Face à la propagation du virus de la dengue au Brésil, un laboratoire de Rio de Janeiro tente une expérience pour lutter contre ce fléau. L’idée est simple : inoculer une bactérie chez les moustiques, responsables de l’expansion du virus.

Une bactérie résistante au virus, transmise aux générations futures

Des chercheurs de l’institut Fiocruz ont réussi à inoculer la bactérie Wolbachia, connue pour résister à la dengue ainsi qu’au chikungunya. Les moustiques porteurs de la bactérie peuvent ainsi la transmettre aux générations suivantes. L’objectif est donc d’immuniser les moustiques, les rendant ainsi incapables de transmettre le virus aux humains piqués par les insectes.

Les moustiques en question, appelés Aedes aegypti, vecteurs de la dengue, du chikungunya, et du Zika, sont ainsi lâchés dans la nature à l’âge adulte depuis 2015 à Niteroi, ville voisine de Rio. D’après l’équipe, le processus est engageant, car il y a une « réduction significative » des cas de dengue et de chikungunya dans la région ciblée, a déclaré Cameron Simmons, directeur de l’équipe de chercheurs chargée d’étudier l’évolution de l’impact du Programme « World Mosquito Program ».

Des tests ont permis de rendre compte des moustiques désormais porteurs de la bactérie résistante. Plus de 90% sont aujourd’hui porteurs dans les régions où les « lâchers de moustique » ont eu lieu. Réduisant ainsi les cas de dengue de 70% à 75% dans la région.

Toutefois, même si l’opération est convaincante, elle n’est pas suffisante pour autant. D’autres problèmes sont à prendre en compte, et à neutraliser. Il faudrait également réduire « la présence d’eau stagnante, terrain de prédilection pour la reproduction des moustiques », explique Luciano Moreira, coordinateur du projet de la Fiocruz : « les gens doivent absolument détruire les foyers de reproduction chez eux » explique-t-il, tandis qu’il cite pour exemple les seaux d’eau, les pots de plantes ou les pneus usagés.

La dengue fait de véritables ravages au Brésil, des millions de gens en sont victimes. Le virus provoque des fièvres terribles, et peut dans certains cas être fatal.

Une méthode de plus en plus utilisée

Le Brésil n’est pas le seul à employer cette technique, appelée la « méthode Wolbachia » (nom de la bactérie). Utilisée au Vietnam notamment, cette méthode est née en Australie en 2011, dont sont originaires les premières larves porteuses de la bactérie. Celles-ci ont d’ailleurs été importées au laboratoire de Rio pour commencer le programme.

Les insectes conservés dans des boites en plastique pendant une centaine de jours, ont ainsi le temps de copuler pour se reproduire en masse. Suite à quoi les femelles contaminées, déposent leurs larves à la surface de l’eau, ensuite récupérées puis lâchées dans la nature à l’âge adulte.

Des chercheurs travaillent sur la bactérie Wolbachia

Crédit : World Mosquito Program

Si cette méthode semble efficace, elle ne peut continuer de l’être qu’en étant réitérée régulièrement. Par conséquent, Luciano Moreira est inquiet de constater « qu’aucun lâcher ne pourra avoir lieu à Niteroi après décembre », en raison de coupes budgétaires.

D’autres méthodes sont à l’étude pour éradiquer ce type de virus. Certaines étant d’ailleurs portées sur le virus en lui-même : une équipe de chercheurs à Singapour, au service d’IBM, travaille depuis quelques années sur une macromolécule, capable d’empêcher le virus de se développer. Les tests menés contre Ebola ou la dengue semblaient ainsi concluants, et l’équipe a pour intention de trouver une macromolécule capable de s’appliquer à l’ensemble des virus.