Le 13 mars dernier, Spotify annonçait avoir déposé une plainte contre Apple auprès de la Commission Européenne pour abus de position dominante. Dans un article de blog, Daniel EK, cofondateur et PDG de Spotify explique « ces dernières années, Apple a introduit dans l’App Store des règles qui limitent délibérément le choix et étouffent l’innovation au détriment de l’expérience utilisateur, agissant essentiellement à la fois comme joueur et comme arbitre pour désavantager délibérément les autres développeurs d’applications. »
Spotify accuse ainsi Apple de concurrence déloyale et espère que la Commission Européenne se placera du côté du géant suédois et plus largement de l’ensemble des applications.

Apple a trop d’avantages

Daniel EK précise « Apple est à la fois propriétaire de la plate-forme iOS et de l’App Store – et concurrent de services tels que Spotify. » Il ajoute que la firme à la pomme demande à Spotify et autres services numériques de payer « une taxe de 30% sur les achats effectués via le système de paiement Apple, y compris la mise à niveau de notre service gratuit vers notre service Premium. » Cette taxe obligerait ainsi Spotify à « gonfler artificiellement le prix de notre abonnement Premium bien au-dessus du prix de Apple Music. »  Si Spotify ne se plie pas aux règles, l’entreprise se voit appliquer des restrictions qui impactent l’expérience utilisateur.

Les demandes de Spotify

Au travers de son article Daniel Ek, demande trois choses, à savoir :

  • Une concurrence loyale : « nous devrions tous être soumis aux mêmes règles et restrictions, y compris Apple Music. »
  • Plus de choix pour les utilisateurs : « les consommateurs devraient avoir le choix du système de paiement et ne devraient pas être bloqués à utiliser des systèmes avec des tarifs discriminatoires tels que ceux de Apple.« 
  • « les stores ne devraient pas être autorisés à contrôler les communications entre les services et les utilisateurs. « 

Apple réagit et tacle

Du côté d’Apple, la société a bien entendu les remarques du géant du streaming et prend le temps de répondre assez précisément sur chaque point à travers un communiqué.
Dans son introduction, Apple explique « après avoir utilisé l’App Store pendant des années pour développer considérablement leur activité, Spotify souhaite conserver tous les avantages de l’écosystème de l’App Store, y compris les revenus substantiels générés par les clients de l’App Store, sans apporter aucune contribution à ce marché. »

En ce qui concerne le blocage de Spotify et des mises à jour, Apple précise que « près de 200 mises à jour d’application pour le compte de Spotify ont été approuvées et distribuées, ce qui a permis de télécharger plus de 300 millions de copies de l’application. »

Au sujet d’une potentielle exclusion des services de la firme à la pomme, Apple écrit « Spotify est profondément intégré à des plateformes telles que CarPlay et la firme a accès aux mêmes outils et ressources de développement d’applications qu’aux autres développeurs. » Apple ajoute que l’application Spotify Watch, disponible sur l’Apple Watch est numéro 1 de la catégorie Musique. Les accusations de Spotify sont donc « surprenantes » pour le géant américain qui ajoute « Spotify est libre de créer des applications et de concurrencer nos produits et nos plateformes, et nous espérons qu’ils le feront. »

« Spotify veut tous les avantages d’une application gratuite sans être gratuite »

Apple revient sur son business model et précise que « 84% des applications de l’App Store ne paient rien à Apple. » Les applications gratuites, celles dont les revenus proviennent de la publicité ou encore celles dont les achats se font en dehors de l’application n’ont rien à payer, tout comme celles qui proposent des services de téléphonie mobile ou encore de livraison de nourriture à l’instar d’Uber par exemple.
Les applications qui doivent payer quelque chose à Apple, sont celles où « des biens et services numériques sont achetés dans l’application à l’aide du système d’achat intégré sécurisé. » L’entreprise de Tim Cook ajoute que les entreprises doivent payer 30% certes, mais qu’au bout de la seconde année ce n’est plus que 15%. L’application gratuite de Spotify reposant sur la publicité ne paie donc rien à Apple et « seule une infime fraction de leurs abonnements relève du modèle de partage des revenus d’Apple.  »

Pour terminer, Apple ajoute « Spotify ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui sans l’écosystème de l’App Store, mais ils tirent maintenant parti de leur envergure pour éviter de contribuer à la préservation de cet écosystème pour la prochaine génération d’entrepreneurs en applications. » Apple accuse également le géant suédois de vouloir « gagner plus d’argent grâce au travail des autres. »

Affaire à suivre

Maintenant que les deux acteurs se sont exprimés et ont réagit aux propos de l’autre, c’est la Commission Européenne qui tranchera. Un spécialiste du droit et expert antitrust explique que « Spotify a probablement un très bon dossier en Europe. »
Point à retenir, dans son communiqué Apple ne s’exprime pas vraiment sur les « passe-droits » accordés à Apple Music.  Et c’est principalement pour cette raison que Spotify porte plainte.
Il y a quelques mois, la Commission Européenne a condamné Google à payer une amende de 4,34 milliards d’euros pour abus de position dominante avec Android. On devrait savoir d’ici quelques mois, quelle suite sera donnée à cette plainte donc !