Les territoires contaminés de Fukushima pourraient à nouveau produire de l’électricité. Un projet de 2,75 milliards de dollars devrait voir le jour pour construire des installations d’énergie renouvelable sur le site abandonné de Fukushima. Tout un symbole.

La catastrophe de 2011

Le 11 mars 2011, un tsunami provoqué par un séisme de magnitude 9 avait inondé la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. Ce tsunami avait endommagé le système de refroidissement de la centrale provoquant la fusion du cœur de 3 des 4 réacteurs de celle-ci.

Le monde se souvient de la catastrophe nucléaire, mais les 19 630 morts et 2 569 disparus, selon les chiffres de 2018, sont essentiellement dus au tsunami et au séisme. Le nombre de décès lié au nucléaire est, lui, sujet à débat.

Une seule victime liée à l’accident de la centrale a été officiellement reconnue. Une étude de Stanford évoque, quant à elle, 130 morts en lien direct avec les retombées radioactives. Les victimes de cancers de la thyroïde liés à la radioactivité restent difficiles à estimer.

Autour de la centrale de Fukushima, nichée contre le Pacifique, au moins 70 000 personnes ont été évacuées dans un périmètre de 20 km. Trois zones ont été mises en place selon leur degré de dangerosité. La zone verte est considérée comme habitable, une zone orange doit être habitable à terme et enfin la zone rouge où il est interdit de résider.

En 2017 le vidéaste Tev – Ici Japon a tourné et publié sur YouTube un reportage au sein de la zone interdite autour de la centrale de Fukushima Daiichi.

 

Une seconde vie pour la zone interdite

Pour redonner vie aux zones abandonnées, 11 centrales d’énergies solaires et 10 éoliennes vont être construites d’ici à 2024. L’ensemble devrait produire 600 mégawatts, un chiffre très inférieur au 4700 mégawatts que pouvaient produire les réacteurs de Fukushima Daiichi.

Les installations vont coûter environ 2,75 millions de dollars. Elles doivent être financées d’une part par un acteur public, la Banque de développement et d’investissement du Japon, et d’autre part par un acteur privé, la Mizuho Bank.

La préfecture de Fukushima est devenue, à la suite de la catastrophe, un territoire moteur en ce qui concerne les énergies renouvelables sur l’archipel. En 2014 L’Institut national des sciences et technologies industrielles avancées du Japon y a ouvert un centre de développement pour les énergies renouvelables.

La même année la préfecture s’est fixé comme objectif de satisfaire 100% de ses besoins énergétiques en énergie renouvelable d’ici 2040. En 2017 les énergies renouvelables représentaient 28% des besoins énergétiques de la préfecture et environ 60% de sa consommation d’électricité.

La part de renouvelable est bien plus importante à Fukushima que dans le mix énergétique du Japon dans son ensemble où il atteint 17% du total. En 2018, parmi les dix principaux producteurs d’énergie, le Japon est le troisième pays producteur d’électricité grâce au photovoltaïque et dixième sur l’éolien. À titre de comparaison la France se classe respectivement à la huitième et septième place.

Le nucléaire reste une part importante dans le mix énergétique japonais. À la suite de la catastrophe, le pays avait stoppé l’ensemble de ses 54 réacteurs nucléaires. Elle avait incité plusieurs pays à se retirer progressivement du nucléaire, dont l’Allemagne.

À la suite de cette décision, le Japon avait dû importer du gaz et du charbon pour combler le manque d’énergie électrique. Face à la hausse des prix de l’électricité et à des considérations d’indépendance énergétique en 2012, deux réacteurs avaient été relancés la même année. À l’époque le gouvernement avait décidé l’abandon définitif de l’atome à l’horizon 2030-2040.

La sortie du nucléaire n’est plus d’actualité au Japon

Avec l’élection de Shinzo Abe au poste de Premier ministre fin 2012, la sortie du nucléaire a été mise de côté. Le nouveau gouvernement a décidé en juin 2018 d’atteindre 22% de nucléaire dans son mix énergétique d’ici à 2030, la part du nucléaire japonais à la veille de la catastrophe de 2011 était de 30%. À titre de comparaison, la France, le pays le plus nucléarisé au monde, dispose de 58 réacteurs nucléaires qui représentent 27% des besoins en énergies de l’hexagone.

En mars 2019 9 réacteurs avaient déjà redémarré, 6 étaient en attente, 12 en train d’être expertisés, 9 en attente d’expertise et les 24 autres sont toujours à l’arrêt. Pour atteindre les 22% de part de nucléaire dans le mix énergétique japonais 30 réacteurs doivent être réactivés.

La décision du Japon, pourtant touché par la plus grande catastrophe nucléaire du XXIe siècle, illustre bien la difficulté pour les États de se passer de l’atome. À voir si les installations d’énergies renouvelables à Fukushima dépassent le simple cadre du symbole et s’imposent réellement comme la source d’énergie de demain sur l’archipel.