D’après une étude menée par un groupe international de scientifiques, il n’y a pas de gène de l’homosexualité, mais des composantes génétiques, alliées à une multitude de facteurs plus ou moins saisissables selon eux, capables d’intervenir dans les préférences sexuelles des humains.
Les marqueurs observés
Un groupe de chercheurs en Europe et aux États-Unis, membres du Broad Institute, et des écoles médicales de Cambridge, Massachusetts, et Boston se sont penchés sur la question de l’homosexualité depuis 2018.
Vaste sujet, souvent épineux, et pas toujours évident à définir. En effet, bon nombre de gens refusent cette étiquette, expliquant qu’ils ne souhaitent pas être catégorisés, et c’est bien leur droit, première chose (sur laquelle nous reviendrons un peu plus tard, d’ailleurs).
Deuxième chose, parmi les gens interrogés sur leur type de relations sexuelles, et autorisant l’étude de leur génome : 409 000 sont signataires avec UK Biobank (« banque » d’échantillons génétiques de personnes située au Royaume-Uni appartenant à des sujets âgés de 40 à 69 ans), et 68 500 avec 23andMe (entreprise de biotechnologie proposant une analyse du code génétique aux particuliers). C’est dit.
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Les résultats ont permis d’établir qu’il existait « 5 marqueurs significatifs » reliés au « comportement homosexuel ». Autrement dit, ces marqueurs génétiques ont été suffisamment trouvés dans les génomes de gens qui se disent « homosexuel », pour être considérés comme « significatif ». On suppose que c’est un fait établi et vérifiable. Parmi les personnes qui disposent de ces 5 marqueurs significatifs à la naissance, seul 1% d’entre eux disent avoir des relations homosexuelles. Parmi ces 1%, l’équipe de chercheurs estime que ces marqueurs, combinés à d’autres composantes génétiques seraient entre 8 et 25% responsables d’un comportement homosexuel.
Conclusion : même s’il existe des composantes génétiques, il n’y a pas de gène homosexuel. D’autant qu’il est rappelé que parmi les gènes étudiés, certains sont eux-mêmes soumis et/ou plus ou moins sensibles à des conditions environnementales qui restent parfois à définir.
Les préférences sexuelles de l’humain seraient en partie fondées sur un ensemble complexe de composantes génétiques, dont le rôle ne dépasserait pas les 25%, et de raisons dues à l’environnement et à l’expérience de l’individu. Il est donc impossible de prédire le comportement sexuel des personnes en étudiant simplement leur génome, rapporte Benjamin Neale, directeur du département génétique au Broad institute. Il soutient également qu’on ne peut donc accorder aucune valeur aux cures remèdes qui auraient pour but de guérir l’homosexualité.
As with other behavioral traits such as personality, there is no single “gay gene.” Instead, same-sex sexual behavior appears to be influenced by perhaps hundreds or thousands of genes, each with tiny effects, according to new research. https://t.co/bkBvSau6Xu
— News from Science (@NewsfromScience) 29 août 2019
Espérons que ces conclusions puissent faire changer d’avis les personnes à l’esprit obtus.
Les limites du projet
Les scientifiques le rappellent, ces conclusions doivent tenir compte de plusieurs éléments.
Le premier étant que les résultats ne prennent en compte que des personnes qui on eu des relations homosexuelles, pas celles qui souhaiteraient, ou supposent vouloir en avoir, ou qui sont inconfortables à l’idée de divulguer le fait d’en avoir eu.
Le deuxième élément est qu’une personne ayant, ou ayant eu des relations homosexuelles, ne se définit pas pour autant comme homosexuelle.
Le troisième élément est qu’aucune personne ne se définissant comme transgenre ou transsexuel(le) n’ont fait partie des cas étudiés.
Ainsi il faut tenir compte de la manière dont les gens se définissent.
Pourquoi des hommes préfèrent des hommes, pourquoi des femmes préfèrent des femmes, pourquoi telle personne a des aptitudes pour écrire, faire des mathématiques, pourquoi telle autre semble avoir plus d’aptitudes qu’une autre…
Définir les origines d’un comportement homosexuel, semble revenir à vouloir définir les origines de ce que l’on appelle l’intelligence et les facultés intellectuelles. C’est une chose complexe et particulièrement difficile à mesurer. Pour ne prendre qu’un seul exemple, prenons l’une des dernières études concernant 40 gènes susceptibles d’être associés à « l’intelligence », mais qui ne représentent que 5% des éléments à prendre en compte pour commencer d’établir les origines de celle-ci.
N’oublions pas non plus que certains refusent l’étiquette d’homosexuel, nous en parlions au début de cet article, et préfèrent le terme de pansexuel par exemple, mettant ainsi en avant le principe de désirer une personne, au-delà du corps humain.
Difficile en effet de séparer le désir et le plaisir conceptualisé chez l’humain, indubitablement lié à son comportement sexuel, et ce depuis l’antiquité, il n’y a qu’à relire L’Illiade de ce bon vieux Homère.
L’étude du comportement humain semble donc très difficile à évaluer d’un point de vue scientifique.
Peut-être à cause de tout ce qu’on ignore encore, notamment sur le fonctionnement du cerveau humain, il semble très difficile en effet d’en évaluer les origines. Tenter de comprendre précisément les attitudes, les préférences, les aptitudes, les réactions ou la logique de l’être humain et de l’être vivant en général, c’est aussi admettre, semble-t-il, qu’aucune science n’est exacte.
Et pour peu que nous soyons capables d’énoncer les origines de tel ou tel comportement, il semble nécessaire de faire appel à quelques principes éthiques.
Prenons un extrême : admettons par exemple que l’étude eut été en mesure de démontrer qu’il existait bien un gène de l’homosexualité, bien nous aurions tout à fait été libres de dire : et alors ?
D’un point de vue moral, rien ne change, les « hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit ».
Et plus les recherches sur le comportement humain évolueront, plus il faudra garder en tête que ce type d’étude ne permet rien d’autre que d’établir des données.
Ajoutons que les scientifiques à l’origine de cette étude semblent établir leurs conclusions comme de simples données, eux aussi. Et pour preuve, plusieurs d’entre eux ont pris soin de communiquer officiellement leur homosexualité, sans doute pour éviter toute confusion et mauvaises interprétations de la part de gens mal intentionnés.
Comme quoi, il est toujours utile d’évaluer et d’interpréter les données scientifiques au regard du droit humain, qui, lui, trouve en partie ses origines dans les fondements humanistes.