La digitalisation de la ville est en marche mais elle avance à très petits pas, même si les sujets de SMART CITY et de villes intelligentes sont entrés dans le vocabulaire rien n’est encore écrit. Les sujets sont complexes et protéiformes et doivent être portés par des décisions politiques et c’est d’ailleurs Bill Clinton qui fut le premier à parler de la notion de « SMART CITIES » en 2005, en exprimant que les villes sont en fait déjà intelligentes mais qu’elles doivent désormais devenir durables. Les performances urbaines ne dépendent plus seulement de la dotation de la ville d’infrastructures physiques mais également de travailler sur le social, les services et surtout l’environnemental, les sujets de mobilités sont au centre des préoccupations.

La mobilité intelligente sera basée sur l’efficience énergétique.

Les transports sont responsables du quart des émissions de CO2 au niveau mondial et des réglementations de plus en plus strictes participent à la lutte mondiale contre le changement climatique. L’accord de Paris sur le climat pour contenir le réchauffement climatique en dessous de 2 degrés nous oblige à « décarboner » nos économies très rapidement et significativement, et en particulier le secteur des transports. Les émissions de C02 en g/KWh pour la consommation électrique sont considérables, et si la France est très faiblement émettrice en comparaison des autres pays européens un kWh électrique produit environ 0,09 kg équivalent CO2 dans l’hexagone mais la moyenne pour l’Europe est beaucoup plus élevée : 0,44 kg CO2 eq. / kWh. Mais ces chiffres sont très variables puisque 1 kWh hydraulique ne produit que 4 grammes équivalent CO2 contre 1 kg équivalent CO2 pour 1 kWh charbon (source ADEME). L’explosion de l’adoption des véhicules électriques va augmenter significativement le besoin en énergie et donc la production.

La mobilité électrique apparaît aujourd’hui comme la seule solution viable pour contenir le réchauffement climatique.

Les signaux politiques voire réglementaires envoyés par les différents États ou par le parlement européen montrent que la question aujourd’hui n’est plus de savoir si le véhicule électrique va décoller ou pas mais de faciliter cet essor pour les utilisateurs. Seulement voilà, à l’instar du début du web, les constructeurs sont nombreux et les services existent mais pas encore l’infrastructure du réseau. Brancher sa voiture aujourd’hui sur une prise électrique est l’équivalent du modem 56K du début des années 2000. Blackrock (société multinationale de gestion d’actifs) rapporte que les ventes de véhicules électriques devraient s’envoler de 1,1 million actuellement à 60 millions à horizon 2040 (sources Blackrock et Bloomberg New Energy Finance, juillet 2018). Ils estiment que la diversité des modèles et le développement des réseaux de bornes de recharge sont déterminants pour une commercialisation de masse de voitures, autobus et camions à propulsion électrique.

La SMART CITY sera t’elle construite sur l’infrastructure de la mobilité électrique ?

L’essor de la mobilité électrique passera donc par la mobilisation de tout un écosystème qui embarque les constructeurs, les équipementiers, les promoteurs immobiliers, les collectivités territoriales. Si seuls les constructeurs automobiles jouent le jeu et avancent sur ces technologies, nous nous retrouvons comme ces matins de noël quand nous ouvrions nos jouets et que « le père noël » avait « oublié » de mettre des piles dans les cadeaux. Chaque petit garçon a ainsi commencé la conduite sur une voiture électrique qu’elle ait été téléguidée ou télécommandée (moins sympa) et dont le plus gros problème était, selon moi, liés à la capacité des batteries !

Les annonces marquantes de EVS32

C’est ce type de problématiques qui ont été traitées lors de la 32eme édition de l’Electric Vehicule Symposium (#EVS32) qui s’est tenu à Lyon du 19 au 22 Mai. Le groupe EDF qui a lancé en 2018 son plan mobilité électrique y a annoncé vouloir prendre la position de leader du SMART CHARGING en Europe. Même si cette place lui revient de droit de par la taille de cet énergéticien, la rupture technologique induite par ces véhicules intelligents contraint l’industriel à accélérer le développement des solutions de SMART CHARGING nécessaire à la mobilité électrique encore balbutiante aujourd’hui mais qui sera prépondérante demain.

La vision à moyen terme, selon les études publiées par RTE, projette qu’en 2035 nous devrions compter 8,3 millions de véhicules électriques et/ou de véhicules hybrides rechargeables en circulation en France. En termes de projection de besoins, pour ces 8,3 millions de véhicules électriques il faut compter 18GW de puissance disponible à supporter par le système électrique. Pour donner une échelle 1 Gigawatt correspond à peu près aux besoins en électricité d’un million de personnes. C’est aussi la puissance fournie par un réacteur nucléaire standard.

Qu’est-ce-que le SMART CHARGING ?

Le SMART CHARGING (ou charge intelligente) répond à la fois à l’enjeu de charge, l’enjeu économique et l’enjeu environnemental. Ce terme générique désigne les technologies visant à optimiser la charge voire la décharge d’un véhicule électrique, en gérant la puissance de recharge du véhicule de façon efficace, flexible et économique. Les bornes permettant d’adapter de manière optimale la source d’énergie utilisée pour la charge : soit en alimentant directement la borne par des panneaux photovoltaïques installés localement, soit en utilisant de l’énergie solaire stockée dans des batteries, soit en alimentant la borne par le réseau électrique uniquement sur des périodes favorables (hors pics de consommation).

Le vehicule-to-grid ou V2G

Plus la charge d’un véhicule électrique sera pilotée, plus cela sera favorable à la fois aux utilisateurs et au système électrique. Une brique supplémentaire est le service V2G pour VEHICULE TO GRID qui permet la réinjection de l’énergie stockée dans la batterie du véhicule électrique pour venir soutenir le réseau électrique en cas de besoin. Le groupe EDF a annoncé la création d’une nouvelle filiale dédiée au SMART CHARGING, DREEV, née de la joint-venture avec la start-up californienne NUVVE, qui a développé une technologie performante et innovante dans le SMART CHARGING. Ce n’est pas leur premier pas dans ce sens puisque depuis presque 2 ans, IZIVIA filiale du groupe se positionne sur des offres de SMART CHARGING local à destination de ses clients B2B/B2G avec pour objectif d’optimiser localement les consommations d’électricité liées à la recharge en favorisant l’effacement de la charge. Raccorder 10 000 véhicules électriques au réseau équivaudrait à l’apport d’une centrale nucléaire en cas de besoin. Les entités devraient travailler de concert pour offrir plus de services aux particuliers comme aux professionnels.

Alimenter son domicile en électricité en utilisant son véhicule

Réinjecter l’énergie excédentaire dans le réseau c’est déjà une réalité aux Pays-Bas, au Portugal et bientôt en France grâce à EDF. Ce scénario ne relève pas de la science-fiction. Transformer les batteries en autant d’unités de stockage permettrait non seulement de réduire la facture des utilisateurs de voitures propres, mais aussi de faire charger par votre voiture, votre maison ou bien un chalet en zone non constructible et non raccordé au réseau. Cela ouvre un mode de vie hors réseau.