.

Les entreprises ou les États-Unis ne sont pas clairement mentionnés. Toutefois les cibles semblent bel et bien américaines, HP, Dell et Microsoft en particulier.

Le plan chinois vise à remplacer 30% de son matériel étranger en 2020, 50% en 2021 et les 20% restant en 2022, d’où son surnom 3, 5, 2. Selon le courtier China Securities, cité par le Financial Times ,cela concerne entre 20 et 30 millions d’unités informatiques à remplacer. Le marché chinois, public et privé, représente 150 milliards de revenus par an pour les acteurs américains.

Ce choix, qui vise clairement à réduire la dépendance de la Chine face aux États-Unis, est très ambitieux. En soi le remplacement des ordinateurs ne devrait pas être l’aspect le plus compliqué de cette transition. Le groupe Lenovo est le deuxième constructeur mondial depuis qu’il a racheté le secteur PC d’IBM en 2005.

Adopter uniquement des technologies locales, plus faciles à dire qu’à faire

Bien sûr Lenovo, comme toute multinationale moderne, a beau être chinois sur le papier ses appareils n’en contiennent pas moins des produits fabriqués hors de Chine. Parmi les composants délocalisés, des processeurs Intel et des disques durs Samsung.

Autre difficulté, et pas des moindres, la pauvreté chinoise en matière de système d’exploitation performant. Le kylin OS a du mal a rivalisé avec la version de Windows 10 spécifiquement développé par Microsoft pour le territoire chinois.

Cette note n’est pas nécessairement inédite de la part des autorités de l’empire du Milieu. En 2017 une loi ayant comme thématique la cybersécurité avait déjà pour objectif d’inciter les organismes gouvernementaux à utiliser une technologie « sûre et contrôlable ». La guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis pourrait se transformer peu à peu en guerre froide numérique au fur et à mesure de l’édification de murs technologiques.